Au cœur du Sahel, une région marquée par la désertification et les défis climatiques, le Burkina Faso abrite un projet révolutionnaire : le bocage sahélien, ou « wégoubri » en langue mooré. Cette initiative, portée par l’ONG Terre Verte, représente une lueur d’espoir pour la restauration écologique et la survie des populations rurales.
Le bocage sahélien prend racine dans les années 1990 à la Ferme pilote de Guiè, avant d’être repris dans d’autres fermes pilotes à travers le Burkina Faso, comme Filly, Goèma, Barga, et Tougo. Face à une dégradation alarmante des milieux ruraux, ce nouveau concept d’aménagement rural propose une solution holistique, intégrant la sauvegarde de l’environnement dans l’agriculture sahélienne.
Un concept novateur né à Guiè : Trois axes d’intervention
La ferme pilote, encadrée par cinq équipes techniques sous la direction de l’ONG Terre verte, s’appuie sur une approche en trois axes : la recherche appliquée, la formation, et l’appui direct aux paysans. Le but est de créer des périmètres bocagers en copropriété coutumière, où parcelles individuelles et espaces communs coexistent, favorisant un milieu où agriculture, élevage, et biodiversité se renforcent mutuellement.
Le bocage sahélien a permis une augmentation significative des rendements agricoles grâce à la restauration des sols. Les techniques innovantes développées par Terre Verte, comme l’utilisation de diguettes, de mares, et de haies vives, contribuent à maintenir l’eau de pluie, favorisant ainsi une végétalisation efficiente de l’espace rural. Ces méthodes ont prouvé leur efficacité, avec des rendements de sorgho atteignant 22 quintaux par hectare sur des parcelles expérimentales, contre une moyenne régionale de 10 à 12 quintaux.
Un modèle de copropriété coutumière
Le cœur du projet réside dans son modèle de copropriété coutumière, garantissant à la fois la préservation des espaces communs et le respect de la propriété individuelle. Les communs, incluant des pares-feux, des clôtures mixtes, et des mares (bullis), sont essentiels pour préserver la zone des risques d’incendie, du bétail en divagation, et pour gérer efficacement les ressources en eau.
À ce jour, TERRE VERTE a aménagé 2’155 hectares au profit de 721 familles, démontrant ainsi la viabilité et la rentabilité de ce « green new deal » sahélien. Le succès du projet a encouragé sa diffusion à travers le Burkina Faso, avec des sites désormais visibles sur Google Maps, témoignant de l’impact positif du bocage sahélien sur le paysage rural.
Formation et transmission des savoirs
L’Ecole du Bocage de Guiè, créée en 2008, joue un rôle clé dans la transmission des savoirs nécessaires à la mise en œuvre du bocage. Cette formation spécialisée, ouverte aux jeunes motivés par la lutte contre la désertification, couvre un large éventail de compétences, de l’agroécologie à l’élevage écologique, en passant par la pépinière forestière et le reboisement.
Le bocage sahélien, par son approche intégrée et durable, offre une réponse concrète aux défis environnementaux du Sahel. Au-delà de la restauration des terres, ce projet incarne une vision harmonieuse de coexistence entre l’homme et la nature, redessinant l’espace rural en un paysage verdoyant, productif, et résilient.