Laïcs et islamistes tunisiens font front contre le président Ben Ali. L’opposition s’unit, pour la première fois, pour contrer une éventuelle candidature de l’actuel président aux présidentielles de 2004. Elle soupçonne Ben Ali de vouloir s’introniser président à vie.
Le président Ben Ali est très fâché. Il voulait organiser une grand messe pour le 45ème anniversaire de l’indépendance de la Tunisie, mais son opposition, pour une fois unie, s’est rappelée à son bon souvenir. Pétitions, déclarations, manifestations, l’opposition donne de la voix et étouffe complètement les discours officiels. Après le sévère rapport d’Amnesty international sur la situation des droits de l’Homme en Tunisie, ce sont ses adversaires politiques qui sont montés au créneau.
Durant toute la semaine, la société civile et l’opposition politique ont multiplié les appels » contre la dérive sans précédent du régime « . Ce lundi, les laïcs et les islamistes, réunis pour la première fois depuis 1985, ont lancé un appel conjoint pour la formation d’un » front patriotique et démocratique « . L’appel a été rédigé à Londres où Mohamed Mooda, président du Mouvement des démocrates socialistes (MDS) a rencontré la figure emblématique de l’islamisme tunisien, Rached Ghannouchi, chef du mouvement Ennahda ( » Renaissance « , interdit). Les deux hommes s’opposent à la candidature de Ben Ali à l’élection présidentielle de 2004.
Islamistes, laïcs, même combat
» J’ai rencontré Cheikh Ghannouchi à Londres et nous avons décidé de faire une déclaration et un appel conjoints. Tous les courants politiques tunisiens sont d’accord sur le contenu « , explique le président du MDS. Les deux opposants soupçonnent le président Ben Ali de vouloir s’introniser président à vie. Ils réclament la libération de tous les prisonniers politiques, pour la plupart islamistes et l’instauration d’une réelle démocratie avec la séparation entre les appareils de l’Etat et le parti au pouvoir, le Rassemblement constitutionnel démocratique. Les deux opposants appellent toute l’opposition à former un front uni contre Ben Ali.
Le président tunisien, Zineddine Ben Ali, dans son discours prononcé mardi 20 mars, à l’occasion du 45ème anniversaire de l’indépendance, a déclaré que la Tunisie s’était employée à « jeter les bases de l’Etat de droit » et qu’elle était « le pays de la modération et de la tolérance, le pays des droits de l’homme ». Sans citer l’opposition, les ONG, ni la France, il a réitéré son refus de « nouvelles formes d’ingérence » dans les affaires intérieures de son pays.