L’ONU a appelé lundi les autorités libyennes à mettre tout en œuvre pour empêcher la prolifération des armes en Libye et dans la région du Sahel. Le risque que des groupes terroristes tels qu’Al-Qaida au Maghreb islamique ou des trafiquants d’armes s’en emparent est réel.
La traque des armes a commencé en Libye. Le pays est dangereusement équipé d’armes de toutes sortes. Le Conseil de sécurité de l’ONU a adopté lundi à l’unanimité une résolution appelant les nouvelles autorités à prendre toutes les mesures pour mettre un terme à leur prolifération dans le pays et la région du Sahel en particulier. L’ONU craint que des groupes terroristes ou des trafiquants d’armes s’accaparent d’armes tels que des missiles sol-air portable appelés manpads. Très prisés par les groupes radicaux, ils peuvent être utilisés pour abattre des avions et des hélicoptères.
Des armes aux mains d’AQMI
Pour les experts anti-terroristes, une grande partie des armes seraient déjà aux mains de groupes tels qu’Al-Qaida au Maghreb islamique (AQMI). Ils mettent en garde contre un risque de déstabilisation de la région du Sahel. « L’arsenal de systèmes de missiles anti-aériens portables dont dispose la Libye, le plus important au monde en dehors des pays qui les fabriquent, a été largement volé, comme par ailleurs les stocks de munitions et de mines en tout genre », selon Ian Martin, le représentant spécial du secrétaire général de l’ONU pour la Libye. Selon l’hebdomadaire allemand Der Spiegel, un haut responsable de l’OTAN, l’amiral Giampaolo di Paola, aurait indiqué lors d’une réunion à huit clos avec des députés allemands que l’Alliance atlantique a perdu la trace de 10 000 missiles de ce type appartenant aux pro-Kadhafi. Des diplomates ont affirmé, pour leur part, que certaines armes utilisées lors du conflit libyen se trouvaient déjà au Soudan, dans la région du Darfour. Face au danger, l’ONU encourage ainsi tous les pays frontaliers notamment à la Libye tels que l’Algérie, l’Egypte, le Niger à coopérer pour localiser les armes.
Mettre la main sur l’ensemble de cet arsenal militaire ne sera pas une mince affaire. Le Conseil national de transition (CNT) est loin d’avoir le contrôle total du pays et ne dispose pas des moyens nécessaires pour récupérer les armes qui se baladent librement dans le pays. Il a appelé les organisations des Nations unies compétents « à fournir aux autorités libyennes et aux Etats de la région l’assistance nécessaire pour lutter contre cette prolifération », notamment des armes chimiques.
Le gaz moutarde neutralisé
Le nouveau pouvoir libyen a annoncé lundi avoir neutralisé deux sites de stockage contenant du gaz moutarde soigneusement dissimulé durant le conflit par le régime de Mouammar Kadhafi. Ils ont été surveillés durant toute la période du conflit par une équipe spécial œuvrant dans l’ombre. L’un contient des armes « prêtes à l’usage militaire immédiat », selon l’expert libyen Youssef Safi ad-Din, en charge du problème. « Ces deux sites sont sécurisés » et ne présentent aucun risque sanitaire, a-t-il ajouté. Un troisième site situé près de Waddan, dans le sud du pays, dans l’oasis de Djoffra, était connu de l’ONU qui l’avait inspecté dès 2004. L’élimination de son stock de gaz a débuté en 2010 sous contrôle international et a continué jusqu’en février 2011, au début de l’insurrection.
Sécuriser tout le territoire libyen ne peut se faire sans d’importants moyens financiers. Les Etats-Unis, qui connaissent les risques que comporte l’insécurité en Libye, ont de leur côté décidé de financer un programme de 30 millions de dollars pour aider les nouvelle autorités à neutraliser les armes de l’ancien régime, a indiqué, le 13 octobre, Andrew Shapiro, sous-secrétaire d’Etat chargé des Affaires militaires. Selon lui, Washington a envoyé 14 experts en Libye et compte en envoyer 50 autres pour éviter leur dispersion. Il a précisé que Londres a donné son accord pour envoyer des experts et a indiqué ne « pas être en mesure d’évaluer le nombre d’armes disparues ». « Des milliers avaient été détruites », a-t-il ajouté, lors de bombardements. Le régime de Mouammar Kadhafi aurait acquis quelque 20 000 missiles SAM-7, dont plusieurs milliers auraient disparues depuis le début du conflit en mars.