La mauvaise administration et le mépris pour l’Etat de droit des dirigeants africains ont engendré des problèmes qui font qu’environ 60 pour cent des questions examinées par le Conseil de Sécurité de l’ONU concernent l’Afrique, a déclaré Emeka Izeze, un patron de presse nigérian.
Par Jerome Hule, Correspondant de la PANA
M. Izeze, le directeur général et rédacteur en chef de l’influent journal « The Guardian », a déclaré lors d’une réunion de journalistes africains à New York ce week-end, qu’il n’y a pratiquement pas d’exception au phénomène de la mauvaise gouvernance en Afrique.
En parlant des efforts déployés actuellement au Nigeria pour modifier la Constitution et permettre au président Obasanjo de rester au pouvoir après l’expiration de ses deux mandats constitutionnels en 2007, il a déclaré que le Nigeria ne faisait que suivre l’exemple d’autres pays africains comme la Namibie et l’Ouganda.
Selon M. Izeze, le processus en cours pour l’amendement de la constitution nigériane ne suit pas les procédures
constitutionnelles, estimant que cet amendement a déjà causé un tort au pays, quel que soit le sort qui lui sera réservé.
La controverse suscitée par la tentative présumée de briguer un troisième mandat empoisonne la vie politique au Nigeria, a-t-il dit, ajoutant que le président Obasanjo ne devait pas violer la loi en cherchant à rester au pouvoir à l’expiration des deux mandats que lui autorise la Constitution.
Même si le président a fait des choses positives, aucun individu ne doit être au dessus de la loi, a-t-il déclaré, soulignant qu' »aucun individu n’est plus important que le pays ».
Les exemples de l’Afrique du Sud et du Benin
M. Izeze a indiqué que le projet d’amendement de la Constitution pouvait conforter le sentiment selon lequel les lueurs d’espoir s’éteignent trop rapidement en Afrique.
Plutôt que de suivre l’exemple du président sud-africain Thabo Mbeki en rejetant les appels de certains égoïstes qui lui demandent de prolonger son mandat, a déclaré M. Izeze, le président nigérian a choisi d’emprunter la même voie que les dirigeants de la Namibie et de l’Ouganda qui ont amendé leurs constitutions nationales pour se maintenir au pouvoir.
M. Izeze a déclaré que même un plus petit pays comme la
République du Bénin avait choisi la voie de l’honneur avec le départ de Mathieu Kérékou suite à sa défaite électorale dans les années 90 puis son respect de l’âge limite de 70 ans imposé par la Constitution, dans le cadre duquel il doit se retirer du pouvoir le mois prochain.
Le patron de presse nigérian a demandé aux journalistes africains résidant en Amérique à se battre pour l’Afrique en posant aux dirigeants africains en visite des questions difficiles sur leurs actions dans leurs pays.
Le rôle de la presse
Il a souligné qu’en tant que professionnels travaillant dans une société où les journalistes ne sont pas persécutés pour avoir fait leur travail, les journalistes africains de la Diaspora étaient bien placés pour poser des questions pertinentes aux dirigeants, ce que ne pouvaient pas se permettre leurs collègues restés sur le continent.
En Afrique, selon M. Izeze, la presse doit jouer un rôle
difficile parce que l’opposition politique est souvent muselée, ce qui fait des journalistes la principale voix du peuple. Dans la plupart des cas, a-t-il indiqué, les journalistes qui posent certaines questions ont des problèmes avec les dirigeants politiques.
Il a chargé l’Association nationale des journalistes africains aux Etats-Unis (NAAJ), de relever le défi de rendre les dirigeants africains en visite responsables de leurs actions dans leurs pays.
En répondant à une question, M. Izeze a estimé que le Nigeria méritait un siège au niveau du Conseil de Sécurité de l’ONU en raison de ses énormes ressources humaines et matérielles.
Selon lui, le sort de l’Afrique est lié au Nigeria, de nombreux étrangers ayant le sentiment que le fait de traiter avec le Nigeria consiste à traiter avec le reste de l’Afrique.
Le discours d’Aminu Wali
Dans son discours, le représentant permanent du Nigeria auprès de l’ONU, Aminu Wali, a demandé aux journalistes africains travaillant aux Etats-Unis de faire connaître les aspirations de l’Afrique qui sont délibérément ignorées par la presse occidentale.
Il a estimé que les journalistes africains en Amérique devaient contribuer à l’établissement et au maintien de relations entre les Africains de la Diaspora et du continent.
Le diplomate a ajouté que les journalistes devaient présenter le programme de l’Union africaine à la communauté internationale et réaliser des reportages pertinents sur l’ONU afin de sensibiliser et d’informer les Africains sur les activités de cette organisation internationale.
« Par exemple, ces deux dernières années, des efforts énormes ont été concentrés sur les réformes de l’ONU », a-t-il souligné en invitant les journalistes à se familiariser avec ces questions, à défendre les intérêts du continent et à s’assurer que les populations africaines comprennent ces réformes.
M. Wali a aussi invité la presse à se faire l’écho des efforts de l’Afrique pour un développement durable, dans le cadre du Nouveau Partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD) et du Mécanisme africain d’évaluation par les pairs.