Depuis le début du mois de février, les populations urbaines de Côte d’Ivoire font la mauvaise expérience des délestages. Au risque de ralentir la production et de paralyser les activités industrielles, le gouvernement ivoirien envisage des coupures d’électricité pendant trois mois, créant une grande inquiétude parmi les habitants du pays.
« Salut ô terre d’espérance, pays sans électricité… Tes légions à bout de patience vont parler de ta déchéance. Fiers ivoiriens, le pays nous aveugle. Notre devoir sera de rétablir la lumière pour tous ». Sur le réseau social Facebook, de jeunes Ivoiriens ont décidé de dénoncer la situation dans laquelle se trouve actuellement le pays en réécrivant l’hymne nationale. «Toute la commune est touchée. Les zones industrielles ont le courant la journée et les zones résidentielles ne l’ont qu’une partie de la nuit », explique Frédéric, un habitant d’Abidjan. « Les délestages ne sont pas nouveau en Côte d’Ivoire. Mais ça s’est intensifié ces dernières semaines. Officiellement, ils devraient durer jusqu’en mai. Mais la rumeur commence à courir que ça continuera jusqu’en 2011», ajoute-t-il.
Jamais les vendeurs de bougies et de lampes torches ne se sont aussi bien portés à Abidjan. La fourniture d’électricité est perturbée dans tout le pays depuis février. «Nous lançons un appel aux industriels pour économiser l’énergie et réduire progressivement la consommation inutile », a déclaré en janvier Eddy Simon, directeur général de l’électricité au Ministère des mines et de l’énergie. Un générateur de 150 mégawatts à la centrale Azito (groupe important du parc de production du réseau électrique) est tombé en panne le 22 décembre dernier. Elle a été remplacée par un groupe indépendant de 110 mégawatts, ce qui crée aujourd’hui un déficit de production.
A qui la faute ?
« Quand on parle d’électricité, la population ivoirienne pense que c’est de notre faute », déplore Béatrice Niambault du service communication de la Compagnie ivoirienne d’électricité (CIE). Il y a deux semaines, des manifestations ont touché la ville d’Adiaké (dans le sud), au cour desquelles des bâtiments de la CIE ont été détériorés.
Avant la panne de la centrale électrique, la Direction de la CIE aurait tenté d’attirer l’attention du ministère des Mines et de l’Énergie sur le grave danger que le réseau électrique du pays courait. «C’est un réel problème de gouvernance. L’Etat n’a pas daigné respecter ses engagements, à savoir réaliser les investissements nécessaires dans la construction de nouvelles infrastructures électriques. Ces dernières années, la consommation est passée du simple au double et on n’en a pas pris compte. Il faut faire face à l’urgence et fournir de l’énergie supplémentaire», a ajouté Mme Niambault.
Les entreprises menacées ?
Les nombreux délestages obligatoires auront certainement un impact négatif sur le fonctionnement du pays et de ses occupants. « Aujourd’hui, il y a une énorme perturbation. Des entreprises ne peuvent pas avoir l’électricité car elles se trouvent dans la zone résidentielle. Ces petites entreprises ne peuvent pas fonctionner normalement et sont menacées de fermer leurs portes», témoigne Béatrice Niambault.
Les zones industrielles possèdent des avantages. Mais qu’en est-il des hôpitaux et des autres structures nécessitant une électricité permanente? Selon la CIE, des sites sont préservés des coupures d’électricité. Pour les centres hospitaliers, par exemple, des groupes électrogènes peuvent prendre le relais en cas de délestage. « S’ils fonctionnent!», rappelle la Direction.
La population Ivoirienne est plongée dans l’obscurité et le doute. D’autres manifestations pourraient avoir lieu au cours des semaines à venir.