La SAPE à l’honneur au Musée Dapper : une consécration?


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arton18273

La SAPE ou la Société des Ambianceurs et des Personnes Elégantes se mue.
Des quolibets douillets frisant le délire aux guéguerres gentilles aux tons carnavalesques, naguère appelées défis à Brazzaville (lieu de proclamation de ce mouvement des Dandys d’aujourd’hui), les Architectes de la SAPE font leur entrée dans la Cour des Grands, j’allais dire des Artistes. Cela, au point de décontenancer tous leurs détracteurs qui, depuis des lustres, ont essayé mécaniquement de vider sur eux leur colère du sous-développement congolais en vain. La roue tourne.

Actuellement, sur la place de Paris, la SAPE est en exposition au Musée Dapper (Paris 16ème). Les Sapeurs y voient une forme de début de reconnaissance de la part d’une ville qui, jusqu’alors, les avait toujours réduits à la portion congrue alors que, par mille et une déclarations d’amour, ils lui ont toujours fait la part belle, et même à l’excès ! avec des slogans comme « Mourir sans voir Paris, c’est un péché » ou « Voir Paris et mourir »…

Eh boum ! il n’y a pas de hasard dans la vie, diraient certains : c’est donc contiguë à l’Ambassade du Congo en France que cette manifestation culturelle et artistique a planté le drapeau des Sapeurs, à l’instar de Brazza, l’explorateur français d’antan, qui alla planter le drapeau français au Congo, donnant ainsi son nom à la capitale du Congo.
Aujourd’hui, c’est en quelque sorte le jumelage culturel Paris-Brazzaville qui signe là ses lettres de créances presque 120 ans après la découverte du Congo par le Français De Brazza. Maintenant, les Sapeurs pensent que Paris va commencer à le leur rendre bien, parce que la SAPE a le vent en poupe.

Il faut reconnaître que la SAPE est partie de très loin : de la rue, site des défilés de mode et d’errance, appelés Djatance (patinage artistique ou numérique, le 21ème siècle oblige), la SAPE entre dans les musées par le haut, de Paris à Londres, en passant par Bamako, au point d’inspirer un grand nom du luxe vestimentaire mondial, à savoir Paul Smith, qui n’a pas hésiter de mettre à l’honneur les Sapeurs congolais lors de son dernier défilé de mode londonien, en consacrant les couleurs flashies, en l’occurrence le rose de la création artistique congolaise venue droit de chez Connivences.
En d’autres termes, la joie de vivre et l’élégance des Sapeurs, de connivence avec les grands couturiers et chausseurs occidentaux, s’exportent bien. Le colonisé décolonisé devenant ainsi l’inspirateur, pour ne pas dire le « colonisateur »… comme certains Sapeurs le soutiennent.
Seulement, on peut se demander contre qui voudraient-ils prendre leur revanche, si ce n’est contre eux-mêmes, c’est-à-dire nous-mêmes les autres ou les autres nous-mêmes ?

Un besoin de reconnaissance

En fait, par-delà toutes les considérations abracadabrantesques ou élogieuses, un constat s’impose. L’heure serait tout bonnement arrivée de passer à une dimension supérieure, diraient certains férus de l’élégance, versés dans l’art de faire chanter les couleurs, dans la bonne ambiance arc-en-ciel des jeux de lumières qui symbolisent les pays tropicaux.

Parce qu’ils sont adeptes de la non-violence et de la civilisation multiculturelle, les défenseurs de la SAPE, devenus depuis Sapelogues (néologisme), voudraient simplement qu’on les laisse vivre, en essayant de les comprendre comme eux essaient de comprendre les autres. Petit à petit, là où ils souffraient d’un vide, c’est-à-dire d’un manque de message fort, qui colmate les brèches à leur profit, les sapeurs veulent quasiment tous aujourd’hui tirer partie de leur passion, au fur et à mesure que leur message qui était jusque là cacophonique prend du sens, relayé par l’expression des stylistes, artistes, documentaristes et écrivains…

Le besoin d’épanouissement et de reconnaissance se fait très fort chez les sapeurs. Après Sapologie, ACADEMIE de la SAPE, les ALLURES, illustrées par des documentaires ou albums de musique, ils s’apprêtent à proposer l’INTEGRATION dans la SAPE, avec en prime l’Hymne International de la SAPE, comme cela peut être vu à partir d’un site dédié à la SAPE…

Restant tout de même un des plus grands paradoxes de notre temps, la SAPE ne changerait peut-être pas d’avis ses détracteurs, mais s’imposera désormais dans le débat, obligeant les uns et les autres à penser et à repenser la SAPE, en partant de l’Afrique cette fois-ci. Elle vient d’entrer dans la mondialisation. Peut-être, pour tenter de proposer une autre modernité, qui consiste à accepter l’autre et ce qu’il propose pour essayer de vivre en harmonie avec soi-même, ou simplement de vivre ensemble dans la non-violence…

Qui sait s’il n’y aura pas un Sapeur Prix Nobel de la Paix, les années à venir ? surtout qu’il y en a déjà parmi eux qui ambitionnent voir leur statue à la fois dans le Musée Grévin et le Mémorial de Brazzaville…

Un rêve, même fou, est toujours permis.

Affaire à suivre.

 Consulter le Blog d’Aimé Eyengué

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