Le maire était dans l’opposition


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Alphonse Maindo était un maire atypique. Non seulement, il a été élu à main levée mais aussi déchu par un pays tiers. Cela se passe en République démocratique du Congo. La parenthèse démocratique s’est refermée après la prise de Kisangani par les rebelles de RDC.

Alphonse Maindo, enseignant en sciences politiques à l’université de Kisangani, était avant tout un militant des droits de l’Homme. Quand il est devenu maire, il n’a rien voulu sacrifier à ses convictions, en raison de la real politik. En refusant de se plier à la raison d’Etat, il s’est fait des ennemis dans tous les clans. Interview.

Afrik : Comment êtes-vous devenu maire de Kisangani ?

Alphonse Maindo : J’étais président d’une ONG locale des droits de l’Homme et je donnais des cours à l’université de Kisangani. J’étais chez moi en train de me reposer lorsque des amis ont fait irruption pour me demander de me présenter aux élections. J’avais demandé un temps de réflexion. Ils ont refusé car le vote était fixé pour une heure plus tard !

Afrik : C’est un peu court pour mener une campagne électorale !?

Alphonse Maindo : C’était le jour de l’arrivée de Laurent-Désiré Kabila à Kisangani. La population était en liesse, elle se débarrasse enfin de Mobutu. On avait accueilli Kabila en héros qui vient de nous libérer des sbires de Mobutu. Quand Kabila était descendu à l’aéroport de Kisangani, le 25 mars 1997, la radio annonçait la tenue des élections sur la place municipale.

Afrik :Comment avez-vous fait pour être élu ?

Alphonse Maindo : Quand nous sommes arrivés à la place municipale, mon nom était parmi ceux des 28 autres candidats. Mes amis m’avaient déjà inscrit sur la liste des candidats. Mon passé de militant des droits de l’Homme a été un grand atout. J’ai été élu à main levée.

Afrik : Quels ont été vos priorités ?

Alphonse Maindo : J’ai voulu restaurer l’Hôtel de ville qui a été entièrement détruit par la population lors des émeutes contre le régime de Mobutu. Les habitants croyaient que Kabila incarnerait le changement mais ont dû déchanter très vite…

Afrik : C’est-à-dire ?

Alphonse Maindo : Les belles voitures prenaient la route de Kampala et de Kigali. Les troupes étrangères se comportaient en terrain conquis et le nouveau régime commençait à ressembler étrangement à son prédécesseur. Les militaires frappaient les gens dans la rue…

Afrik : Pourquoi avez-vous été arrêté ?

Alphonse Maindo : On ne m’avait jamais dit pourquoi. Le jour de ma libération, les militaires m’ont dit officiellement que c’était une bavure. Mais j’ai appris plus tard que les Forces patriotiques rwandaises me reprochaient mes liens avec les ONG des droits de l’Homme, mon manque de collaboration et de ne pas appliquer leurs directives.

Afrik : Quelles sont ces directives ?

Alphonse Maindo : On me demandait d’arrêter les réfugiés Hutus. Je l’avais fait le premier jour, mais les réfugiés qui avaient été arrêtés ont disparu dans la nuit. Des militaires les ont emmenés pour une destination inconnue. A mon arrivée le lendemain matin, j’ai trouvé les cellules vides. Les officiers m’ont prié de ne pas poser de questions. Un commandant m’a fait comprendre que les réfugiés sont appelés à disparaître. Alors, j’ai refusé cette collaboration. C’est ce que les Rwandais m’ont reproché.

Afrik : Pourquoi avez-vous fui la République démocratique du Congo ?

Alphonse Maindo : Après la prise de Kisangani par le RDC (mouvement rebelle soutenu par le Rwanda), j’ai compris qu’il fallait partir très vite de la ville. Après m’être caché pendant deux mois, j’ai réussi à m’enfuir avec une pirogue.

Afrik : Comment avez-vous été accueilli en France ?

Alphonse Maindo : Un ami, Père Emmanuel Laffont, a réussi à me décrocher une bourse d’études pour que je puisse terminer ma thèse en France. Actuellement, j’ai un statut d’étudiant en France.

Afrik : Vous pensez au retour ?

Alphonse Maindo : Beaucoup. Je ne rêve que de ça.

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