Après une série de négociations infructueuses et de propositions, les sanctions contre les « autorités illégitimes » d’Anjouan sont la dernière tentative de l’Union africaine (UA) pour résoudre le conflit politique entre l’Union des Comores et l’une de ses îles semi-autonomes.
L’UA tente de trouver une solution négociée au conflit depuis qu’un processus électoral mené individuellement a ravivé les tensions entre l’île d’Anjouan et Grande-Comore et Mohéli, les deux autres îles de cet archipel de l’Océan indien qui compte quelque 800 000 habitants.
Le système électoral complexe de l’archipel a été négocié en 2001 par l’Organisation de l’unité africaine (OUA), dans le sillage de la sécession de Mohéli et d’Anjouan par rapport à la Grande-Comore, qui avait eu lieu en 1997. Ce système électoral prévoit que les îles – Anjouan, Grande-Comore et Mohéli – aient chacune leur propre gouvernement semi-autonome et leur propre président, et se voient confier à tour de rôle la présidence du gouvernement fédéral de l’Union.
« Tout retard supplémentaire dans la résolution de la crise aurait déstabilisé les Comores et constitué une réelle menace pour l’unité du pays », a indiqué un communiqué de l’UA publié après que le Conseil de paix et de sécurité eut approuvé les sanctions à l’encontre du gouvernement d’Anjouan, lors d’une réunion mercredi dernier.
« Tous les Etats membres [de l’UA] devront geler immédiatement les fonds, avoirs financiers et autres ressources économiques détenus ou gérés par les autorités illégitimes d’Anjouan », et d’autres sanctions, notamment des interdictions de voyager, ont été prises par l’organisation africaine. Toujours selon le communiqué, une liste détaillée des personnes concernées par ces mesures sera publiée.
Mohamed Bacar, 45 ans, était arrivé au pouvoir en 2001 à la faveur d’un coup d’état, et avait été élu président de l’île d’Anjouan en 2002. Ayant achevé son mandat de cinq ans, il avait été prié par la Cour constitutionnelle de se retirer, mais avait nommé un président par intérim à la tête du gouvernement local jusqu’aux élections.
Le premier tour des élections avait été organisé le 10 juin dans la Grande-Comore et à Mohéli, mais l’UA et le gouvernement de l’Union avaient reporté le scrutin au 17 juin dans l’île d’Anjouan. Cette décision faisait suite à une campagne d’intimidation orchestrée avant la tenue des élections et à de violents incidents qui avaient fait deux morts parmi les militaires.
« Les élections à Anjouan [qui s’étaient déroulées le 10 juin, malgré la décision de report] avaient été déclarées nulles et non avenues par l’Union africaine et la Cour constitutionnelle », a confié à IRIN Francisco Madeira, l’envoyé spécial de l’UA. A l’issu de ce scrutin M. Bacar avait revendiqué une victoire écrasante en totalisant 90 pour cent des suffrages.
Les sanctions de l’UA s’appliqueront pendant une période initiale de 45 jours ; elles seront levées si les autorités d’Anjouan acceptent d’organiser de nouvelles élections, une proposition rejetée par M. Bacar, mais soutenue par le gouvernement de l’Union.
Si M. Bacar ne se plie toujours pas aux exigences de l’UA et du gouvernement de l’Union, des mesures plus draconiennes seront prises. Elles pourront se traduire par le blocus aérien et maritime de l’île, « ainsi que par un soutien de la Mission de l’UA pour la surveillance des élections aux Comores (MUASEC) au gouvernement comorien pour qu’il prenne toutes les mesures qu’il juge nécessaires au rétablissement de son autorité sur Anjouan », a indiqué le communiqué de l’UA.
Les Comores, qui ont acquis leur indépendance de la France en 1975, après plus de 130 années de régime colonial, ont connu trois décennies d’instabilité politique émaillées de coups d’état et de tentatives de coup d’état.