Le Président malien Amadou Toumani Touré a fait officiellement don au Sénégal, mardi, de 25 000 hectares de ses terres. Cette initiative, qui entre dans le cadre du développement des Etats saharo-sahéliens, a pour objectif de « promouvoir l’intégration africaine et d’assurer la sécurité alimentaire », selon l’Office du Niger au Mali, en charge de gérer les propriétés terriennes de l’Etat.
Le Sénégal s’agrandit de 25 000 hectares. Le Mali a en effet officiellement offert, mardi, cette superficie au Sénégal. Le terrain est fertile, mais pas aménagé. Cette initiative entre dans le cadre d’une coopération accrue entre Bamako et Dakar et des activités de développement de la Communauté des Etats saharo-sahéliens (Cen-Sad), créée par le Président libyen Mouammar Kadhafi.
Payer la redevance de l’eau ou perdre la terre
« Le Président Amadou Toumani Touré a officiellement fait don, hier (mardi, ndlr), des terres à Abdoulaye Wade, mais le contrat a été signé en avril. Les papiers administratifs sont en cours de finalisation concernant une première expérimentation sur 5 000 des 25 000 hectares », précise Moustapha Maiga, chargé de communication de l’Office du Niger (ON), en charge de gérer les terres de l’Etat malien. Il ajoute que le Sénégal s’occupera ainsi du quart des 100 000 hectares que le chef de l’Etat a mis de côté pour les Etats membres de la Cen-Sad, lorsqu’il a pris la tête de l’instance. C’était début 2004. « 40 000 hectares sont en zone Diabali (450 km au Nord de Bamako) et 60 000 sont en zone Macina (360 km Bamako) », précise Moustapha Maiga.
Ce dernier détaille le fonctionnement du contrat : « Selon le cadre juridique de la Cen-Sad, si une parcelle est offerte, le pays receveur doit aménager, à ses frais, la terre. Il pourra ensuite la cultiver avec l’eau que lui donnera l’Office du Niger. Et à la campagne de récolte de mai-juin de l’année suivante, il paiera une redevance pour l’eau par hectare fixée selon la qualité du terrain : 65 000 FCFA si l’eau entre et sort très bien du champ, 55 000 FCFA si l’eau entre bien mais sort avec difficulté et 44 000 FCFA si l’eau rentre et sort avec problèmes. Si la redevance n’est pas payée ou que la terre n’est pas utilisée, le champ est retiré. Toutes les cultures produites reviennent en revanche au pays exploitant ».
Des aménagements coûteux
Seul le Sénégal s’est lancé dans l’aventure, mais les chefs d’Etat gambien Yahya Jammeh et nigérien Mamadou Tandja, ainsi que l’ex Président mauritanien Maaouya Ould Sid’Ahmed Taya, avaient manifesté un intérêt. Mais rien de concret ne semble se profiler. Peut-être à cause du coût des travaux : « Pour aménager l’irrigation d’un hectare, il faut à l’Office du Niger entre 1 et 2 deux milliards de FCFA », confie Moustapha Maiga. Une coquette somme que tous ne peuvent pas se permettre.
L’objectif du don de terre est de « promouvoir l’intégration africaine et d’assurer la sécurité alimentaire des Etats membres de la communauté ». Mais, il y a quelques semaines, les Nations Unies tiraient la sonnette d’alarme contre l’oubli de la famine au Mali, alors que les yeux du monde étaient tournés vers le Niger. Alors comment expliquer que le Mali ait offert à son voisin sénégalais des terres cultivables alors que sa propre sécurité alimentaire n’est pas assurée ? « Le Président Toumani Touré a expliqué hier qu’en faisant cela, il a montré une bonne volonté, mais je pense qu’il sait que beaucoup n’accepteront pas l’offre de terres, par manque de moyens. Il faut savoir que nous avons plus de 900 000 hectares de terres irrigables, dont 82 000 aménagés. Avec des terres aménagées, nous couvrons 53% des besoins alimentaires », indique Moustapha Maiga.
En marge de sa nouvelle « Opération production », le Sénégal a annoncé, mardi, qu’il n’importera plus d’Asie et des Etats-Unis les 600 000 tonnes de riz dont il a besoin chaque année. Le Président Wade aurait en effet expliqué qu’il achèterait au Mali 300 000 tonnes de la céréale, une mesure qui lui permettra, « au lieu de donner des devises aux Asiatiques et aux (Nord-)Américains, de réduire ses coûts d’exportation et d’aider le Mali », rapporte le chargé de communication de l’ON. Une autre bonne nouvelle pour le pays.