La Chine multiplie les contacts économiques et diplomatiques avec l’Afrique. Une offensive qui n’est pas nouvelle mais qui se renforce, surtout depuis le forum sino-africain d’octobre dernier.
Pékin a accueilli, du 10 au 12 octobre, le forum sino-africain qui avait pour but de relancer la coopération entre la Chine populaire et les pays d’Afrique. Et l’on peut parler aujourd’hui d’une véritable offensive économique et diplomatique de la Chine en Afrique. Pour Yves Ekoué Amaïzo, économiste à l’ONUDI*, la situation n’est pas nouvelle : » La Chine a toujours cherché à pénétrer le continent africain. Elle a une politique différente de celle des grands blocs, moins axée sur la compétitivité. Elle mise sur des relations de longue durée, sur cinquante ou cent ans. Généralement, les relations se font plus en profondeur et ont un côté très public. »
Il poursuit : » Dans les années soixante et soixante-dix, la Chine avait déjà mené une offensive dans certains secteurs : les matériaux de construction, le textile et la pharmacopée. Dans la plupart des usines les investisseurs chinois faisaient 50/50 avec les Etats africains. Mais cette première étape n’a pas donné de résultats probants, notamment à cause d’une corruption galopante. Il a donc fallu subventionner les entreprises en perte de vitesse. La Chine a ensuite continué à tisser des relations avec l’Afrique, mais sans trop s’implanter sur place. »
Stratégie offensive
Une nouvelle stratégie est née il y a une dizaine d’années. Certains Chinois ont appris les langues locales africaines pour une meilleure pénétration du marché. Et beaucoup ont été envoyés dans les pays du continent pour y servir de main-d’oeuvre. Ces mouvements de populations sont à distinguer de la traditionnelle diaspora chinoise en Afrique, et Yves Ekoué Amaïzo explique que » beaucoup ne veulent pas repartir car ils ont une liberté sur le sol africain qu’ils n’ont pas en Chine. »
Aujourd’hui, la Chine est entrée dans une stratégie de compétitivité et cherche des partenaires africains. Ses pays de prédilection sont en priorité les pays anciennement socialistes comme le Mali ou la Guinée. Une délégation d’affaires menée par Wang Xiang Dong, gouverneur de la province de Liaoning, a exprimé début novembre son désir de travailler en partenariat avec des hommes d’affaires Ethiopiens. Lors d’un meeting organisé à la Chambre de Commerce d’Addis Abeba (AACC), Wang Xiang dong a déclaré que » Les hommes d’affaires chinois sont particulièrement intéressés par le fait de travailler en partenariat avec les investisseurs éthiopiens dans les domaines de la chimie, du textile et de l’agro-alimentaire. »
Des questions en suspens
Et lundi dernier, la Chine et la Mauritanie ont cherché à approfondir leurs relations en matière de pêche dans le cadre de la Commission mixte de coopération entre les deux pays. La réunion a notamment examiné les perspectives de » mauritanisation » totale des équipages des navires chinois – qui constituent l’un des plus grands armements de pêche étranger en Mauritanie.
L’intérêt de telles coopérations s’explique, selon Yves Ekoué Amaïzo, par le fait que la Chine est proche de l’Afrique sur le plan du développement. » C’est un très grand pays qui a trouvé en l’Afrique le partenaire idéal, notamment sur le plan de l’agriculture. Il y a beaucoup de choses duplicables en Afrique, comme les usines. Mais on arrive à un paradoxe : si la Chine produit du textile sur place, elle ne pourra plus exporter ses vêtements en Afrique. Que veut-elle exactement ? De plus, pour l’instant, le pouvoir d’achat est faible en Afrique, et les investisseurs peu nombreux, mais si cela change, que fera alors la Chine ? » Si ces questions restent en suspens, on peut tout de même penser que la Chine fera tout pour ménager ce partenaire économique vaste et varié qu’est le continent africain.
*ONUDI : Organisation des Nations Unies pour le Développement et l’Industrie