Le Ghana ferme son marché aurifère artisanal aux étrangers


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Fabrication des lingots d'or

Le Ghana tourne une page stratégique de son histoire aurifère. À compter du 1er mai, seuls les acteurs nationaux pourront acheter et exporter l’or issu de l’exploitation artisanale. Une décision forte du gouvernement pour reprendre le contrôle d’un secteur vital, souvent miné par la fraude, l’ingérence étrangère et la destruction environnementale.

À partir du 1er mai, le gouvernement ghanéen interdit aux étrangers l’achat et la commercialisation de l’or issu de l’exploitation artisanale. Une réforme majeure qui vise à reprendre le contrôle sur un secteur stratégique, lutter contre les dérives illégales et renforcer l’économie nationale.

Un secteur clé repris en main

Premier producteur d’or en Afrique, le Ghana tire plus d’un tiers de sa production du secteur artisanal, une activité vitale pour près d’un million de personnes. Mais cette filière échappait en grande partie au contrôle de l’État, alimentée par des réseaux souvent dominés par des acteurs étrangers, notamment chinois. Le gouvernement a décidé d’y mettre un terme, en créant une nouvelle entité publique : le Ghana Gold Board (GoldBod).

Dès le 1er mai, seule une licence délivrée par le GoldBod permettra d’acheter ou d’exporter l’or produit par les petits mineurs agréés. Toutes les autorisations précédemment délivrées par la Precious Minerals Marketing Company sont annulées. Le GoldBod devient l’unique organisme habilité à analyser, certifier, vendre et réguler le précieux métal.

Stabiliser l’économie et préserver les richesses nationales

Cette décision ne répond pas uniquement à des préoccupations réglementaires. Elle s’inscrit dans un plan plus large de redressement économique. Le président John Dramani Mahama, confronté à une grave crise monétaire et à une inflation persistante, cherche à accroître les réserves de change, à stabiliser le cedi, la monnaie locale, et à endiguer les pertes fiscales liées aux ventes d’or échappant au circuit officiel.

En bloquant les exportations clandestines et en excluant les étrangers du marché local de l’or, le Ghana entend s’assurer que cette ressource stratégique bénéficie en priorité à l’économie nationale.

En finir avec l’exploitation illégale et les dégâts environnementaux

La réforme vise également à lutter contre les activités minières illégales, souvent associées à une forte dégradation de l’environnement. Nombreux sont les étrangers accusés d’utiliser des méthodes destructrices : pollutions des cours d’eau, déforestation massive, sols contaminés. Le gouvernement ghanéen souhaite assainir le secteur et imposer des pratiques plus durables, sous le contrôle du GoldBod.

Toute transaction en dehors de ce cadre légal est désormais passible de sanctions, a averti le porte-parole de l’institution, Prince Kwame Minkah, qui a donné aux étrangers jusqu’au 30 avril pour quitter le marché local de l’or.

Une transition sous tension pour les petits mineurs

Si cette réforme est saluée par une partie de l’opinion, notamment les défenseurs de l’environnement, elle suscite également des inquiétudes. Certains petits producteurs, jusqu’alors dépendants d’intermédiaires étrangers, craignent un ralentissement brutal de leur activité. Le défi sera donc d’assurer une transition fluide, et de garantir aux artisans miniers un accès équitable aux débouchés légaux.

La réussite de cette initiative dépendra largement de la capacité du Ghana Gold Board à instaurer une régulation efficace, tout en accompagnant les acteurs locaux dans ce changement profond de paradigme.

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