Le Caire s’impose comme le médiateur incontournable des pourparlers israélo-palestiniens. Une place jalousement gardée qui consacre le pays dans son rôle de leader du monde arabe. En prenant l’initiative d’annoncer l’annulation du sommet de Charm el-Cheikh, l’Egypte rappelle à Washington, jeudi, qu’elle a la main haute sur le processus de paix.
Mais quelle carte joue l’Egypte dans les très laborieuses négociations d’un accord de paix au proche Orient ? La réponse est contenue dans la question : la carte de l’Egypte, justement.
La diplomatie américaine qui espérait un deuxième accord de Charm el-Cheikh sur la base des propositions de la Maison Blanche, a dû s’en souvenir, jeudi, lorsque le ministre égyptien de l’Information a fait savoir que le sommet était purement et simplement annulé, mettant un terme aux pressions américaines sur le Premier Ministre israélien, Ehud Barak, pour qu’il se rende dans cette station balnéaire de la mer rouge.
Un leadership à défendre
L’Egypte, premier pays arabe à avoir signé un accord de paix avec Israël, se veut également la première nation arabe, avec ses 60 millions de citoyens. Ce leadership que lui reconnaissent les » pays frères » en confiant au pays la direction de la Ligue arabe, Le Caire entend bien le conserver. Quitte à jouer au funambule. Les autorités égyptiennes ont pris le soin de présenter le rappel de leur ambassadeur à Tel-Aviv, le 21 novembre, non comme une rupture, réduisant à néant sa capacité de médiation, mais comme un » avertissement « . Nuance de taille pour Le Caire qui entend peser sur le processus de négociation.
Malgré l’annulation du sommet tripartite, le président Moubarak a tenu à retenir son hôte palestinien, Yasser Arafat, afin de poursuivre » des conversations constructives » sur l’avenir du processus de paix. En clair : le plan de paix du président Clinton fait l’objet d’un examen au scalpel des deux leaders, dont les conclusions seront livrées lors de la prochaine réunion du sommet arabe, qui aura lieu lundi… au Caire.
Fermeté face à Washington
On est loin du refus catégorique des propositions de paix américaines que les Palestiniens avaient qualifiées d’ » inacceptables « . Difficile de ne pas voir dans ce changement de ton la marque du président Moubarak.
Côté israélien, on tient à ne pas décourager l’interlocuteur égyptien dans ses efforts permanents pour rapprocher les deux parties. Le refus de Barak de se rendre à Charm el-Cheikh, constitue, certes un seconde gifle pour la diplomatie égyptienne, après une décision comparable le 5 octobre. Mais Tel-Aviv a laissé la porte entrouverte en laissant entendre que le sommet tripartite pourrait avoir lieu si les Palestiniens acceptaient le projet américain.
A la Maison Blanche, où l’on s’irrite de l’intransigeance palestinienne ( » Arafat sait-il que Clinton s’en va dans trois semaines ? « ) Le Caire a tenu a rappeler, avec une courtoisie toute orientale, que l’Egypte n’avait que faire de l’agenda politique américain et qu’elle ferait avancer le dossier au rythme où elle l’entendait.