L’Unicef veut lutter contre l’excision


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Selon un rapport récent du Fond des Nations Unies pour l’enfance (Unicef) sur l’excision, ce sont, chaque année, 3 millions de femmes africaines qui sont mutilées au mépris de leurs droits les plus élémentaires. Tout en pointant les risques liés à cette pratique, le document insiste sur les progrès déjà constatés dans ce domaine et sur le possible abandon, d’ici « une génération », de ce rite traditionnel.

Par Floréal Sotto

Un rapport sur l’excision, intitulé «Changer une convention sociale néfaste : la pratique de l’excision/mutilation génitale féminine », présenté dimanche dernier, à Dakar, par le Fond des Nations Unies pour l’enfance (Unicef) examine la dynamique sociale de cette pratique qui viole, chaque année, l’intégrité physique et mentale de 3 millions de femmes en Afrique. Il dresse un tableau précis des différentes formes d’excision dans 28 pays d’Afrique et du Moyen-Orient et fait un bilan de son évolution depuis les années 50. Cette étude aurait ainsi permis de comprendre « le rôle important au niveau de l’identité culturelle » de cette coutume et de déterminer des « stratégies prometteuses pour encourager les communautés concernées à l’abandonner rapidement ».

Une pratique nuisible à la femme

L’Unicef constate que la pratique de l’excision ou de la mutilation sexuelle peut avoir des conséquences irréversibles sur l’intégrité des filles et des femmes qui la subissent. « Les dégâts causés par l’intervention peuvent mettre en danger leur santé et leur bien être ». La mort, les complications liées à l’acte et celles rencontrées par la femme lors de son premier accouchement sont autant de risques encourus. Le lien entre l’excision et la transmission du sida a également été mis en exergue et devrait faire l’objet de nouvelles recherches. Enfin, le rapport n’oublie pas de mentionner les conséquences psychologiques en soulignant que les femmes « ne disposent d’aucun exutoire socialement acceptable pour exprimer leur malaise ou leur détresse psychologique.» L’intervention entraîne de nombreux cas de troubles psychiques et sexuels chez la femme et des perturbations dans l’épanouissement de la jeune fille. Notamment dans le cadre de sa scolarité. Une fille, ayant subi l’excision, est souvent considérée comme bonne à marier et retirée de l’école.

En Afrique, la prévalence de femmes mutilées ou excisées dans très variable – de 5% au Niger à 99% en Guinée – et présente également de nombreuses disparités à l’intérieur d’un même pays. L’Unicef remarque également que, depuis les années 90, les flux migratoires ont exporté la pratique vers les pays industrialisés. De même, le rapport recense les motifs, souvent d’ordre religieux, esthétique et moral ou liées à l’hygiène, qui conduisent à cette pratique au sein des communautés. Le rapport affirme ainsi qu’elle garantirait « une position sociale, la possibilité de se marier, la chasteté, la santé, la beauté, ainsi que l’honneur de la famille ». Ces arguments servent à maintenir la convention sociale de l’excision et c’est donc à sa modification qu’il faut s’atteler pour faire changer les mentalités.

S’appuyer sur la communauté pour éradiquer le phénomène

En somme, c’est la pression sociale qui fait perdurer le rite. Pour faire face au phénomène, il faut par conséquent mener une action qui s’inscrit dans le cadre communautaire si l’on souhaite qu’elle aboutisse. Car les mères, même si elles reconnaissent les douleurs infligées à leurs filles pendant l’excision, préfèrent de loin leur garantir une place reconnue au sein de leur communauté. De même, les gouvernements ont aussi une part de responsabilité. Ils ne semblent pas prêts à adopter ou appliquer des lois condamnant ces pratiques. De nombreux agents de santé pratiquent d’ailleurs l’excision. Aussi lorsque des campagnes ont été menées pour informer sur ses conséquences, cela a entraîné une augmentation rapide des excisions exécutées par des professionnels. « En Guinée, par exemple, on a constaté que 21,8% des filles et des femmes âgées de 15 à 19 ans avaient été opérées par des agents de santé, contre moins de 1% pour les femmes âgées de 45 à 49 ans », peut-on lire dans le rapport. L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) condamne fermement cette pratique des professionnels de la santé, et affirme que « du point de vue des droits humains, la médicalisation ne rend nullement la pratique plus acceptable »

Pour conclure, le rapport préconise de s’appuyer dorénavant sur la « communication comme moyen d’émancipation » pour inviter les communautés à abandonner cette pratique. Des programmes d’éducation de base, comme celui mené par l’ONG sénégalaise Totsan en collaboration avec l’Unicef, ont déjà contribué positivement à ce genre de projet. Ce programme a permis de créer au Sénégal des classes pour des personnes non scolarisées, en majorité des femmes. Il s’appuie sur les systèmes traditionnels de propagation de l’information et a obtenu des résultats remarquables, notamment pour ce qui est de la scolarisation des filles. Le thème de l’excision a pu être abordé tout en informant sur les droits humains. « Juste avant le début du programme, 7 femmes sur 10 avaient décrété qu’elles souhaitaient que leurs filles soient excisées. A la fin du programme, cette proportion était tombée de 1 à 10 ». « Les méthodes les plus efficaces sont celles qui procurent aux communautés le soutien nécessaire pour qu’elles définissent elles-mêmes les problèmes et les solutions, de sorte qu’elles ne se sentent ni contraintes, ni jugées », affirme-t-on à l’Unicef. Un discours qui démontre bien qu’il faudra beaucoup de patience et de bonne volonté pour lutter contre l’excision, qui bien que néfaste, appartient à l’héritage traditionnel de plusieurs populations dans le monde.

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