
À compter du 1er mai, le Ghana interdira aux étrangers d’exploiter et de commercer l’or artisanal. Cette décision marque un tournant décisif dans la gestion de ses ressources naturelles de ce pays d’Afrique de l’Ouest.
Premier producteur d’or en Afrique, le Ghana souhaite mieux encadrer le secteur stratégique de l’or. C’est dans cette perspective que la décision d’interdire aux étrangers d’exploiter et de commercer l’or artisanal. L’objectif étant de maximiser les revenus nationaux et de freiner la contrebande. La mesure a été annoncée par le Ghana Gold Board, l’autorité publique de régulation de l’or.
Recentraliser la chaîne de valeur aurifère autour d’acteurs ghanéens
Elle s’inscrit dans une réforme plus large initiée sous la présidence de John Dramani Mahama. Elle vise à recentraliser la chaîne de valeur aurifère autour d’acteurs ghanéens et à mettre un terme à l’exploitation non contrôlée par des sociétés étrangères, notamment chinoises, très actives dans les filières artisanales du pays. Jusqu’à présent, aussi bien les entreprises locales qu’étrangères pouvaient acheter et exporter l’or issu de l’exploitation artisanale.
Désormais, seul le GoldBod, un organisme étatique, aura le droit d’acheter, de vendre et d’exporter ce métal précieux produit par les petits mineurs. Derrière cette décision, l’enjeu est économique. En 2023, 34 tonnes d’or artisanal ont été officiellement déclarées, mais les estimations de l’ONG Swissaid indiquent que la production réelle pourrait atteindre près du double.
Limiter la fuite des capitaux à l’étranger
Cette sous-déclaration prive le Ghana d’importants revenus fiscaux, dans un contexte où la monnaie nationale, le cedi, est sous forte pression. Le ministre des Finances a d’ailleurs souligné que les nouvelles recettes attendues de cette réorganisation permettraient de soutenir la stabilité monétaire du pays. L’un des principaux objectifs est également de limiter la fuite des capitaux à l’étranger.
La présence étrangère dans le secteur, dominée en grande partie par des entrepreneurs chinois – dont le nombre atteignait environ 50 000 il y a une dizaine d’années selon le South China Morning Post – a souvent été associée à des pratiques d’exploitation illégale et à l’exportation clandestine d’or. Le Ghana n’est pas le seul pays africain à chercher à mieux maîtriser ses ressources minières.
Décision nécessaire pour l’avenir économique de l’Afrique
En effet, d’autres États du continent ont récemment pris des décisions similaires. En Tanzanie, le gouvernement a imposé des restrictions sévères à l’exportation de minerais bruts, obligeant les entreprises à raffiner localement pour augmenter la valeur ajoutée nationale. Le Burkina Faso, de son côté, a lancé des audits sur les sociétés minières pour s’assurer de leur conformité fiscale et environnementale.
Ces initiatives s’inscrivent dans une tendance plus large de souveraineté économique en Afrique, où de nombreux pays souhaitent désormais que l’exploitation de leurs richesses naturelles bénéficie davantage à leurs économies locales. À l’heure où le continent cherche à concilier croissance et justice sociale, la réappropriation des ressources comme l’or artisanal apparaît comme une décision nécessaire pour l’avenir économique de l’Afrique.