Un pays invité : l’Egypte, des réalisateurs tunisiens sur les marches à l’ouverture du Festival mercredi dernier, La Source des femmes de Raidhu Radu Mihaileanu, qui se déroule quelque part en Afrique du Nord, sont autant d’hommages à cette partie de l’Afrique. Cette année, ses révolutions et ses cinématographies sont mises à l’honneur sur la Croisette.
Un Tchadien primé l’année dernière, Mahamat-Saleh Haroun, dans le jury de l’édition 2011 du Festival de Cannes, qui s’est ouvert ce mercredi, La Source des femmes de Radu Mihaileanu en compétition, une co-production entre le Maroc et l’Europe qui est un clin d’œil aux femmes d’Afrique du Nord, le film sud-africain Skoonheid, dans la catégorie Un Certain regard, constituent quelques uns des reflets du continent africain qui se fait toujours rare au Festival de Cannes. Pour autant, il n’est jamais vraiment absent. Avec l’Egypte et la Tunisie, terres pionnières du « printemps arabe », les cinémas d’Afrique du Nord sont ainsi à l’honneur cette année. Le Festival de Cannes inaugure le principe d’un pays invité avec l’Egypte. La récente révolution et le cinéma du pays de Youssef Chahine, honoré en 1997 à Cannes où il a présenté une dizaine de films, seront salués le 18 mai prochain. L’œuvre collective Tamantashar Yom (18 jours), projetée en séance spéciale, revient ainsi sur la révolution du 25 janvier. Dix courts métrages de Sherif Arafa, Yousry Nasrallah, Mariam Abou Ouf, Marwan Hamed, Mohamed Aly, Kamla Abou Zikri, Sherif El Bendari, Khaled Marei, Ahmad Abdallah et Ahmad Alaa tournés bénévolement et dans l’urgence racontent la fin du régime d’Hosni Moubarak. Les recettes de ce film iront à « l’organisation de convois d’éducation politique et civiques dans les villages égyptiens ». L’Egypte, « pays invité », c’est aussi la projection dans le cadre de Cannes Classics d’une copie neuve d’Al Bostagui (Le Facteur, 1968) de Hussein Kamal. Au cinéma de la plage, les festivaliers auront l’occasion de voir le 19 mai Le Cri d’une fourmi de Sameh Abdel Aziz (2011).
Pendant le Festival, l’Etat français a choisi, lui, de rendre hommage à la Tunisie, notamment sur le pavillon Les Cinémas du monde. Outre un jury prestigieux présidé par le comédien Robert de Niro et l’équipe du film de Woody Allen, Midnight in Paris (Minuit à Paris), plusieurs cinéastes tunisiens ont monté les marches du Palais des festivals ce mercredi avec le ministre français de la Culture, Frédéric Mitterand, et une compatriote : l’actrice Claudia Cardinale. Le documentaire sur la révolution tunisienne La Khaoufa Baada Al’Yaoum (Plus jamais peur) du cinéaste Mourad Ben Cheikh sera ainsi projeté en première mondiale, le 20 mai, dans le cadre des séances spéciales. Par ailleurs, l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) a rendu hommage ce vendredi à Tahar Chériaa, le fondateur des Journées cinématographiques de Carthage, qui s’est éteint en 2010. Un autre réalisateur tunisien Mohamed Challouf lui a consacré le documentaire Tahar Chériaa, à l’ombre du baobab projeté à Cannes sur le pavillon Les Cinémas du monde inauguré ce jeudi.
Cannes et les « 18 jours » de la révolution égyptienne
D’autres facettes du cinéma africain sont visibles grâce à cette initiative culturelle française, qui réunit l’Institut français, l’OIF, la chaîne francophone TV5 et CFI, opérateur de la coopération internationale de l’audiovisuel public français. Ces deux derniers ont d’ailleurs formalisé ce vendredi leur volonté de collaborer plus étroitement pendant le festival de Cannes. L’Institut français soutient, entre autres, le Béninois Idrissou Mora-Kpaï et son film Indochine, sur les traces d’une mère, documentaire projeté au Marché du film. Tout comme Un film du Marocain Mohamed Achaour et le documentaire Le point de vue du lion réalisé et produit par le musicien sénégalais Didier Awadi. Le cinéaste tunisien Walid Tayaa est également présent à Cannes grâce à l’Institut français. Il travaille actuellement sur Fataria, sommet arabe et son court métrage Vivre est projeté au Short Film Corner. A l’instar de cinq autres courts tunisiens présentés par le Pavillon : Le Fond du Puits de Moez Benhassen, Mouja de Mohamed Ben Attia, La Boue de Amen Allah Gharbi, Linge Sale de Malik Amara et Le virage de Nasreddine Maati. La réalisatrice égyptienne Ayten Amin, dont le projet 69 Messaha Square est en développement, est l’unique femme africaine cinéaste invitée du Pavillon.
Quant à CFI, dans le cadre de son programme Cannes vu par, des journalistes venus d’Algérie, du Cameroun, du Ghana, de la Tunisie et de Zambie couvriront le festival pour les télévisions africaines. Entre autres, l’hommage qui sera rendu ce samedi à la cinéaste Euzhan Palcy lors de la projection à Cannes Classics de la copie restaurée de Rue Cases-Nègres, une œuvre cinématographique majeure de la diaspora africaine. La réalisatrice martiniquaise en profitera pour présenter le court métrage d’un jeune cinéaste handicapé, le Sénégalais Moly Kane, qu’elle a produit. Transmission et pédagogie également pour Les Hommes Libres de Ismäel Ferrouki, une coproduction franco-marocaine qui sera proposée aux lycéens dans le cadre des séances scolaires avec Tahar Rahim. Ce dernier incarne Younes, un jeune immigré algérien, qui se transforme au contact d’un compatriote, Salim Halali (Michael Lonsdale) un chanteur juif en 1942, dans un Paris sous occupation allemande. Enfin, la Croisette verra également le lancement d’Africafilms.tv, nouvelle plateforme de vidéo à la demande dédiée aux images d’Afrique.
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