L’opposition togolaise est encore sous le choc de la modification de l’article 59 de la Constitution, permettant au président Eyadéma de briguer un troisième mandat. Interview de Bob Akitani, qui représente la Coalition des Forces Démocratiques.
Bob Akitani, premier vice-président de l’UFC (Union des Forces du Changement), est pour les deux semaines à venir à la tête de la Coalition des Forces Démocratiques (CFD), qui regroupe tous les partis d’opposition togolais et bénéficie d’une présidence tournante entre les différents chefs de partis. Il nous donne son avis sur la modification de l’article 59 de la Constitution qui permet au président Eyadéma de briguer un troisième mandat. Modification que l’UFC a qualifié de » coup de force « .
Afrik : Comment l’opposition a-t-elle réagi suite aux modifications apportées à la Constitution ?
Bob Akitani : Une dizaine d’articles ont été changés lors de ce toilettage. La Constitution en question datait de 1992 et c’était une Constitution nationale, adoptée par 92% de la population. Le plus grave reste la modification de l’article 59 qui permet au président de se représenter une troisième fois. C’est un malheur pour le Togo. Nous pensions que tout pouvait arriver, sauf ça.
Afrik : L’Accord-cadre de Lomé de 1999, censé mettre fin à dix ans de tensions politiques entre le gouvernement et l’opposition, est donc enterré ?
Bob Akitani : C’est une évidence. Le président a renié sa parole. Il avait promis des élections législatives anticipées pour mars 2000, ce qui n’a pas été respecté, mais surtout, il avait annoncé son retrait du pouvoir en 2003, à la fin de son deuxième mandat.
Afrik : Avez-vous prévu une riposte ?
Bob Akitani : Nous ne pouvons pas accepter cet état de fait, nous allons manifester notre mécontentement. Nous avons la majorité de la population derrière nous elle a les mains nues. Elle doit faire face à un pouvoir surarmé et est déterminée à ne pas se laisser écraser. Les partis d’opposition sauront trouver rapidement la stratégie à adopter et nous aurons l’occasion d’envoyer prochainement une mise en garde au chef de l’Etat.
Afrik : Le président Eyadéma soutient encore qu’il ne présentera pas en 2003…
Bob Akitani : Si c’est vraiment le cas, nous en prendrons acte mais ce n’est pas seulement sa personne qui est mise en cause. C’est un régime dictatorial que nous combattons. Si toutes les conditions sont réunies pour la tenue d’élections libres, transparentes et démocratiques, nous ne pourrons que saluer son départ. Car c’est qu’il aura laissé le peuple choisir son dirigeant.
Afrik : L’opposition n’a pas participé aux dernières législatives d’octobre, sera-t-elle en lice pour les présidentielles ?
Bob Akitani : Il est encore trop tôt pour vous répondre. Cela dépend des conditions qui seront réunies. Il va y avoir, dans les mois à venir, des prises de position qui pourront être déterminantes. Aucune date n’a été avancée pour le moment mais on parle déjà du mois de juin, comme en 1998.
Afrik : Suite à l’annonce des remaniements constitutionnels, y-a-t-il une tension particulière à Lomé ?
Bob Akitani : La tension existe même si elle n’est pas manifeste. La plupart de nos militants font partie du peuple profond et ils ont totalement désapprouvé ces modifications. Maintenant, ils sont sous le coup de la peur et de l’intimidation.
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