Le gouvernement malien continue de secouer le secteur minier en réaffirmant sa souveraineté sur l’exploitation de ses ressources naturelles. Resolute Mining Ltd, l’une des principales compagnies minières étrangères opérant dans le pays, a annoncé dans un communiqué le règlement de 160 millions de dollars avec Bamako, après que son PDG, Terry Holohan, et deux cadres ont été arrêtés le 9 novembre à Bamako. Cet accord marque une nouvelle étape dans la refonte du code minier malien, qui impose désormais des règles beaucoup plus strictes aux exploitants étrangers.
Un accord à 160 millions de dollars pour apaiser les tensions
Resolute Mining, propriétaire de la mine stratégique de Syama, a opté pour un règlement financier afin d’éviter une escalade avec le gouvernement malien. La compagnie australienne a déjà versé 80 millions de dollars en espèces, le solde étant attendu dans les prochains mois. Ce règlement, qualifié de « nécessaire » par l’entreprise, vise à éteindre les accusations portées contre elle, tout en permettant la libération prochaine des trois employés détenus à Bamako.
Dans son communiqué publié à la bourse de Sydney, Resolute a confirmé que ses cadres, bien que toujours retenus, sont en bonne santé et bénéficient d’une assistance consulaire. Cette annonce intervient alors que l’entreprise avait récemment revu à la baisse ses prévisions de production pour 2024, à 200 000 onces d’or contre 345 000 auparavant.
Un secteur minier sous contrôle étatique accru
Cet épisode s’inscrit dans une série de réformes radicales initiées par la junte militaire au pouvoir à Bamako depuis 2021. Le nouveau code minier adopté l’année dernière oblige les exploitants étrangers à renégocier leurs contrats pour inclure une participation accrue de l’État, désormais portée de 20 % à 35 %, tout en supprimant les avantages fiscaux jugés excessifs. Les entreprises doivent également rembourser rétroactivement ces avantages, une mesure qui a déjà coûté cher à des géants comme Barrick Gold, sommée de payer 512 millions de dollars d’arriérés.
Pour les autorités maliennes, ces réformes visent à maximiser les retombées économiques locales, en favorisant l’emploi des nationaux et en renforçant le contrôle sur les richesses minières. Le message est clair : les exploitants étrangers doivent se conformer aux nouvelles règles ou quitter le territoire.
Un climat d’incertitude pour les investisseurs étrangers
Les mesures drastiques de la junte, bien qu’applaudies par la population, inquiètent les investisseurs internationaux. La réforme du secteur minier malien est perçue comme un signal fort d’une volonté de souveraineté économique, mais elle s’accompagne de risques accrus pour les entreprises étrangères.
Dans ce contexte, des spéculations émergent sur une possible entrée d’acteurs russes dans le secteur minier, renforcée par les liens sécuritaires entre Bamako et Moscou. Bien que rien n’ait encore été officialisé, cette perspective accentue l’incertitude pour les partenaires traditionnels du Mali, notamment en Occident.
Un exemple pour la région ?
Le Mali, à travers cette reprise en main de son secteur minier, s’inscrit dans une dynamique observée dans plusieurs pays de la région, comme le Burkina Faso et le Niger. Ces nations, confrontées à des défis sécuritaires et économiques majeurs, adoptent des politiques similaires pour tirer un meilleur profit de leurs ressources naturelles.
Avec cet accord conclu entre Resolute Mining et Bamako, le Mali envoie un message clair : l’ère des contrats déséquilibrés au profit des multinationales est révolue. Cependant, la durabilité de cette stratégie dépendra de la capacité du gouvernement à maintenir l’équilibre entre souveraineté économique et attractivité pour les investisseurs étrangers.