La Quinzaine de l’Enfant Africain sensibilise aux problèmes de l’éducation


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Ce 16 juin, Journée Internationale de l’Enfant Africain (en hommage aux adolescents sud-africains massacrés à Soweto en 1976), s’achève la Quinzaine de l’Enfant Africain. Un événement organisé, en région parisienne, par IDAY-France, un collectif d’associations qui agit pour améliorer l’éducation des jeunes en Afrique.

Le Collectif IDAY France (International Day of African Youth) rassemble une dizaine d’associations de la Région Ile-de-France qui ont décidé d’appuyer l’avènement du deuxième objectif du millénaire : l’Education Pour Tous (EPT) en 2015. Une série d’activités est organisée par ce collectif, depuis trois ans, autour du concept « Quinzaine de l’Enfant Africain » afin de sensibiliser le grand public aux problèmes de l’éducation des jeunes africains. Le coordinateur d’IDAY France et président de l’association ANI (Afrique & Nouvelles Interdépendances) Romuald Dzomo Nkongo, franco-camerounais de 36 ans, nous a accordé une interview.

Afrik.com : Mr Dzomo Nkongo, vous êtes le coordinateur d’IDAY France. A ce titre, pouvez-vous nous décrire la problématique de l’éducation en Afrique?

Romuald Dzomo Nkongo :
L’éducation en Afrique subsaharienne est en retard par rapport à la plupart des régions en développement pour une raison de pauvreté endémique. Sans une croissance économique importante, les gouvernements se voient obligés de faire des arbitrages qui sacrifient l’éducation.
Aujourd’hui, en Afrique, un peu plus de la moitié des adultes est alphabétisée et 60% des enfants scolarisés. En 1982, selon les données de la Banque mondiale, le taux brut de scolarisation pour l’éducation primaire dans toute l’Afrique subsaharienne avait progressivement atteint 85 %. Certains pays, notamment l’Angola, le Botswana, le Cap-Vert, le Kenya, le Mozambique, le Nigéria et la Tanzanie, étaient même presque parvenus à l’éducation primaire pour tous au début des années 1980. Le reste de la décennie s’est cependant caractérisé par de profonds retours en arrière. La majeure partie de l’Afrique a été touchée par la crise économique, et l’application des programmes d’ajustement structurel a d’abord touché des secteurs comme l’éducation.
Exprimées en pourcentage du produit national brut (PNB), les dépenses publiques pour l’éducation en Afrique subsaharienne ont baissé de 3,8 % en 1980 à 3,1 % en 1988. Depuis, les gouvernements nationaux ont promis de redoubler d’efforts pour améliorer le niveau de l’enseignement dans les pays en développement en particulier en ce qui concerne l’éducation de base. Il y a une petite amélioration, mais il faut redoubler d’efforts. C’est pourquoi il faut se mobiliser autour de deux des Objectifs du millénaire. L’éducation permet de choisir la vie que l’on veut mener, et de s’épanouir tant sur le plan professionnel que personnel. Aujourd’hui ce sont 115 millions d’enfants en âge d’ être scolarisés dans le primaire, qui ne sont pas scolarisés et qui se voient refuser l’exercice d’un droit fondamental. Il s’agit essentiellement d’enfants de familles pauvres, dont la mère, le plus souvent, n’est pas instruite. Ce gaspillage de potentiels ne touche pas seulement les garçons, mais également les filles dont il est reconnu que le niveau d’ éducation impacte l’ensemble de la société, sur le plan social et économique.

Afrik.com : Quels sont les objectifs de cette quinzaine ?

Romuald Dzomo Nkongo :
En tant que Président d’Afrique & Nouvelles Interdépendances (ANI), je pilote depuis trois ans un collectif d’associations de la Région Ile de France dénommé « collectif IDAY » acronyme de « International Day of Youth » qui organise depuis trois ans la quinzaine de l’éducation en Afrique.
Nous le faisons au même moment que plusieurs associations en Europe et en Afrique. Il s’agit en fait de commémorer le 16 juin, date du massacre des enfants de Soweto en Afrique du Sud. Nous en profitons bien évidemment pour rappeler aux pays riches leurs engagements en faveur de l’éducation dans le cadre des objectifs du millénaire.
Cette année nous avons eu trois temps forts.
En ouverture, un plaidoyer lors de la journée inaugurale le 2 juin dans les locaux de l’école Sciences Po, une manifestation populaire au jardin d’Eole et des manifestations dans
les arrondissements du 12e, du 14e, du 18e de Paris 14e. Enfin une
grande manifestation à Eragny sur Oise dans le Val d’Oise le 13 juin, suivies de nombreuses manifestations jusqu’au 16 juin 2009.

Afrik.com : Quelles sont les spécificités d’IDAY France par rapport à IDAY international?

Romuald Dzomo Nkongo :
Depuis trois ans, nous mettons un accent particulier à associer les politiques, les pratiques et les acteurs des enjeux éducatifs en Afrique.
C’est ainsi que Mme Rama Yade, Secrétaire d’Etat aux Affaires Étrangères et aux Droits de l’Homme, nous a fait l’honneur de représenter les politiques françaises.
Mme Adiza Hima est venue spécialement du Sénégal pour représenter la Conférence des Ministres de l’Education Nationale (CONFEMEN). Grâce à « Aide & actions », nous avons reçu cette année à Sciences Po des acteurs particulièrement qualifiés pour présenter les actions de terrain. Le thème de cette quinzaine portant sur « La décentralisation et le financement de l’éducation en Afrique ». Enfin, nous avons aussi pu recueillir les propos de spécialistes de l’UNESCO, de l’IRD et de diplomates africains en poste à Paris.

Afrik.com : Quel bilan faites-vous de vos activités, depuis la création d’IDAY, en France et en Afrique?

Romuald Dzomo Nkongo :
Le bilan est largement positif. Mobiliser les associations de la diaspora dans divers pays
européens, attirer l’attention de la société civile africaine autour d’un même et unique objectif, l’enfant africain, est une étape nécessaire et un succès en soit, même si ce n’est qu’un préalable à nos actions futures. C’est un travail de longue haleine et nous mesurons à quel point il est incontournable de mettre en œuvre une dynamique afin de rappeler aux Etats de part et d’autres leurs promesses. Avons-nous pour autant changé la situation éducative des enfants en Afrique ? Dans l’absolu: non! En réalité, nos pouvoirs en tant que diaspora sont limités. Non seulement il ne nous appartient pas de nous subsister aux gouvernements, mais nous n’en avons pas les prérogatives. En revanche, notre action se situe au niveau du soutien, voir de l’émergence d’appuis ponctuels, de nos actions de solidarité. Encore une fois, il nous revient en tant que force civile de pousser les Etats à réaliser et entreprendre d‘avantage en matière d’éducation. C’est donc dans ce cadre, que nous souhaitons faire de « La Quinzaine de l’Enfant Africain » un moment incontournable dans l’année, car appuyer un programme d’éducation sur le continent, c’est redonner du rêve aux jeunes africains.

Afrik.com : Quelles sont les difficultés que vous rencontrez et quelles actions
mettez vous en place pour y pallier?

Romuald Dzomo Nkongo :
Les difficultés que nous rencontrons sont celles liées aux initiatives portées par de petites et jeunes associations.
Très concrètement, nous rencontrons une difficulté à mobiliser les bailleurs de fond.
Néanmoins, le Ministère des Affaires Etrangères et Européennes l’a fait pendant deux ans, ainsi que l’ACSE qui reste à nos côtés cette année.
Nous bénéficions du soutien de la RATP pour nos campagnes d’affichage et de la Mairie du 18e. Parmi les associations membres du collectif, la plupart ne sont pas professionnelles. ANI a donc associé un projet au collectif de Sciences Po qui nous a beaucoup soutenu. Ainsi, nous avons bénéficié des services de nombreux volontaires civiles.

Afrik.com : Quelle est la part des difficultés conjoncturelles, structurelles, culturelles?

Romuald Dzomo Nkongo :
Qu’ils s’agisse de parler aux français de l’éducation en Afrique alors qu’ici, nous vivons une crise économique,
ou qu’il faille interpeler les gouvernements africains autour d’un enjeu, l’éducation, sur lequel ils peuvent difficilement communiquer n’est pas toujours aisé.
Ensuite selon les pays et les zones, rurales ou urbaines, les réalités ne sont pas les mêmes. Enfin, Il faut ajouter à cela certaines croyances sur l’éducation des femmes, et vous vous rendez rapidement compte des difficultés que nous rencontrons sur le terrain.

Afrik.com : Comment concrètement venir en appui ou se joindre à IDAY France?

Romuald Dzomo Nkongo :
Appuyer la Quinzaine de l’éducation de l’enfant en Afrique, c’est d’abord être une personne physique ou morale intéressée par les enjeux de développement en Afrique. Nous avons à cœur de soutenir et de fédérer ceux et celles qui, en personne, en association ou lors d’actions concrètes apportent un appui spécifique aux jeunesses rurales et urbaines.
Individus, associations, et futures entreprises partenaires peuvent venir nous rencontrer. Nous avons de nombreux défis à relever en 2010, et cinq années, d’ici 2015, pour pousser les autorités africaines et internationales à tenir leurs promesses et leurs engagements.

 Le site du Collectif IDAY France

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