Le président français, qui a reçu ce mercredi à l’Elysée le président du Conseil national de transition libyen, a promis d’envoyer des officiers pour organiser la protection des populations civiles. Les rebelles basés à Misrata ont réclamé mardi une intervention au sol. La France et la Grande-Bretagne, toujours frileuses à cette idée, prônent la solution diplomatique.
Le chef de l’Etat français Nicolas Sarkozy a reçu à l’Elysée, ce mercredi, le président du Conseil national de transition libyen (CNT), Moustapha Abdeljalil, pour tenter de trouver des solutions à la crise libyenne. Selon le porte-parole du gouvernement français, François Baroin, Paris va envoyer « un petit nombre d’officiers de liaison auprès du CNT afin d’organiser la protection de la population civile, un tout petit nombre ». En revanche, l’envoi de troupes au sol a été exclu. Alors que pour la première fois depuis le début du conflit, les rebelles basés à Misrata, ville de l’ouest du pays, ont réclamé mardi soir l’envoi de soldats français et britanniques au sol pour leurs prêter main forte face à l’offensive meurtrière du régime. « Auparavant, nous demandions qu’il n’y ait aucune interférence étrangère, mais c’était avant que Kadhafi utilise des roquettes Grad et des avions. Désormais, il s’agit d’une situation de vie ou de mort », a déclaré Nouri Abdallah Abdoullati à la presse, l’un des chefs des insurgés de la ville, assiégée depuis plusieurs semaines par les forces de Mouammar Kadhafi.
La solution diplomatique
La France et la Grande-Bretagne, qui assurent près de la moitié des frappes aériennes de l’OTAN, prônent plutôt une solution diplomatique pour résoudre le conflit. Le Premier ministre Français François Fillon a insisté hier lors d’une visite en Ukraine, à Kiev sur la nécessité de « trouver une solution politique et les conditions d’un dialogue pour que la crise libyenne se résolve ». Il a également promis l’intensification de « l’effort militaire à partir des forces aériennes pour empêcher les forces de Mouammar Kadhafi de poursuivre leur entreprise contre les populations civiles ».
Le ministre des Affaires étrangères françaises, Alain Juppé, s’est déclaré mardi « tout à fait hostile » à l’envoi de forces sur le terrain en Libye, estimant qu’il revenait à la « rébellion de guider les avions de la coalition ». Même son de cloche pour son homologue britannique, William Hague, qui a affirmé dans le même temps que la Grande- Bretagne allait envoyer des conseillers militaires auprès du Conseil National de Transition (CNT) pour l’aider à améliorer son organisation militaire et logistique. Il a précisé toutefois que ces militaires ne participeront pas à la préparation ou à l’exécution d’opérations du CNT.
«L’OTAN peut se passer des Etats-Unis»
Alors que le Pentagone a annoncé mardi que les Etats-Unis avaient conduit plus de 800 sorties aériennes en Libye depuis la prise en main des opérations par l’alliance le 1er avril et procédé à un total de huit frappes contre des sites de défense anti-aérienne, le vice-président, Joe Biden a estimé, dans une interview accordée au Financial Times, que «l’OTAN peut se passer des Etats-Unis» en Libye. Selon lui, Washington est plus utile sur d’autres théâtres d’opération comme le Pakistan ou l’Egypte. Pour le moment la coalition poursuit toujours une offensive aérienne en Libye. Elle a mené mardi matin des raids sur Tripoli, Aziziyeh et Syrte, ville natale du dirigeant libyen, selon l’agence de presse libyenne Jana.
10 000 morts
La crise libyenne, qui a débuté le 19 mars, aurait déjà fait 10 000 morts et 55 000 blessés, selon le CNT. Face à la détérioration de la situation, le ministre italien des Affaires étrangères, Franco Frattini, a affirmé mardi que l’Italie était prête à accroître son aide aux insurgés avec davantage de médecins et d’infirmiers, notamment à Misrata.
La peur de l’enlisement du conflit gagne désormais toutes les parties. Le ministre libyen des Affaires étrangères, Abdelati Laabidi, a affirmé hier sur la BBC sa crainte du prolongement du conflit si les troupes de la coalition intensifiaient leur offensive militaire. « Nous estimons que toute présence militaire représente un pas en arrière et sommes sûrs que si les bombardements de la coalition s’arrêtaient, avec un vrai cessez-le-feu, nous pourrions avoir un dialogue de tous les Libyens sur ce qu’ils veulent : démocratie, réformes politiques, constitution, élections », a-t-il déclaré. Dans le même temps, Seif al-Islam, l’un des fils du « Guide » libyen, s’est dit convaincu que le régime Kadhafi sortirait vainqueur du conflit. « Nous allons vaincre. La situation évolue chaque jour en notre faveur », a-t-il déclaré mardi, lors d’une émission télévisée sur sa propre chaîne, Allibya.
Bien que sur le plan international tout soit mis en œuvre pour écourter le conflit libyen, le bras de fer engagé avec le colonel Mouammar Kadhafi – qui garde l’avantage -, risque bien de perdurer. L’OTAN est divisée sur l’intervention militaire, tandis que les insurgés, à bout de souffle, ne font pas le poids face aux troupes du régime en place. Dans ces conditions il est difficile d’envisager une sortie de crise…