L’Université Virtuelle Africaine (UVA) tient actuellement son conseil d’administration annuel dans la capitale parisienne. A cette occasion, nous avons rencontré Jacques Bonjawo le président du conseil. Il revient pour nous sur l’actualité de cette jeune mais dynamique institution, qui souligne-t-il, est en pleine phase d’expansion.
Voilà plus de 6 ans que l’Université Virtuelle Africaine, programme de formation à distance à l’échelle continentale, existe. De projet pilote, elle est devenue, comme son nom ne l’indique pas, une réalité palpable pour près de 40 000 étudiants africains. Jacques Bonjawo, le président de son conseil d’administration, nous parle de l’actualité et des perspectives d’une institution, qui s’emploie, grâce aux nouvelles technologies, à offrir aux étudiants africains d’autres solutions pour accéder, à moindre coût, à des formations de qualité.
Afrik.com : Quelle est l’actualité de l’UVA ?
Jacques Bonjawo : Elle est dominée par le don de la Banque africaine de développement (Bad) de 8 millions de dollars, octroyés pour son expansion. Ce don intervient dans le cadre du partenariat de l’UVA avec le Nepad (Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique, ndlr) qui va dans le sens de la formation des formateurs. L’UVA est en pleine phase d’expansion. Nous sommes présents dans 26 pays à travers 47 centres – des campus numériques – dont à peu près la moitié sont installés dans des pays francophones. Par ailleurs, nous avons récemment remis leurs diplômes aux étudiants qui suivaient les formations en informatique et en gestion (4 ans, ndlr) fournies par les universités australiennes de Curtin et du Royal Melbourne Institute of Technology.
Afrik.com : Aucun projet éducatif en Afrique ne peut se faire sans qu’une attention toute particulière soit faite aux femmes. Qu’en est-il à l’UVA ?
Jacques Bonjawo : Quarante pour cent des 40 000 étudiants formés depuis notre création sont des femmes. C’est déjà un bon score comparé à celui des femmes qui suivent par exemple, en Mauritanie, des études universitaires. Même si des efforts restent encore à faire. D’autant plus qu’une étude réalisée par Gene Sperling, conseiller de l’ancien Président Bill Clinton, sur l’éducation en Afrique, démontre qu’il est plus « rentable » de scolariser une femme compte tenu des effets induits. Elle serait notamment plus encline à scolariser son enfant.
Afrik.com : L’UVA est aussi très sensible à la connectivité …
Jacques Bonjawo : La connectivité est en effet un problème majeur. C’est un obstacle que nous allons contourner avec le VSAT qui permettra de jouir en Afrique d’un accès haut débit. Nous travaillons actuellement à rallier le plus grand nombre d’universités africaines pour que chacune d’elle apporte sa contribution au projet afin d’en bénéficier plus tard.
Afrik.com : La fibre optique existe déjà, n’est-ce pas une solution plus intéressante ?
Jacques Bonjawo : La fibre optique via le câble sous-marin n’est pas une solution souhaitable puisque les connections internes posent problème. Il est en effet difficile de raccorder le reste du territoire à la côte.
Afrik.com : Les logiciels libres sont considérés aujourd’hui comme une véritable alternative dont l’Afrique doit profiter pour bénéficier des nouvelles technologies. L’UVA en fait-elle usage, comme son partenaire l’Agence universitaire de la Francophonie (AUF), dans le cadre de son programme de formation à distance ?
Jacques Bonjawo : La plate-forme que nous utilisons est une plate-forme Microsoft. L’UVA n’est absolument pas contre l’usage des logiciels libres. Au contraire, nous avons même une formation dédiée à Linux.
Afrik.com : L’UVA pense t-elle évoluer vers une plate-forme utilisant des logiciels libres ?
Jacques Bonjawo : Si nous devions aujourd’hui utiliser des logiciels libres, ils viendraient en complémentarité de l’existant.
Afrik.com : Quel est l’intérêt pour l’UVA d’établir un partenariat avec le Nepad que beaucoup considèrent comme un « éléphant blanc » ?
Jacques Bonjawo : Le partenariat que nous avons établi avec le Nepad est très concret. Il s’agit de former des enseignants dont la population est en baisse. Leur mort prématurée, notamment à cause du sida, y est pour beaucoup. Comme je vous le disais tantôt, les 8 millions de dollars y seront consacrés.
Afrik. com : Est-ce que l’UVA a réalisé une étude sur les étudiants qu’elle a formés en vue notamment de récolter leurs impressions sur l’institution ?
Jacques Bonjawo : Nous n’avons pas encore fait d’étude dans ce sens. Nos étudiants sont un peu dispersés mais nous avons récolté les témoignages de certains d’entre eux. A notre rencontre de Marrakech (collecte de fonds organisée en 2003, ndlr), une étudiante handicapée avait d’ailleurs témoigné de ce que l’UVA avait été une véritable chance pour elle de se former.
Afrik. com : Quels sont aujourd’hui les défis et les perspectives de l’UVA ?
Jacques Bonjawo : J’ai évoqué tout à l’heure l’un d’eux, à savoir la connectivité. Et puis nous souhaitons atteindre une masse critique d’étudiants qui nous permettrait, entre autres, de réduire les coûts liés au recours au satellite au sein de notre institution. Je le rappelle, il ne s’agit pas pour l’UVA de faire concurrence aux universités traditionnelles, même si certaines sont en grande difficulté, nous avons plutôt vocation à être complémentaire. Un autre défi important est d’arriver, d’ici 2009, comme le prévoit notre business plan, à ce que 80% des formations dispensées par l’université proviennent des universités africaines. Ce qui n’est pas le cas à l’heure actuelle puisque que la majorité des contenus viennent des universités partenaires du Nord.
L’UVA en quelques dates
1997 : Conçue par des experts en développement, l’Université Virtuelle Africaine est créée. Le projet pilote mûrit alors dans les bureaux de la Banque Mondiale, à Washington. 1997-1999 : Phase de mise à l’épreuve du concept. L’UVA utilise alors l’expertise et les installations de la Banque Mondiale, avec l’appui des Recteurs et Vice-chanceliers de nombreuses universités africaines pour mener à bien sa mission. 2000-2001 : Phase de transition. Au cours de laquelle 31 centres de formation de l’UVA ont été créés dans 17 pays africains. 23 000 personnes ont été formées dans les domaines du Journalisme, des Etudes Commerciales, de l’Informatique, des Langues et de la Comptabilité, avec un taux d’inscription élevé de femmes (plus de 40%). Depuis 2002, l’UVA est passée à sa phase opérationnelle, au cours de laquelle une stratégie majeure d’expansion est mise en œuvre à travers les 53 pays d’Afrique. |