La discrimination des immigrés en France


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Les discriminations à l’égard des immigrés en France ne cessent pas. La preuve : les condamnations et les procès intentés à des entreprises discriminantes foisonnent. La couleur de la peau ou les origines cantonnent souvent « les étrangers » dans des emplois de seconde zone ou leur ferme la porte à l’emploi.

Par Luc Olinga

« Toujours à la recherche d’un employé service entretien. Profil : race blanche. bonne tête, dynamique, esprit d’initiative, volontaire et assidu. Poste déboucherait sur un CDI. Pas besoin de grandes connaissances mais une volonté d’apprendre, de s’intégrer ». « 25 /26 ans, fille ou garçon. Déjà pratique de la vente (si possible prêt-à-porter).TB présentation (BCBG). Pour un bac pro, commerce ou BTS action commerciale. Pas typé(e) ayant BEP ou CAP VAC… » Deux annonces, explicitement discriminatoires, déposées à l’ANPE Alsace et, citées par la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH). Elles illustrent l’ostracisme auquel peuvent être confrontés les immigrés d’origine africaine en quête d’un emploi.

Les critères sont souvent subjectifs et varient d’un employeur à un autre. Pour certains, c’est par peur de la réaction de la clientèle. Fatima Saadi, 20 ans, d’origine comorienne en a fait les frais. De niveau Bac commercial, elle a postulé à un poste de vendeuse de cures de minceur, proposé par une boutique du 12e arrondissement à Paris. Un rendez-vous téléphonique est pris sans accroc. La gérante n’a pas hésité à la refouler en l’apercevant. « Ah ! Mais vous êtes Noire, je ne savais pas que vous étiez d’origine africaine, je ne peux pas me permettre d’engager une personne de couleur à cause de ma clientèle. C’est mauvais pour mon image », lui lance-t-elle en refusant de prendre son curriculum vitae (CV). Fatima a porté plainte. Le parquet a requis 2 mois d’emprisonnement avec sursis et 5 000 euros d’amendes en octobre 2003 contre la gérante.

« Ils ont Bac+7 et on leur propose des métiers sous qualifiés »

D’autres employeurs ont mis sur pied d’autres formes plus subtiles de discrimination à l’embauche. Ce que le sociologue Philippe Bataille nomme « l’ethnicisation et la racialisation des tâches ». En d’autres mots un ghetto de l’emploi. Les attributions se font selon la couleur de la peau. L’immigré est normalement rétribué, mais l’organisation du travail évite qu’il soit en contact avec la clientèle. Bref un placard « douillet ». Le précédent du Moulin rouge, où les Noirs étaient confinés à la cuisine et 97% du personnel en salle était d’origine européenne, en atteste. « On était trois immigrés, narre Koné, originaire du Burkina-Faso, salarié d’un magasin d’ameublement de la région parisienne. Moi, Kodjo et un autre, Idriss. Tous les trois, on nous a mis à la manutention parce que c’était ça ou rien ; on ne discute pas ces choses-là ». Paranoïa ? « J’ai une formation de vendeur, s’emporte-t-il. C’est un hasard que nous trois on n’est plus devant les clients ? interroge-t-il amer. On est la honte du magasin, parce que s’ils ont fait ça ils avaient des raisons. » Lesquelles alors ? « Je ne sais pas, si ce n’est pas du racisme, ça doit être l’image ».

Ce que confirme Dogad Dogoui, président du club Africagora, créé en 1999 et qui milite pour l’émergence d’une génération de décideurs noirs. « Il y a plein de Noirs diplômés à qui on ne donne pas leur chance. Ils ont bac+7 et on leur propose des métiers sous qualifiés. Comme ils n’ont pas de réseau sur lequel s’appuyer, ils s’isolent ».

Le recrutement des entreprises étant de plus en plus fondé, aujourd’hui, à diplôme équivalent, sur les parrainages et le piston, les procédures adoptées récemment par les cabinets de recrutement à coup d’aggiornamentos médiatisés ne vont pas radicalement changer la donne. Même si l’opération « ça va être possible », lancée par SOS-racisme pour lever les obstacles à l’embauche des jeunes des quartiers sensibles, connaît ses premiers succès. En un an quelques dizaines de candidats ont été embauchés. Un chiffre, certes encourageant, mais dérisoire au vu du taux de chômage des jeunes issus de l’immigration et sans qualification : 40% selon le HCI. « Le fait d’être immigré ou d’origine immigrée constitue une difficulté supplémentaire au moment de l’insertion professionnelle», souligne le Haut conseil à l’intégration (…)

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