Le gouvernement de la République Démocratique du Congo (RDC) a annoncé la fin de toute coopération avec le Rwanda. Une décision qui intervient plus de deux ans après que Kinshasa a expulsé l’ambassadeur rwandais en raison des tensions croissantes liées au soutien présumé du Rwanda aux rebelles du M23. Les autorités congolaises ont rappelé tous leurs diplomates en poste à Kigali, mettant un terme à toute forme de collaboration.
Une rupture dans les relations diplomatiques
La ministre congolaise des Affaires étrangères, Marie Tumba Nzeza, a adressé, ce 25 janvier 2025, une note verbale au gouvernement rwandais, demandant la cessation immédiate des activités diplomatiques et consulaires de l’Ambassade du Rwanda à Kinshasa. Selon cette note, les autorités rwandaises ont 48 heures pour tirer toutes les conséquences de cette décision.
La RDC reproche à son voisin rwandais de soutenir activement les rebelles du M23, ce que Kigali a toujours démenti. La tension entre les deux pays n’a cessé d’augmenter depuis que la guerre a éclaté entre les forces congolaises et les rebelles du M23 dans la région de l’Est de la RDC, en particulier dans la province du Nord-Kivu.
Le M23 et les accusations de soutien rwandais
Le M23, un groupe rebelle principalement composé de Tutsi congolais, a été accusé par le gouvernement congolais d’avoir reçu l’appui militaire du Rwanda dans ses offensives contre l’armée congolaise. Le mouvement exige des négociations directes avec le gouvernement de Kinshasa, l’accusant de ne pas respecter les accords de paix signés en 2013. Depuis le début des combats en 2022, le M23 a pris le contrôle de plusieurs localités stratégiques dans le Nord-Kivu, notamment dans les environs de la ville de Goma.
L’escalade des violences a conduit à la mort de plusieurs soldats, notamment six casques bleus et sept soldats sud-africains, membres des forces de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC), tués lors des affrontements avec le M23. Le général-major Peter Cirimwami, gouverneur militaire du Nord-Kivu, a été tué lors d’une inspection à la ligne de front, abattu, selon l’armée congolaise, par des tireurs d’élite rwandais.
Réaction internationale face à la détérioration sécuritaire
Face à la détérioration de la situation sécuritaire, l’Organisation des Nations Unies (ONU) a annoncé le retrait temporaire de son personnel non essentiel de Goma. Cette mesure vise à protéger les employés de l’ONU tout en maintenant les opérations humanitaires essentielles. La situation humanitaire est alarmante, avec plus de 600 000 déplacés ajoutés aux millions de personnes déjà touchées par les violences, selon le bureau de la coordination des affaires humanitaires de l’ONU.
Le Conseil de sécurité des Nations Unies a convoqué une réunion d’urgence pour discuter des mesures à prendre en réponse à la crise en RDC. De son côté, l’Union africaine (UA) a lancé un appel à la cessation immédiate des hostilités entre les forces congolaises et les rebelles du M23. L’UA a souligné la nécessité d’une solution pacifique à cette crise régionale. Vendredi, les ambassades des États-Unis et de la France, de même que le ministère britannique des Affaires étrangères, ont demandé à leurs citoyens de quitter la ville de Goma tant que les voies de transport demeurent ouvertes.
L’argumentation rwandaise : une menace sécuritaire
Le gouvernement rwandais a rejeté les accusations portées contre lui. Lors d’une interview accordée à la chaîne Africa 24, le ministre rwandais des Affaires étrangères, Olivier Jean Patrick Nduhungirehe, a expliqué que la question du M23 représente une menace sécuritaire pour son pays. Selon lui, la RDC, en assimilant systématiquement le M23 au Rwanda, a constitué une coalition militaire contre son pays.
Celle-ci comprenant des soldats burundais, des mercenaires européens, des miliciens Wazalendo et des membres des FDLR (Forces Démocratiques de Libération du Rwanda), un groupe accusé de génocide. Le ministre a ajouté que cette coalition serait animée par une idéologie génocidaire, soutenue par la volonté de certains acteurs politiques congolais, notamment le Président Félix Tshisekedi, de renverser le gouvernement rwandais.
Aux origines du M23
Le M23, formé en mai 2012, est né d’une rébellion menée par des militaires congolais ayant déserté les forces armées nationales. Le groupe avait alors pris les armes en raison de frustrations liées à la mise en œuvre des accords de paix conclus après la rébellion du CNDP (Congrès National pour la Défense du Peuple). Après plusieurs années de relative calme, les tensions ont ressurgi en 2022, lorsque le M23 a relancé ses offensives, déclenchant une nouvelle crise avec des accusations de soutien de la part du Rwanda.
Le M23 continue de revendiquer un dialogue direct avec le gouvernement congolais pour résoudre les différends concernant les accords de paix de 2013. Toutefois, Kinshasa considère le groupe comme une menace à la souveraineté nationale et un agent de déstabilisation, soutenu par le Rwanda. Pour l’heure, Kigali n’a pas réagi officiellement à la décision de la RDC, mais l’avenir des relations entre les deux pays semble désormais marqué par l’impasse diplomatique.