Le journaliste Fahem Boukaddous adresse une lettre ouverte à l’opinion publique


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Drapeau de la Tunisie
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Le journaliste tunisien Fahem Boukaddous s’adresse à l’opinion publique dans une lettre ouverte depuis son lit d’hôpital.

L’opinion publique est certainement déjà au courant du calvaire que j’ai vécu et que je vis encore depuis une semaine. En effet, alors que je suis encore hospitalisé, depuis le 3 juillet 2010, au service de pneumologie du Centre Hospitalo-universitaire (CHU) Farhat Hached à Sousse, suite à une crise d’asthme sévère, la cour d’appel de Gafsa a confirmé, mardi 6 juillet 2010, en mon absence et sans que mon avocat ait eu la possibilité de plaider, un verdict, rendu en première instance, me condamnant à une peine de quatre ans de prison ferme, pour « participation à une entente criminelle ayant pour but de porter atteinte aux personnes et aux biens et pour diffusion d’informations de nature à troubler l’ordre public ».

Un jugement sévère et inique rendu en violation flagrante du code de procédure pénale qui prévoit que quand un accusé est hospitalisé, le procès est automatiquement reporté. De plus, l’hôpital où je suis actuellement alité est encerclé par des policiers en civil qui exercent une pression sur les médecins pour qu’ils m’autorisent à quitter l’hôpital afin de pouvoir m’arrêter.

Par la présente lettre, je m’adresse à l’opinion publique nationale et internationale, et en premier lieu au corps journalistique auquel j’ai l’honneur d’appartenir, pour attirer leur attention sur la gravité extrême de ma situation.

En effet, je souffre depuis 20 ans d’une insuffisance respiratoire chronique due à des crises récidivantes d’asthme sévère. Une pathologie lourde qui a atteint un stade avancé, devenant de plus en plus handicapante, physiquement et psychologiquement. La surinfection pulmonaire affectant mes deux poumons et l’obstruction des bronches entraînent une diminution de l’apport en oxygène au niveau du cerveau, et provoquent un coma anoxique nécessitant le recours à une ventilation artificielle, seul moyen de me sauver d’une mort certaine.

Mon transfert en milieu carcéral, un espace dans lequel j’ai déjà vécu que je connais très bien, ne fera donc que compliquer davantage ma situation. La promiscuité, la saleté, l’humidité, le tabagisme passif dans des cellules bondées de fumeurs et la chaleur accablante de l’été, sont, pour une pathologie comme la mienne, des facteurs très aggravants. De plus, en raison de l’intervention de l’administration pénitentiaire, le suivi médical que nécessite mon état de santé ne peut pas être assuré avec la célérité et l’efficacité requises. Mon transfert en prison est, de ce fait, une véritable condamnation à mort.

Tout en vous adressant cet appel, je fais porter aux autorités tunisiennes la responsabilité de toute dégradation inéluctable de mon état de santé. Si je suis incarcéré en quittant l’hôpital c’est vers une prison mouroir que je serai dirigé.

J’ai choisi la profession de journaliste par engagement au service de la liberté d’expression, par amour de la vérité et de l’intégrité. Je suis parfaitement conscient qu’en choisissant cette voie j’ai un lourd tribut à payer. Je suis prêt à assumer ce choix et à emprunter le même chemin que ceux qui m’ont précédé, avec autant d’audace et de courage. Les condamnations injustes ne sauraient m’en dissuader, même si c’est au péril de ma vie que je suis prêt à sacrifier sur l’autel de la liberté et de la démocratie.

Le journaliste Fahem Boukaddous

Correspondant de la chaîne satellitaire « Al Hiwar Ettounsi » et du site électronique « Al Badil »

Centre Hospitalo-universitaire (CHU) Farhat Hached, Sousse (Tunisie)

Pour tout renseignement complémentaire:

Le Comité pour la protection des journalistes

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