La Kabylie s’embrase


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Vue sur le mont Djurdjura, en kabylie (Algérie)/DR
Vue sur le mont Djurdjura, en kabylie (Algérie)/DR

Anniversaire rouge. Le printemps berbère s’est transformé en émeutes violentes. Toute la Kabylie est en proie à de grands troubles après l’assassinat d’un jeune manifestant par un gendarme. Le pouvoir algérien présente ses regrets mais ne trouve pas de solution pour calmer les manifestants.

Nouveau front. La Kabylie connaît depuis une semaine de grands troubles. Partis d’une bavure d’un gendarme, l’assassinat d’un jeune kabyle, les évènements ont pris un tour dramatique avec la mort de deux autres manifestants en Petite Kabylie. Toute la wilaya (département) de Béjaïa est en proie à de violentes émeutes. La principale revendication – reconnaissance de la langue berbère – a été mise entre parenthèses pour laisser place au rejet du pouvoir. Comble de l’ironie, les Kabyles scandaient en arabe  » Djeïch, Chaab, maak ya Haattab ! « ,  » l’Armée et le peuple sont avec toi Hattab !  » Quand on sait que Hattab est un islamiste, hostile à la langue kabyle, tamazight.  » Les jeunes souffrent d’être amputés de leur identité et -surtout- du chômage. Ils se sont attaqués à tous les édifices publics comme s’ils voulaient effacer toute trace de l’Etat « , témoigne Djamel, présent dans la ville balnéaire de Tichy, au moment des émeutes. A Ifri Ouzellaguen, les forces de l’ordre ont tiré à balles réelles sur les manifestants, faisant deux morts et plusieurs blessés.

Les regrets du gouvernement

Les autorités algériennes ont réagi tardivement, laissant la situation pourrir, lui échapper. Après plus d’une semaine d’émeutes, le gendarme mis en cause dans la mort du défunt Guermah Mohamed a été présenté à la justice hier, et incarcéré pour homicide involontaire et le ministre de l’Intérieur a présenté les  » regrets du gouvernement pour les accidents qui se sont produits « . Le pouvoir semble tétanisé par ce nouveau front.  » Qui a intérêt à ce que l’incendie se propage? La question mérite d’être posée en cette conjoncture délicate et confuse que traverse le pays, où le moindre incident réel ou provoqué est politiquement exploité pour solder de vieux et de nouveaux comptes. Bouteflika a déjà fort à faire avec les foyers de tension pour se payer « le luxe » d’un nouveau front « , analyse Sofiane Bensalem, éditorialiste à El-Watan.

Les partis politiques implantés en Kabylie, le Front des forces socialistes (FFS) et le Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD), pensent aussi à un complot. Le parti d’Aït Ahmed parle  » de monstrueuse et macabre machination « . Selon lui, ces émeutes sont le fruit de la lutte des clans au pouvoir qui utilisent les  » revendications légitimes  » des Kabyles. Il avertit les « décideurs, le chef de l’Etat et leurs clans sur la tentation, une fois de plus, une fois de trop, de régler leurs différends par population interposée ». Le parti de Saïd Sadi fustige le gouvernement qu’il rend responsable de la mort des trois manifestants.

Le calme revient lentement en Kabylie mais deux grandes manifestations sont prévues à Tizi-Ouzou et à Béjaïa. Tous les dérapages sont possibles car partis politiques et associations culturelles parlent d’infiltration  » d’éléments perturbateurs « . Des pompiers pyromanes, qui profitent de la moindre occasion pour faire éclater des émeutes. La grande question est de savoir qui sont ces éléments.  » Agents des services  » selon les uns,  » indépendantistes  » selon les autres.

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