Il a seulement neuf ans, mais il a tout d’un grand. Madson Junior a sorti son premier album de rap, Le droit d’espérer, en décembre 2003. Un rêve réalisé grâce au soutien de sa mère adoptive Aïcha et du groupe Yeleen. En dépit des difficultés familiales, Madson Junior est resté fidèle à son objectif, et ça a payé. Mieux, son talent a été reconnu aux Kora, où il a remporté le prix du meilleur espoir masculin.
De Ouagadougou
Madson Junior, 9 ans, Kora 2004 du meilleur espoir masculin. Une révélation pour le monde du rap burkinabé et un rêve qui se concrétise pour l’artiste le (très) jeune artiste hip-hop. S’il n’a pas eu une enfance facile, il n’a jamais lâché son objectif : rapper. Sa persévérance et son talent, couplés au soutien des deux rappeurs du groupe Yeleen, ses idoles, et de sa mère adoptive Aïcha, lui ont permis de sortir son premier album en décembre 2003 et de remporter un précieux Kora.
Rappeur de cœur même dans les difficultés
Madson, de son vrai nom Amadou Ongoïba, revient de loin. « Sa famille fait partie de l’ethnie que nous appelons les Kipsés, mais qui est plus connue sous le nom de Dogons. Les femmes sont des bonnes et les hommes des bûcherons », précise Assétou, chez qui il venait souvent étant plus jeune. Sa famille était, et est toujours, pauvre et Amadou s’est retrouvé très tôt livré à lui-même. « Mais il était débrouillard. Il mendiait parfois », confie Asmaa, l’une des petites sœurs d’Assétou. Déjà, le petit garçon aimait danser, chanter et même parler français. Il dégage un charisme qui le rendait inoubliable. Comme cette étincelle qui illumine ses yeux en amande et son sourire plein de promesses…
Aïcha, séduite par « le talent de communication, l’ouverture d’esprit et l’énergie de Madson », et soucieuse de lui venir en aide, décide de le prendre avec elle pour le scolariser et lancer sa carrière. Car malgré ses problèmes, Amadou n’a jamais perdu de vue ce qu’il voulait devenir : un rappeur. « C’est en voyant les Yeleen que j’ai eu envie de faire du rap », confie Madson. « Nous l’avons connu au CCF (Centre culturel français, ndlr). Il était toujours aux concerts de hip-hop et de rap. Cette musique l’intéressait vraiment. Il côtoyait les rappeurs et avait un réel potentiel. Il faisait des free styles (improvisations, ndlr) qui n’étaient pas parfaits, mais on sentait qu’il avait quelque chose. Alors nous avons décidé de lui donner un coup de main et après il s’est débrouillé tout seul », se souvient Salif Kiekieta, l’un des rappeurs des Yeleen.
Yeleen écrit pour le jeune rappeur
Le groupe participe à la conception des mélodies en collaboration avec l’arrangeur Smokey et écrit cinq chansons de l’opus Le droit d’espérer. Aïcha, qui est aussi le manager de Madson, rédige les textes des trois autres titres. « Je rappe en français, en mooré, en dioula et en anglais, explique avec aplomb et malice Madson. Je parle de ma mère, des enfants et des problèmes que cause l’alcoolisme. » Et en plus, maintenant il va à l’école. « J’y vais toujours, même quand il y a un concert de prévu. C’est quelquefois difficile de gérer, mais je m’en sors pas mal », assure-t-il, masquant tant bien que mal sa timidité.
Comme les professionnels, Madson a même une troupe de huit danseuses, d’une dizaine d’années, repérées par Aïcha lors d’un concours de danse. Le chorégraphe et danseur ivoirien de la compagnie Téguéré, Armand-Pierre Gahé, les a rendues opérationnelles en six mois sur les titres Newsou, Madson est là et Denis show. « Nous avons choisi des petites filles parce que nous avons remarqué que les gens aiment bien voir des enfants sur la scène. Ils s’amusent plus. J’entraîne les filles cinq heures (deux le matin et trois le soir) les mardis, jeudis et vendredis. Je m’occupe aussi de Madson le samedi de 10 heures à midi », souligne-t-il.
Madson ne croyait pas à son succès
La greffe entre le public burkinabé et Madson semble avoir bien pris. A l’ouverture du Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou (Fespaco) le 26 février dernier, les spectateurs du Stade du 4 août, où Madson se produisait, étaient ravis. Ils appréciaient le flow du jeune artiste, qui rappe et bouge comme ses confrères adultes. Et il n’y a pas que les Burkinabés qui aiment la musique du petit dernier de la scène rap africaine. Le jury des Koras a décerné un prix à Madson Junior dans la catégorie meilleur espoir masculin. « J’ai dédié ce prix à tous les enfants du monde. J’ai dit que la guerre n’était pas une bonne chose et que les enfants doivent toujours être nourris et soignés », raconte-il.
Les Yeleen sont fiers. « Au-delà de l’aspect musical, Madson est quelqu’un de cœur. Au départ, il ne croyait pas à son succès et quand il a ramené le Kora au Burkina, il a compris qu’il était réel. Ce prix est une belle victoire, car cela prouve que ses efforts n’ont pas été vains et que nous eu raison de l’aider », assure Salif Kiekieta. Quelle plus belle récompense que la reconnaissance de ses idoles ?