Dix-huit long métrages sont en compétition officielle de la 22e édition du Festival panafricain du cinéma de Ouagadougou (Fespaco) qui démarre ce samedi à Ouagadougou. Nouvelle ambition de la grand-messe du cinéma africain : l’exporter. Entretien avec le délégué général du Fespaco, Michel Ouedraogo.
La 22e édition du Fespaco, sur le thème « Cinéma africains et marchés », se pare de nouveaux atours en mettant en exergue l’avenir du cinéma africain à travers onze films d’étudiants de quatre écoles de cinéma. De même, la nouvelle section « L’Afrique vue par… » comprend une vingtaine de films, l’expression du regard « sans mépris et sans paternalisme » des cinéastes sur l’Afrique. Près de 80 films sont inscrits au Marché international de la télévision et du cinéma africains (Mica) qui devrait être « plus animé qu’en 2009 », selon Michel Ouedraogo, le délégué général du Fespaco. Un hommage à tous les grands noms du cinéma africain qui ont disparu, notamment l’acteur Sotigui Kouyaté, rythmera le Fespaco 2011. Dans le cadre de la 22 édition du festival, devrait également se tenir les premières Journées cinématographiques de la femme africaine de l’image (du 3 au 7 mars 2010).
Afrik.com : »Cinéma africain et marchés », c’est le thème de la 22e édition du Fespaco. Quelle préoccupation traduit cette thématique ?
Michel Ouedraogo : Nous avons choisi ce thème parce que le cinéma africain après 50 ans doit être exporté à travers le monde. Pour qu’il le soit, il a besoin de réfléchir à ses difficultés car le cinéma africain en a de nombreuses en matière de production et de distribution. Par ailleurs, le marché progresse mais ne profite pas aux réalisateurs africains. La piraterie est un fléau qui fait souffrir le Septième art africain. Autour d’experts, de réalisateurs, nous pourrons dégager des pistes qui permettront au cinéma africain d’aller à la conquête du monde.
Afrik.com : Quelles seront les innovations de cette 22e édition ?
Michel Ouedraogo : Nous en avions déjà introduit lors de la 21e édition, nous allons travailler à les consolider. Néanmoins, au niveau de l’aspect professionnel, nous avons pensé qu’il était bon d’associer à la sélection officielle les films des écoles parce que nous avons constaté qu’il y a de plus en plus d’écoles de cinéma qui se créent. Cette initiative permettra aux étudiants d’aller vers l’excellence et la compétition, de comprendre les réalités de la production et de la réalisation. L’autre innovation, c’est que nous nous sommes recentrés. Nous avons eu l’année dernière 324 films, pour cette édition nous en avons 194. La 21e édition était une année anniversaire, nous avons donc ouvert notre cinématographie pour que la fête soit belle. Aujourd’hui, ce recentrage donne une indication aux réalisateurs africains, celle que nous allons travailler de plus en plus dans la qualité.
Afrik.com : Quels sont les pays qui sont en compétition et quels sont les principaux sujets traités par les films qui les représentent ?
Michel Ouedraogo : Vingt-huit pays africains sont en compétition. Les pays qui reviennent souvent sont ceux où la production est importante, notamment le Maroc, la Tunisie, le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire et le Cameroun. Pour cette édition, des pays comme la Tanzanie, le Mozambique sont représentés, et nous notons le retour de l’Egypte. Quant aux sujets abordés, les films parlent des réalités africaines, de la difficulté de vivre, des problèmes de démocratie, de bonne gouvernance, des questions d’immigration et de celles qui préoccupent le monde rural. Cette thématique diversifiée dénote de la vitalité et du dynamisme du cinéma africain.
Afrik.com : Après 40 ans d’existence, vous pensez que le Fespaco peut porter davantage un plaidoyer politique qui permettra enfin aux dirigeants de s’intéresser davantage au cinéma, qui comme la culture est aussi un des piliers du développement ?
Michel Ouedraogo : Le Fespaco essaie à sa manière de faire passer ce message. Mais il y a d’autres institutions plus fortes comme l’Union africaine, l’Union européenne qui sont en train de le porter. Il faut qu’on comprenne que culture et développement sont liés. Le Burkina, avec l’Union européenne, mène le combat pour que le cinéma soit reconnu comme un pilier du développement. Le Fespaco, en tant qu’éveilleur de conscience, attire l’attention des uns et des autres à travers nos conférences, les contacts que nous avons avec les officiels et à travers nos institutions partenaires. Néanmoins, notre message doit être relayé par des canaux plus officiels dans les différents pays africains.
Afrik.com : Un fonds panafricain pour le cinéma est en train d’être mis en place par l’association des réalisateurs africains, vous êtes bien évidemment associé à cette initiative…
Michel Ouedraogo : Nous sommes associés indirectement en tant qu’organisateur du Fespaco car lorsque ce fonds sera mis en place, nous saurons quelles sont les priorités des acteurs du cinéma africain : créer des salles de cinéma, mettre l’accent sur la production ou encore soutenir les festivals. Car il faut également que ce fonds pense à soutenir le Fespaco et les nombreux festivals en Afrique qui promeuvent notre cinéma, et cela au même titre que les réalisateurs. S’ils produisent et qu’il n’y a pas de salles pour voir les films, ni des festivals, ce sera toujours un éternel recommencement. C’est une dynamique qui doit nous amener à progresser ensemble.
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