Le club Africagora organise samedi 1er juin au Sénat, à Paris, un colloque sur » Les Noirs de France dans l’action politique » dans le cadre des élections législatives 2002. Une cinquantaine d’élus et de responsables politiques noirs sont attendus pour cette journée de débat. Interview de Dogad Dogoui, président d’Africagora.
Le Sénat accueille samedi 1er juin à Paris le club Africagora pour son colloque sur » Les Noirs de France dans l’action politique « . A l’heure des élections législatives, une cinquantaine d’élus et de responsables politiques noirs sont invités aux débats. S’il existe plusieurs communautés noires dans l’hexagone, Dogad Dogoui, président d’Africagora, estime qu’il est du devoir de chacun d’oeuvrer pour la cause. Très critique quant à une éventuelle parité ethnique, il juge que l’institutionnalisation de la mixité serait un échec de l’intégration en France.
Afrik : Avec la diversité des Noirs en France, peut-on parler d’une véritable communauté ?
Dogad Dogoui : Nous préférons parler de communautés noires, au pluriel. Il existe des similarités d’organisation, de valeurs et de lien social dans toutes les cultures d’origine africaine. Les Africains de la Caraïbe, eux aussi, ont conservé des éléments de la culture africaine de leurs ancêtres. En France, tous les Noirs ont en commun la culture africaine.
Afrik : Ce qui lie les communautés noires ne serait-il pas uniquement le rejet de leurs membres par la simple couleur de leur peau ? La communauté noire dans son ensemble n’est-elle pas une communauté de circonstance?
Dogad Dogoui : Il est vrai que les combats pour la reconnaissance de nos cultures, de nos identités et de nos spécificités au sein de la république permettent de se retrouver dans un même bateau. Non, les communautés noires ne sont pas des communautés de circonstances. Même si chaque composante de ces communautés a son approche de la place des Noirs dans la société.
Afrik : Que signifie militer pour la cause noire ?
Dogad Dogoui : Africagora s’est engagé à oeuvrer auprès des décideurs politiques, économiques et des centres d’influence de notre pays pour promouvoir les compétences originaires d’Afrique noire, de la Caraïbe et de l’Océan Indien. Notre objectif est de faire avancer la mixité de la nation et de la république française : permettre à tous les Noirs qui en ont la capacité et les compétences d’assumer leur place entière dans les rouages de l’Etat.
Afrik : Dans quelle mesure un Noir peut-il défendre la cause des Noirs dans un parti politique ?
Dogad Dogoui : S’il n’oublie pas qu’il est représentant des communautés noires, composantes des minorités visibles dans ce pays, un militant ou un responsable noir dans un parti politique peut « négocier » une meilleure place pour ses semblables au sein de sa formation et s’investir dans les commissions de travail et les prises de positions de son parti, en faveur de l’ascension sociale des Noirs de France.
Afrik : Que pensez-vous des Noirs présents dans les partis d’extrême droite?
Dogad Dogoui : Comme tous les citoyens, ils ont la liberté de penser et de s’engager dans un débat démocratique. Cependant, les valeurs de la république ne nous semblent pas être véhiculées par les partis d’extrême droite. Les Noirs qui militent à l’extrême droite se mettent hors du jeu de notre cause et de notre combat pour une reconnaissance de nos communautés.
Afrik : Pensez-vous qu’une personne de couleur occupant de hautes fonctions se doit forcément d’aider la communauté?
Dogad Dogoui : De quelle couleur parlez-vous ? blanche, noire, jaune ? Si vous faites allusion aux non-Blancs ou aux minorités visibles, je pense que nos élites doivent s’engager et aider les communautés dont elles sont issues. Exactement comme le font les élites issues de toutes les communautés en France : Bretons, Aveyronnais, Corses, Berrichons, Musulmans, Juifs, Asiatiques, Arabes, Enarques, Normaliens, …
Afrik : Que pensez-vous de la parité ethnique?
Dogad Dogoui : Comme la parité sexuelle, son avènement au sein de la république française traduirait l’échec de l’intégration en France. Mieux, la parité ethnique officialiserait le manque d’une véritable politique d’intégration adaptée aux derniers flux des migrations : communautés noires d’Afrique et d’outremer, Maghrébins, Asiatiques. Cependant, par leur blocage de l’ascension sociale, de l’intégration économique, politique et culturelle des minorités visibles, et par leur refus obstiné de faire place à toutes les diversité et mixités (femmes, jeunes, non-Blancs, société civiles) via des actes concrets, les partis politiques et les élus de la Nation porteraient une lourde responsabilité à l’émergence de partis politiques communautaires. Il y a urgence à devancer l’inéluctable mixité de la nation et à l’appliquer dans l’Etat.
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