Le Bénin et le Togo en panne de courant électrique


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Le Bénin et le Togo traversent une grave crise énergétique marquée par des délestages journaliers. Devant être jugulé au plus tard le 16 décembre dernier, le délestage est toujours de mise dans les villes et les campagnes en pleine période des fêtes de fin d’année. Les deux pays ne retrouveront pas l’électricité à plein temps avant le premier trimestre 2007, selon la Communauté électrique du Bénin (CEB).

Les populations souffrent le martyr depuis dix mois. Il n’y a pas de jour où les consommateurs ne soient privés d’énergie pendant des heures. Les vendeurs de produits congelés, les cybercafés, les supermarchés, les boutiques, les ateliers, n’arrivent plus à mener à bien leurs activités. Beaucoup de ménages sont obligés de retourner à l’usage des lampes tempêtes, d’autres ont opté pour les bougies. Des fonds sont mobilisés pour l’achat des générateurs et du gasoil pour palier un temps soit peu au délestage en cette fin d’année. L’énergie ne devrait pas être disponible à plein temps avant le mois de mars. Seuls les jours de fête devraient échapper à la règle.

La crise énergétique affecte sérieusement la vie des entreprises. « La situation perturbe nos activités », se plaint Josias Hounkatin, gérant d’une poissonnerie à Cotonou. « Nous avons besoins à plein temps de l’électricité pour mettre au frais nos poissons, mais nous nous retrouvons de plus en plus avec des poissons pourris », déplore-t-il, avouant n’avoir pas les moyens de s’acheter un groupe électrogène capable de garantir la température nécessaire dans les chambres froides.

Par contre, Assam Ahmed, un restaurateur d’origine libanaise vivant à Lomé, vient de se doter d’un groupe électrogène. « Mon restaurant tourne sans arrêt et je n’ai pas de problème de délestage », affirme-t-il. Depuis quelque temps, des groupes électrogènes inondent les trottoirs de Cotonou à Lomé pour être proposés aux clients qui sont intéressés. Mais seules les familles et les entreprises qui ont de moyens importants parviennent à en acheter à cause de leur prix élevé. Les prix des groupes électrogènes varient entre 500 et 20.000 dollars US selon leur puissance.

Le Bénin et le Togo dépendants de leurs voisins et de la puissance des cours d’eau

La crise énergétique, commencée en mars dernier, avait connu un premier pic, en juin, avant de trouver une solution passagère grâce aux efforts individuels du Bénin et du Togo, et ceux de la CEB, une institution technique commune, basée à Lomé, qui gère l’électricité dans les deux Etats.

Mais la crise s’est accentuée en novembre à cause des problèmes qu’ont rencontré les fournisseurs d’électricité du Ghana et de la Côte d’Ivoire dont dépendent, à 80 pour cent, le Bénin et le Togo. La ‘Volta Région Autority’ (VRA) du Ghana et la Compagnie ivoirienne d’électricité (CIE) ont considérablement réduit leurs livraisons en énergie électrique, passées de 140 mégawatts (MW) par jour en mars, à 80 MW actuellement, selon la CEB. La CEB reçoit cette énergie avant de la distribuer au Togo et au Bénin à travers ces installations techniques. Sur les 100 à 110 MW de courant électrique fournis habituellement au Bénin par la CEB, le pays ne bénéficie actuellement que de 47 MW de 7 heures à 18 heures locales, et de 37 MW de 19 heures à minuit, d’après des informations recueillies par Noël Tadegnon pour le quotidien IPS International.

Selon un communiqué du gouvernement, les raisons principales de cette crise sont d’abord liées à un déficit hydrologique dans l’ensemble des barrages de la sous-région : Nangbéto au Togo, Akossombo au Ghana, Taabo et Kossou en Côte d’Ivoire. De plus, il existe des perturbations dans la fourniture de gaz naturel alimentant les groupes thermiques de production électrique en Côte d’Ivoire.

Selon un document de la CEB, 77% des besoins ont été satisfaits en 2005, avec les importations de la VRA et de la CIE. Avant la crise de 2006, la CEB importait une puissance moyenne de 140 MW de la VRA et de la CIE sur une demande totale d’environ 200 MW. Il ne restait alors qu’à couvrir les 60 MW restants avec les sources propres de la CEB, complétées par celles des sociétés nationales de distribution (la Compagnie énergie électrique du Togo – CEET – et la Société béninoise d’énergie électrique – SBEE) », indique le document. Malheureusement, la sécheresse, qui réduit le niveau d’eau dans les fleuves de la sous-région, est venue aggraver la situation en limitant les capacités de production des barrages hydroélectriques.

Par ailleurs, la situation financière de la CEB n’est pas satisfaisante. Amah Tchamdja, directeur de la communication de l’organisation, dont les propos ont été recueillis par IPS International, a révélé qu’elle devait encore quelque 31,8 millions de dollars à la CIE et la VRA et aux compagnies pétrolières pour l’achat de l’énergie hydroélectrique et du carburant pour ses centrales thermiques. Ensuite, la CEB a fait des prêts bancaires qui s’élèvent à 5,7 millions de dollars.

Les deux Etats secoués par cette crise ont du recourir au délestage électrique pour faire face à la situation. Pour une bonne gestion de ce délestage, des tranches horaires de quatre à six heures de coupure de courant électrique ont été instaurées et réparties dans les différents quartiers et villes des deux pays. Ces coupures atteignent parfois 10 à 14 heures.

Les solutions envisagées par la CEB

Malgré les désagréments et les plaintes des clients, les responsables de la Communauté électrique du Bénin (CEB) rassurent : « Nous explorons déjà des pistes pour faire face à la situation ». La solution pour l’amélioration de la situation réside, selon eux, dans la diversification des sources d’approvisionnement. La CEB s’est engagée, par exemple, sur certains projets, notamment le projet d’interconnexion avec le Nigeria, qui pourrait être opérationnel à partir de mars 2007 ou un peu avant. « Cette interconnexion apportera une disponibilité supplémentaire de puissance de 75MW », souligne le directeur de la C.E.B, dont les propos ont été rapportés par IPS International. Le Togo, le Bénin et le Nigeria ont signé, en juillet 2001 à Cotonou, au Bénin, un contrat « d’achat-vente » d’électricité d’un montant global de 80 millions de dollars. Ce projet permettra de fournir, à partir du Nigeria, une quantité suffisante d’énergie au Bénin et au Togo à moindre coût, indique-t-il.

Une seconde étape sera la transformation des turbines à gaz de la CEB pour utiliser le gaz naturel qui viendra du Nigeria au Bénin et au Togo, avec le projet de Gazoduc de l’Afrique de l’ouest. Ce projet vise à construire un gazoduc de 700 kilomètres, qui acheminera le gaz naturel du Nigeria jusqu’au Ghana, via le Bénin et le Togo, tous les quatre pays étant voisins et membres de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’ouest.

Les dirigeants de la CEB souhaitent également accélérer le projet de réalisation du barrage hydroélectrique d’Adjrarala, au Bénin, situé sur le fleuve Mono, commun au Bénin et au Togo. Ce barrage, dont le coût est estimé à 162 millions de dollars, devrait permettre de réduire la dépendance énergétique des deux pays vis-à-vis de l’extérieur, selon la CEB. L’énergie à plein temps est un grand défi pour le développement réel des deux Etats.

Par Romarick Gbédji

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