Côte d’Ivoire, la police parallèle de Laurent Gbagbo


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Laurent Gbagbo
Laurent Gbagbo

Le mouvement ivoirien des droits de l’Homme (MIDH) confirme et signe : les autorités d’Abidjan disposent d’une police parallèle, située au siège même de la présidence. Cette police serait à l’origine d’enlèvements et de tortures sur la personne de six Ivoiriens, civils et militaires. Pour Me Ibrahima Doumbia, vice-président du MIDH, principal enquêteur, « cette police extrajudiciaire » est toujours effective. Interview.

Le mouvement ivoirien des droits de l’Homme dénonce l’existence d’une police parallèle qui pratique enlèvements, séquestrations et torture en toute impunité.

Selon le MIDH, un Centre de coordination et d’exploitation de renseignements a été créé au sein de la présidence de Houphouët Boigny en 1984. Ce « service » existe toujours. Il ne s’appelle plus coordination mais cellule. Selon Me Ibrahima, il serait à l’initiative de tous les enlèvements commis sous Laurent Gbagbo.

Afrik : Vous dites dans votre rapport que Laurent Gbagbo dispose d’une police parallèle. Quels sont les éléments qui vous permettent de porter d’aussi graves accusations ?

Ibrahima Doumbia : Notre enquête est sérieuse. Nous l’avons menée avec patience et droiture. Au départ, il y avait des personnes qui ont été torturées au siège de la « Cellule de coordination et d’exploitation de renseignements » (CCER) qui est situé à la présidence.

Ces personnes avaient tellement peur qu’elles avaient refusé de consigner par écrit leurs déclarations. Nous avons donc décidé, après enquête et témoignages concordants, de nous adresser par une lettre ouverte au chef de l’Etat.

Quelle a été sa réaction ?

Silence complet ! Cependant, cette lettre ouverte, publiée par la presse, a eu le mérite de déclencher une dynamique.

Il y a eu six civils et militaires, enlevés, séquestrés et battus « au siège » entre 31 janvier et 9 avril 2001, qui ont voulu témoigner par écrit. Il leur a fallu un courage immense. Par ailleurs, il y a des militaires excédés par ces méthodes radicales qui nous ont apporté leur soutien.

Vous voulez dire que certaines de vos informations proviennent de l’intérieur même de cette cellule ?

Il y a des militaires et des paramilitaires qui ne supportent pas ces agissements. Car il faut savoir que ces agents procèdent à des perquisitions et des arrestations arbitraires. Et malheureusement, cela finit souvent avec la torture.

De combien de personnes est composée cette police ?

D’après nos informations, le « service » comme l’appellent les militaires, est divisé en deux branches. La section « renseignement » a un effectif de 80 personnes, et celle de « radio » compte 20 personnes.

Comment ont réagi les autorités ivoiriennes à votre enquête ?

Le président observe le mutisme le plus complet mais le ministre de la Défense reconnaît l’existence de ce service. Il reconnaît aussi que ce service ne devrait pas faire de police extrajudiciaire. Mais il a utilisé un euphémisme en qualifiant ces séquestrations et enlèvements de « bavures ». Des bavures qui se répètent, j’appelle ça une méthode de travail.

La presse ivoirienne s’est déchaînée contre vous…

Elle était très haineuse avec notre président Epiphane Zoro, car il est aussi le juge qui avait reconnu la nationalité ivoirienne de Alassane Ouattara. On nous accuse d’être une section du RDR (parti de Ouattara, ndlr) et de tous les maux, mais on se garde bien d’attaquer le fond du problème, à savoir l’existence de cette police parallèle.

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