De jeunes africains de Lyon, en France, ont eu l’idée originale de créer » l’Association des palabreurs « . Camille Talkeu, anthropologue camerounais et président fondateur, estime que la palabre est un art social » bien de chez nous » qui gagne à être connu au-delà des seules frontières africaines. Rencontre.
Créée en septembre 2000, » l’Association des palabreurs « , regroupe chaque mois dans un café lyonnais, en France, des jeunes de tous horizons autour de sujets d’actualité et culturels. Camille Talkeu, président fondateur et anthropologue camerounais aimerait importer la tradition africaine de la palabre – débat réglé entre les hommes d’un village sur un sujet intéressant la communauté, déf. Dictionnaire Hachette 2000 – en Europe et aux Etats-Unis.
Afrik : Quel est le but de l’Association des palabreurs ?
Camille Talkeu : Le but de notre Association est de faire comprendre au monde que la palabre est avant tout un espace de médiation qui permet aux gens de s’exprimer et de régler des conflits. D’ailleurs dans plusieurs ambassades et chancelleries africaines, il n’est pas rare de voir les politiques autour d’une table, qui palabrent tout en mâchant leur kola. C’est donc une tradition africaine qui peut également servir aux non-Africains.
Afrik : Comment vous est venue l’idée d’une telle association ?
C.T : Nous avons remarqué qu’il existait à Lyon toutes sortes d’associations et de groupes de discussion à l’instar du café philosophique, du café politique ou encore du café géographique qui sont tous des lieux de discussion. Nous nous sommes alors dit pourquoi pas une association de palabre pour les Africains ? C’est ainsi que nous sommes arrivés à la création de notre association.
Afrik : Comment fonctionne l’association ?
C.T : Nous nous réunissons le dernier dimanche de chaque mois au café Douala City à Lyon et nous avons à chaque séance un thème bien défini. Le mois dernier, par exemple, nous avons palabré autour de l’oeuvre de Cheikh Anta Diop à qui nous avons rendu hommage. Tout comme nous avons eu à traiter des sujets sur Senghor, Aimé Césaire, la traite négrière…enfin nous sommes ouverts à tous sujets susceptibles de développer notre culture générale. Parallèlement, nous organisons aussi des colloques et séminaires pour faire connaître la palabre dans la région lyonnaise.
Afrik : Comment fonctionne financièrement votre association?
C.T : Nous sommes encore jeunes. De ce fait, nous avons une cotisation mensuelle d’une modique somme de 50 Francs pour les membres actifs de l’Association. Nous commençons à nous faire connaître petit à petit. Nous avons été voir le maire pour lui parler de notre action. Il a été très réceptif et enthousiaste et ne manque pas de parler de nous autour de lui, ce qui fait que nous sommes invités un peu partout.
Afrik.com : Quels sont vos projets ?
C.T : Nous comptons organiser » la grande palabre » l’été prochain à laquelle nous allons convier des écrivains d’Afrique et d’ailleurs, des journalistes et peut être même des politiques. Nous sommes en train de généraliser notre action et dans ce sens, nous avons pris contact avec d’autres Africains dans les autres régions de France, de Belgique ou encore des Etats Unis. Nous avons d’ailleurs pu approcher un maire américain de passage à Lyon qui a été séduit par notre initiative. Nous pensons nous rendre sur place d’ici peu pour faire connaître la palabre en Amérique.
Pour en savoir plus sur la palabre : Commandez le livre de Jean-Godefroy Bidima : » La Palabre :Une juridiction de la parole « .Ed Michalon