En mars 2022, un impressionnant voile ocre a recouvert le ciel espagnol, provoquant une vague d’inquiétudes sur une possible contamination radioactive. Une étude scientifique internationale vient de démontrer que cette brume saharienne, bien que spectaculaire, ne présentait aucun danger lié aux anciens essais nucléaires français en Algérie. Cette recherche publiée dans Science Advances met fin à trois années de spéculations et illustre l’importance de la science dans la dissipation des peurs collectives.
Le sud de l’Algérie constitue l’une des principales sources mondiales de poussières sahariennes, projetant chaque année dans l’atmosphère entre 400 et 2 200 millions de tonnes de particules. Si environ 12 % de ces poussières atteignent régulièrement l’Europe, particulièrement au printemps, l’épisode de mars 2022 s’est distingué par son intensité remarquable et son étendue géographique sans précédent. Les analyses géochimiques et minéralogiques, couplées aux observations satellitaires, ont permis aux chercheurs des universités d’Oviedo et de Paris-Saclay de retracer avec précision l’origine de ce phénomène qui a affecté la qualité de l’air dans plusieurs pays d’Europe occidentale.
Des craintes infondées sur la radioactivité
Une vaste étude mobilisant 110 échantillons de poussières, collectés par des citoyens à travers six pays européens, a livré des résultats rassurants. Les niveaux moyens de radioactivité mesurés atteignent seulement 14 becquerels par kilo. Il s’agit d’une valeur très largement inférieure aux seuils considérés comme dangereux pour la santé humaine (1 000 Bq/kg pour l’alimentation courante et 400 Bq/kg pour les aliments destinés aux nourrissons).
L’hypothèse d’un lien avec les essais nucléaires français menés à Reggane dans les années 1960 est définitivement écartée. Les chercheurs ont démontré que les traces de césium 137 et de plutonium radioactif détectées correspondent aux retombées globales des essais atomiques américains et soviétiques des années 1950 et 1960, dispersées dans l’atmosphère terrestre depuis des décennies.
Un apport bénéfique pour l’environnement
Loin d’être néfastes, ces brumes sahariennes jouent un rôle essentiel dans l’équilibre environnemental. Elles peuvent temporairement dégrader la qualité de l’air et exacerber certains problèmes respiratoires, mais elles participent activement au cycle climatique naturel. Ainsi, ces poussières transportent des nutriments indispensables à la végétation et influencent la formation des nuages et des précipitations.
Cette recherche collaborative, associant expertise scientifique internationale et participation citoyenne, améliore significativement notre compréhension des phénomènes atmosphériques à grande échelle. En outre, elle montre l’importance de la démarche scientifique pour déconstruire les idées reçues et apaiser les inquiétudes collectives.
Les cieux orangés qui ont tant marqué les esprits en 2022 peuvent être contemplés avec sérénité . Désormais ce sera un rappel de l’interaction constante entre le Sahara et l’Europe, deux espaces géographiques unis par les mouvements atmosphériques naturels.