Amateurs de chocolat, artisans pâtissiers et grands maîtres chocolatiers, préparez-vous à affronter une nouvelle réalité : la hausse des cours du cacao, déjà bien amorcée, semble inexorable. Le marché mondial du cacao est en pleine turbulence, et les récentes décisions prises par les autorités des principaux pays producteurs, le Ghana et la Côte d’Ivoire, risquent d’accentuer la flambée des prix de l’or brun.
Le Ghana, deuxième producteur mondial après la Côte d’Ivoire, a récemment annoncé une augmentation de 45 % du prix des fèves de cacao payé aux producteurs. Derrière cette décision se cache une lutte acharnée contre la contrebande, un fléau qui pèse lourdement sur l’économie du pays. En augmentant les revenus des producteurs, le Ghana Cocoa Board espère les dissuader de vendre leurs fèves sur le marché parallèle, où les prix sont souvent plus élevés. Cette initiative vise à stabiliser l’économie nationale, mais aussi à récompenser les producteurs qui ont été durement touchés par les aléas climatiques et la volatilité des cours mondiaux. Désormais, chaque producteur ghanéen touchera 192 dollars pour un sac de 64 kg de fèves, contre 132 dollars auparavant.
Le Ghana en tête de la révolution des prix
Cette augmentation intervient alors que le cours du cacao atteint des sommets à l’échelle mondiale. À New York, le prix de la tonne de cacao a dépassé les 7 000 dollars, un niveau rarement atteint. Ce bond des prix s’explique principalement par les mauvaises récoltes enregistrées au Ghana et en Côte d’Ivoire, qui représentent ensemble plus de 60 % de la production mondiale de cacao. Le manque à gagner pour les deux pays est considérable, d’autant plus que la contrebande continue de siphonner une partie significative des récoltes. Rien qu’au Ghana, les pertes fiscales sont estimées à 500 millions de dollars pour le seul premier trimestre de 2024.
La décision du Ghana d’augmenter les prix pourrait également avoir des répercussions sur les autres pays producteurs. Au Cameroun, troisième producteur africain, le prix du cacao a légèrement baissé ces dernières semaines, mais reste historiquement élevé. La relative stabilité des prix camerounais, couplée à la hausse au Ghana, risque de créer une pression supplémentaire sur la Côte d’Ivoire. Si les autorités ivoiriennes ne s’alignent pas rapidement sur cette nouvelle dynamique de prix, elles pourraient voir une partie de leurs fèves de cacao s’échapper vers les pays voisins.
Un défi global : entre opportunités et menaces
Les répercussions économiques de cette flambée des prix se font déjà sentir. Pour les producteurs, cela peut représenter une opportunité de moderniser leurs exploitations et d’investir dans des pratiques plus durables. Cependant, la réalité est plus complexe. En Côte d’Ivoire, par exemple, les planteurs continuent de faire face à une baisse des rendements. par exemple, l’an dernier les récoltes ont baissé de 25 % à cause des conditions climatiques défavorables.
Enfin, les prix actuels ne reflètent pas toujours immédiatement les cours internationaux, notamment en Côte d’Ivoire, où les mécanismes de fixation des prix sont concertés entre les régulateurs ghanéens et ivoiriens depuis l’Initiative Cacao Ghana-Côte d’Ivoire, mise en place en 2021. Néanmoins, la récente hausse des prix ghanéens pourrait bien inciter la Côte d’Ivoire à revoir ses tarifs à la hausse pour éviter de pénaliser ses propres producteurs.
Cette situation, marquée par la volatilité des cours mondiaux, des pertes de terres cultivables et une instabilité économique croissante, met en lumière les défis que doit relever l’industrie du cacao. La crise climatique, qui perturbe les récoltes, conjuguée à des tensions socio-économiques, pourrait bien conduire à une hausse durable des prix du chocolat pour les consommateurs du monde entier. Les amateurs de chocolat devront peut-être bientôt se préparer à payer plus cher pour leur douceur préférée.