Les Etats-Unis ont enfin accepté la proposition des Nations Unies demandant l’envoi de Casques bleus en Côte d’Ivoire. Les efforts du gouvernement ivoirien pour résoudre la crise qui secoue le pays depuis 2002 pourraient ne pas y être étrangers. Si le Congrès américain accepte de participer au financement de la mission de paix, quelque 5 000 hommes pourraient être prochainement dépêchés sur le territoire ivoirien.
Ils ont enfin dit « yes ». Après avoir repoussé plusieurs fois le plan d’envoi de Casques bleus en Côte d’Ivoire, les Américains ont finalement levé leur veto. Il aura fallu plusieurs semaines de négociations pour arriver à ce résultat. Si le Congrès américain accepte le plan du secrétaire général de l’Onu, Kofi Annan, un contingent de quelque 5 000 hommes devrait être envoyé dans le pays ouest-africain d’ici deux ou trois mois. Leur objectif, stabiliser le pays, en crise depuis le 19 septembre 2002.
Veto américain
Novembre 2003. Parce que la situation sur le terrain ne s’améliore pas, le Président ivoirien Laurent Gbagbo demande au Conseil de sécurité de l’Onu de l’aide pour rétablir l’ordre sur son territoire. Il souhaite un renforcement de la mission des Nations Unies dans le pays (Minuci) et le déploiement d’une force internationale de maintien de la paix. Une demande que supportait tous les membres du Conseil (France, Russie, Chine, Royaume-Uni) excepté les Etats-Unis. Impossible de mettre en place l’opération sans eux : une décision ne pouvant être validée qu’à l’unanimité. D’autant plus qu’ils fournissent 27% des budgets alloués aux forces de paix onusiennes.
Les Etats-Unis émettaient deux principales réserves à l’envoi de Casques bleus en Côte d’Ivoire. Certains avancent que l’administration américaine ne voulait pas soutenir une initiative de la France, dont 4 000 hommes, réunis au sein de l’opération Licorne, surveillent avec quelque mille soldats de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cedeao) la situation du pays. Washington entretient, en effet, des relations plutôt froides avec Paris depuis que la France lui a refusé son soutien dans sa guerre contre l’Irak. Le veto américain pourrait donc être assimilé à un règlement de compte, destiné à laisser l’Hexagone dans l’embarras financier causé par l’entretien des soldats français postés en Côte d’Ivoire. D’autres estiment que, s’ils ne comptent pas envoyer leurs hommes sur le terrain, les Américains ne voulaient pas s’investir financièrement sans savoir si les autorités ivoiriennes se donnaient réellement les moyens de revenir à la paix. Et donc qu’elles appliquaient les accords de paix de Linas-Marcoussis (France) du 24 janvier 2003.
Le bon élève récompensé
Des raisons qui expliqueraient pourquoi, le 4 février dernier, les Etats-Unis se sont opposés à la proposition du Conseil de Sécurité. Mais le secrétaire général de l’Onu, Kofi Annan, n’avait pas dit son dernier mot. Selon le quotidien ivoirien L’Inter, peu après cet échec, il aurait contacté Laurent Gbagbo pour lui demander de mettre de l’eau dans son vin pour ne pas donner aux Américains une autre raison de refuser le projet de l’institution internationale. Pour que l’envoi de Casques bleus puisse être voté fin février, Kofi Annan aurait prié le chef d’Etat ouest-africain de « renoncer à son projet de référendum sur le code foncier et le code de nationalité », qui aurait pu effaroucher les Américains.
Les récents efforts consentis par Laurent Gbagbo, qui lui ont notamment permis de se rapprocher de Paris, avec qui les relations n’étaient pas au beau fixe, semblent avoir payé. L’ambassadeur américain à l’Onu, John Negroponte, a annoncé, mardi, que les Etats-Unis ne s’opposaient plus à l’envoi de soldats en Côte d’Ivoire. Reste à attendre le feu vert du Congrès, à qui la Maison Blanche a demandé, la semaine dernière, de participer au financement de cette opération.
Assurer un climat pacifique
Le 27 février prochain, date d’expiration du mandat de la Minuci et des contingents français et africains, le Conseil de sécurité devrait approuver l’envoi d’un premier contingent de 5 000 soldats. Le secrétaire général de l’Onu avait estimé que 6 240 hommes seraient nécessaires, Laurent Gbagbo 10 000. Ils auront notamment pour tâche de maintenir la paix, en utilisant la force le cas échéant. Ils aideront également le gouvernement de réconciliation nationale à désarmer, démobiliser et réinsérer les anciens combattants. Une mission qu’ils mèneront conjointement avec les soldats français de l’opération Licorne, qui resteront en poste, et ceux de la Cedeao qui devraient passer sous mandat onusien. Le Conseil pourrait demander ultérieurement l’envoi d’hommes supplémentaires.
La rencontre de fin février sera aussi l’occasion de discuter du déploiement de 350 policiers onusiens pour surveiller et encadrer la police et la gendarmerie ivoiriennes, ainsi que d’autres observateurs chargés de prendre la température de ce qui se passe dans les différentes administrations du pays. Si le Congrès américain accepte la proposition des Nations Unies, les premiers hommes pourraient arriver en terre ivoirienne en avril ou mai prochains. Avec l’espoir de tranquilliser et sécuriser le pays avant les élections présidentielles d’octobre 2005.