Le gouvernement gabonais s’est dit prêt, ce mercredi, à expulser les Français en situation irrégulière. Il réagit a la reconduite musclée à la frontière de deux de ses ressortissants, le mois dernier. Le sort des deux étudiants, qui ont témoigné dans les médias locaux, a mis tout le pays en émoi.
Notre correspondant à Libreville
Les autorités gabonaises ne décolèrent pas depuis l’expulsion de France manu militari de deux étudiants gabonais, en violation des clauses bilatérales qui régissent les relations diplomatiques entre les deux pays. Les préfectures des villes de Reims et Toulouse où vivaient ces deux étudiants ont justifié les reconduites par leur manque de résultats universitaires. Le ministre de l’Intérieur, André Mba Obame, a déclaré ce mercredi qu’en réponse, le gouvernement gabonais reconduirait à la frontière les Français en situation irrégulière. « Il y a beaucoup de Français en situation irrégulière au Gabon. Ils pourront être reconduits à la frontière si, au cours d’un contrôle de police, ils ne justifient pas de carte de séjour », a-t-il affirmé. Selon le ministre, 5 à 10% des quelque 10.000 Français installés au Gabon ne seraient pas en règle. Et il estime que les Français débarquant sans visa dans le pays pourraient être désormais refoulés.
Le Gabon, a-t-il souligné, va appliquer « la réciprocité » prônée par le ministère des Affaires étrangères. En effet, ce lundi, ce dernier a déclaré dans un communiqué que « rappelant les principes d’égalité et de respect mutuel entre Etats, le gouvernement gabonais compte désormais appliquer la réciprocité. » Il a ajouté que « ces reconduites à la frontière qui ont révolté de nombreux gabonais, convaincus du caractère exceptionnel des relations séculaires entre le Gabon et la France, sont vécues malheureusement après d’autres intervenues depuis 2006 dans des conditions humiliantes en violation flagrante des dispositions de la convention d’établissement de 2002 notamment l’article 5. » Cet article, précise le communiqué, « oblige chacune des parties à accorder sur son territoire un traitement juste et équitable aux biens, droits et intérêts appartenant aux nationaux de l’autre partie, à leur assurer la pleine protection légale et judiciaire et à faire en sorte que l’exercice du droit ainsi reconnu ne soit pas entravé »
Le gouvernement français hors la loi
Par ailleurs, le gouvernement gabonais estime que les autorités françaises ont violé également l’article 8 de la même convention qui indique que « les autorités de l’une des parties contractantes ayant prononcé une mesure de loi allant à l’encontre d’un ressortissant de l’autre partie sont tenues de lui permettre d’avertir immédiatement un conseil, son consulat ou une personne de son choix afin d’assurer la sauvegarde des ses biens et intérêts privés », ce que n’ont pu faire les deux étudiants. A ces violations, explique le communiqué « s’ajoutent les plaintes récurrentes des Gabonais excédés par la survivance des tracasseries et de nombreux refus de visa parfois abusif au consulat général de France à Libreville. »
L’un des étudiants expulsé, Leguy Mbira, a affirmé lundi dernier à la télévision gabonaise avoir été traité avec très peu de considération par la police française et les autorités françaises de façon générale. « J’ai été réveillé à 5 heures du matin, menotté et embarqué sans pouvoir consulter ni mon avocat, ni ma famille, ni mon employeur » a-t-il dit avant de conclure, « on m’a fait trois fouilles au corps alors que j’étais en cellule depuis trois jours. C’est humiliant, très humiliant. »
« Nous sommes très étonnés de constater la manière avec laquelle nos compatriotes sont traités en France. Ici, au Gabon, les Français sont chez eux et vivent en paix » a lancé un fonctionnaire gabonais, Didier Bibang devant notre micro mardi matin. Si le gouvernement gabonais mettait son plan à exécution, ils pourraient l’être beaucoup moins.
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