A l’occasion du 50ème anniversaire de l’Union Africaine ce 25 mai à Addis-Abeba en Ethiopie, le Brésil a fait un geste qui restera à jamais historique. En effet, le gouvernement de Dilma Rousseff, l’actuelle présidente du pays, a décidé d’annuler une dette de 900 millions de dollars à douze pays africains. Un geste symbolique qui arrive à un moment de forte concurrence avec la Chine. Bruno MUXAGATO, professeur de Relations internationales à l’Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines, fait le point pour Afrik.com. Décryptage.
Pas moins de 900 millions de dollars. Une somme colossale à la hauteur des efforts du Brésil dans le processus de normalisation de ses relations avec l’Afrique. En effet, à l’occasion des cérémonies de jubilés d’or de l’Union Africaine (UA) ce 25 mai, la première puissance sud-américaine a fait un geste historique en annulant 900 millions de dollars de la dette bilatérale de 12 pays africains.
Un geste qui ne concerne pas que les pays africains lusophones, qui partagent avec le Brésil des liens culturels historiques. D’autres pays sont également concernés par ce geste dont : la Côte d’Ivoire, le Gabon, la Guinée ainsi que RD Congo.
Quelles sont les véritables motivations de l’annulation de cette dette de la part du Brésil ? A quoi joue le Brésil en annulant la dette de ces 12 pays, dans une période de forte concurrence avec la Chine ? Existe-t-il une différence entre le Brésil de Lula Da Silva et celui de Dilma Rousseff dans leur politique d’ouverture vers le continent africain ? Interrogé par Afrik.com, Bruno MUXAGATO revient sur les dessous de ce geste.
Une dette symbolique et politique
Interrogé sur les motivations du gouvernement brésilien à travers l’annulation de cette dette, Bruno MUXAGATO répond : « Les motivations sont nombreuses. Il y a d’abord une volonté pour le Brésil de continuer les relations sud-sud. Mais Il faut surtout noter le caractère symbolique et politique de ce geste. Le Brésil a une dette symbolique envers l’Afrique en raison de l’esclavage (le Brésil étant le 2ème pays qui compte le plus de noir au monde). Et puis le caractère politique est que le Brésil veut avoir le soutien des pays africains pour obtenir un siège au Conseil de Sécurité de l’ONU ».
Sur la question de savoir à quel jeu joue la première puissance d’Amérique Latine et sur un éventuel bras de fer avec la Chine, le professeur de Relations Internationales rétorque : « Oui. Il y a effectivement ce fait. Mais il convient de souligner que le Brésil utilise des méthodes différentes de celles de la Chine. Le Brésil intervient dans des domaines aussi variés que l’aide au développement, le transfert de technologie, l’agriculture et autres. Mais il n’a pas encore les moyens financiers dont dispose la Chine ».
Refroidissement dans la politique de Dilma Rousseff
Le professeur note un « refroidissement » dans la politique du Brésil envers le continent africain depuis l’arrivée de Dilma Rousseff. Le spécialiste souligne la continuité de cette politique, mais note un manque de volontarisme de la part de l’actuelle présidente. Un manque de volontarisme qui s’explique par le fait que l’actuel gouvernement met plus l’accent sur la politique intérieure, contrairement à son prédécesseur.
La présence de Dilma Rousseff lors du cinquantième anniversaire de l’Union Afrique a été plus que symbolique, marquant ainsi sa troisième visite sur le continent africain depuis son accession au pouvoir janvier 2011.