Depuis le 1er février dernier, l’Etat gambien réclame aux ressortissants étrangers présents sur son sol l’équivalent de deux mois de salaire pour l’obtention d’une carte de séjour. Dans l’impossibilité de s’acquitter de ce montant, de nombreux Sénégalais, Sierra Léonais et autres Guinéens ont commencé à quitter le pays.
Les ressortissants étrangers représentent près de la moitié de la population gambienne (700 000 sur 1,5 million d’habitants). Appliquée depuis le 1er février dernier, l’augmentation du prix de la carte de séjour dans le pays a provoqué le départ de nombre d’entre eux. 1 000 Dalasi (40$) par an sont réclamés aux ressortissants de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cedeao) et 1 500 aux non-ressortissants de la Cedeao. Cette nouvelle manne financière permettra, selon le gouvernement, d’améliorer la situation sociale de toute la population. Pour la plupart des Gambiens, la nouvelle mesure est surtout une façon commode et improductive pour un pays en grave crise économique de renflouer ses caisses.
Poussés au départ
» La situation géographique de la Gambie est particulière. C’est un petit pays enclavé dans un autre pays : le Sénégal. Et les non-gambiens qui y résident ne s’y sentent pas vraiment étrangers « , explique un membre de l’ambassade de France en Gambie. Pourtant, Pape Jobe, un Sénégalais qui a passé la majeure partie de sa vie en Gambie, a du se rendre à l’évidence. Le salaire mensuel moyen d’un ouvrier est d’environ 500 Dalasi et le gouvernement gambien lui en réclame 5 000 par an. 1 000 pour lui et 1 000 autres pour chaque membre de sa famille. Sa seule alternative, comme pour beaucoup d’autres, a été de quitter le pays. Le gouvernement gambien réalise ainsi un écrémage efficace ; il pousse au départ les résidents étrangers les plus pauvres et reçoit les versements des plus riches.
Rente annuelle
Démagogue, un membre du gouvernement explique qu’il est injuste de taxer les seuls Gambiens pendant que de nombreux salariés étrangers accumulent d’importantes sommes d’argent à leurs dépends. La loi est pourtant claire. Non seulement les employeurs doivent payer d’importantes charges (10 000 D par an) pour s’offrir les services d’ouvriers étrangers, mais ces derniers sont eux-mêmes assujettis aux mêmes impôts que les citoyens gambiens.
Avec une dette extérieure qui représente le double de son produit intérieur brut (PIB), la Gambie est l’un des pays les plus pauvres au monde. En surtaxant la moitié de la population gambienne, le gouvernement s’assure une nouvelle rente annuelle. Des revenus bien plus sûrs que ceux rapportés par une économie agricole soumise aux aléas climatiques et aux fluctuations des cours mondiaux.