La cession controversée du Grand Regency Hotel, un hôtel de cinq étoiles, et la démission du ministre des Finances, Amos Kimunya, qui s’en est suivie, a été le sujet dominant dans les journaux de la semaine au Kenya.
Les raisons de cet intérêt de la presse sont manifestes. En effet, il semble que le ministre aurait vendu l’hôtel, propriété de l’Etat, à l’insu de ses collègues ministres, des parlementaires et du procureur général, Amos Wako.
Dès que les populations kenyanes avaient eu vent de la cession de l’hôtel à des individus s’étant présentés comme des représentants de l’Etat libyen, elles avaient flairé quelque chose de louche et réclamé la démission du ministre.
La controverse autour d’une situation qualifiée par les Kenyans d’escroquerie a également éclaboussé le gouverneur de la Banque centrale, Njuguna Ndung’u, et le directeur du Service national des renseignements de sécurité, le major général Michael Gichangi.
Les médias ont joint leurs voix à celles du reste de la population kenyane en réclamant la démission de Kimunya et ensuite l’ouverture de poursuites judiciaires contre toutes les personnes impliquées dans cette transaction.
La presse kenyane a largement traité de la corruption, les chroniqueurs, les faiseurs d’opinion, les analystes politiques et les éditorialiste appelant à la prise de mesures rapides et énergiques pour écraser cette hydre qui empoisonne la vie du Kenya depuis son accession à l’indépendance, en 1963.
Le professeur Ndung’u avait ignoré l’avis du conseil des gouverneurs de la Banque centrale, qui avait demandé l’implication du procureur général, le conseiller juridique de l’Etat, dans la transaction. On rappelle que la Banque centrale, institution de l’Etat, était propriétaire de l’hôtel.
Refusant de tenir compte de cet avis, le gouverneur de la Banque avait ignoré le procureur général, mettant en oeuvre ce projet à odeur de scandale qui a permis aux principaux acteurs de sous- évaluer et de vendre cet hôtel de 220 chambres à des “investisseurs libyens” qui mettaient en avant leurs prétendus liens avec Tripoli.
Cependant, le gouvernement libyen s’était vite démarqué des acheteurs, expliquant qu’ils n’avaient aucun lien avec la Libya Arab African Investment Company, une société publique. “Il s’est agi d’une transaction privée entre des investisseurs libyens et la Banque centrale du Kenya”, a rectifié la représentation diplomatique libyenne à Tripoli.
Quel a été le rôle du patron des services nationaux de renseignements dans cette escroquerie ? Qu’est-ce que la cession d’un bien public a à voir avec la sécurité d’Etat ?
Le double langage de Kimunya lui a aussi attiré des ennuis. En effet, l’hôtel, dont la valeur avait été estimée à 7,9 milliards de shillings kenyans, n’a été vendu par M. Kimunya qu’au prix de 2,9 milliards de shillings.
Dans un premier temps, le ministre avait déclaré devant le Parlement que l’hôtel ne serait pas cédé, avant de dire qu’il s’agissait d’une vente de gré à gré et, enfin, il avait expliqué que ce marché concernait une transaction entre gouvernements. Il s’était donc contredit, suscitant la colère des membres de l’auguste assemblée.
Les populations kenyanes, malades et fatiguées de cette corruption qui semble résister à toute tentative d’éradication, ont réclamé sa démission, le Parlement avait ensuite voté la censure contre lui et prié instamment le président Mwai Kibaki de le remercier.
Par ailleurs, la presse aussi lui avait demandé de “prendre la seule décision honorable, en démissionnant afin d’ouvrir la voie à une enquête indépendante”. Le ministre des Finances avait fini par céder aux pressions et par rendre le tablier.
Par la suite, le président Kibaki a mis sur pied une commission dirigée par un magistrat à la retraite, Majid Cockar, et chargée de faire toute la lumière sur ce scandale.
D’autres questions ont aussi retenu l’attention de la presse cette semaine, notamment l’enquête actuellement menée par la Commission Philip Waki sur les violences post-électorales et la préparation des prochains Jeux Olympiques prévus à Beijing, en Chine.
Le major général Hussein Ali, commissaire de la Police, a été soumis à un feu roulant de questions lors de sa comparution mercredi, devant la commission qui cherchait à comprendre pourquoi les fonctionnaires de police avaient tiré à balles réelles sur des manifestants non armés qui dénonçaient le truquage des élections.
La police a aussi été accusée d’avoir été à l’origine de 29% des décès enregistrés, compte tenu du fait qu’elle avait choisi d’abattre les manifestants et les pillards au lieu de procéder à leur arrestation.
Le général a cependant défendu ses éléments, estimant qu’ils avaient agi dans le cadre de la loi.