« La Journée sans Immigrés » organisée par le collectif « 24 heures sans nous » n’a pas fini de faire des émules. Le 1er mars, les personnes immigrées et leurs descendants sont appelés à cesser toute activité (travail, école, consommation, vente, etc…) en France. Ainsi, elles montreront « par leur absence, la nécessité de leur présence», dans un pays où la politique sur l’immigration ne cesse de se durcir. Interview de Luc Ngwé, membre du collectif.
Afrik.com : Pourquoi avoir rejoint cette action ?
Luc Ngwé : J’ai échangé avec les autres membres via des réseaux internet, comme Facebook. Nous avons eu des échanges intéressants. Chacun de nous avait cette forme d’indignation en lui et voulait faire changer le regard de la société envers les immigrés, et c’est ça qui m’a plu.
Afrik.com : Cela a-t-il produit un déclic dans votre vie ?
Luc Ngwé : Avant, je vivais ma vie de citoyen ordinaire. C’est en discutant que je me suis aperçu qu’il fallait dire stop et créer un mouvement citoyen pour que les immigrés et leurs descendants ne soient plus stigmatisés.
Afrik.com : C’est-à-dire ?
Luc Ngwé : Nous refusons que les immigrés soient perçus comme des délinquants et que leur dignité soit bafouée. Eux aussi font la France, ils participent à la vie sociale, économique et culturelle de ce pays. Nous refusons également le classement des individus en fonction de leur origine. Nous voulons vivre ensemble dans la dignité et le respect.
Un boycott économique
Ils s’appellent Nadir, Nadia, Peggy… et en tant que citoyens français, ils ont décidé de dénoncer « la stigmatisation des immigrés et de leurs descendants ». « Nous voulons vivre ensemble dans la dignité et dans le respect », résume Luc Ngwé, membre du collectif « 24 heures sans nous ». Pour faire entendre leurs voix, ils utilisent une méthode originale et efficace : l’appel au boycott économique. Le 1er mars, immigrés, enfants d’immigrés et citoyens conscients de l’apport de l’immigration en France sont appelés à ne pas consommer et à ne pas travailler.
Cette date n’a pas été choisie au hasard. Elle marque le cinquième anniversaire de l’entrée en vigueur du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA), qui a instauré une immigration « choisie » sur des critères économiques. Cette journée baptisée « 24 heures sans nous » vise à démontrer le rôle de l’immigration dans la bonne marche de la vie économique du pays. Ce concept né aux Etats-Unis en 2006 a inspiré Nadia Lamarkbi, journaliste franco-marocaine et investigatrice de ce collectif qui, après avoir entendu les propos tenus par le ministre français de l’Immigration, Brice Hortefeux, à l’université d’été de l’UMP (parti au pouvoir), a décidé de mener cette action.
Depuis son lancement sur Facebook, cet événement fait couler beaucoup d’encre. Sans doute à cause des élections régionales prévues en France pour fin mars, et du débat de l’identité nationale qui a agité le pays pendant quelques mois.
Comment soutenir la journée sans immigrés
• ne pas travailler
• ne pas consommer
• porter un papillon jaune
• fermer les magasins de 12h à 14h
• se rendre devant les mairies de 12h à 14h
L’action qui a pris une ampleur nationale et européenne devrait être suivie dans 17 villes de l’Hexagone mais aussi en Grèce et en Italie où les logiques de stigmatisation et de rejet de l’autre sont aussi présentes. L’objectif de ce collectif sur le long terme est de fédérer les autres pays européens pour proposer un texte à l’UE visant à modifier sa politique migratoire. « Le 1er mars marque le début de notre action », conclut Nadia Lamarkbi.