Le Président de la République Arabe Sahraouie Démocratique, Mohamed Abdelaziz exhorte les Nations Unies de mettre fin au statu quo. Sommée par les Sahraouis d’organiser un référendum d’autodétermination, l’organisation internationale se réunira à la fin du mois d’avril sur la question. L’envoyé spécial du secrétaire général de l’ONU, M. Peter Van Walsum, exposera devant le conseil de sécurité un rapport censé mettre un terme à trois décennies de contentieux.
Par Joan Tilouine
Un pas vers la reconnaissance de la République Arabe Sahraouie Démocratique (RASD) par les Nations Unies ? C’est ce qu’espère Mohamed Abdelaziz, le Président de l’Etat fantôme aujourd’hui annexé par le Maroc. À quelques semaines de la réunion du conseil de sécurité, le secrétaire général des Nations Unies, Kofi Annan avait reçu, le 3 février dernier à New York, M. Abdelaziz, qui avait alerté l’organisation internationale sur la gravité de la situation subie par le peuple sahraoui. Un casse tête diplomatique que n’a toujours pas réussi à résoudre l’ONU, qui tentera une énième sortie de crise à l’issue d’une réunion spéciale du Conseil de sécurité à la fin du mois.
« Les forces d’occupation se livrent à toutes sortes de violations des droits de l’homme, alors que la Minurso se trouve sur place et ne fait rien pour défendre et protéger les populations », a tempêté le chef de la RASD. Indigné, M. Abdelaziz a dénoncé le refus, pour la troisième fois, par le Maroc d’autoriser la commission des droits de l’homme de l’ONU à effectuer une visite dans les territoires, pour rendre compte des conditions de vie de la population. Il a fermement déclaré qu’il refusait que le rôle des Nations Unies » se limite à être le gardien de la répression marocaine ». Le chef de la RASD déplore ainsi le manque de « volonté politique » de l’instance internationale, qui ne reconnaît d’ailleurs toujours pas, à l’inverse de l’Union africaine, la République Arabe Sahraouie Démocratique comme un Etat souverain.
Le Royaume chérifien resserre l’étau
Le tête-à-tête entre M.Annan et le Président de la RASD du 3 mars dernier intervient dans une conjoncture tendue, suite à la visite du roi du Maroc, Mohamed VI, dans les territoires du Sahara occidental sous mainmise marocaine. La troisième depuis son intronisation en 1999. Les services de sécurité ont réduit au silence les manifestant sahraouis ‘’ rebelles » venus à Smara scander le droit à l’indépendance. Ces dernières semaines, les villes occupées du Sahara occidental ont été le terrain d’une nouvelle vague de violence. A Lâayoune, -chef lieu du Sahara occidental – à 500 Km au Sud d’Agadir, les forces armées de Rabat ont procédé à l’arrestation de plus de 40 militants sahraouis. Jugée « provocatrice », la visite du monarque ne fait que raviver les flammes d’un conflit sans fin, mais n’est en rien le fruit du hasard A l’approche de la réunion du conseil de sécurité sur la question sahraouie, le Roi entend bien démontrer les efforts entrepris dans la résolution du dilemme, et polir son image aux yeux de la communauté internationale.
Intransigeance de part et d’autre
La position du souverain marocain sur ce qu’il considère comme ses « provinces du Sud » reste toutefois claire et ferme. Peu de concessions. Le Sahara occidental est marocain et le restera. La proposition défendue par Rabat, dans le cadre de recherche d’une solution, réside en un « projet d’autonomie » pour la région et ses habitants. Dans son discours du 25 mars dernier, à Lâayoune, il a convié les Sahraouis à « engager une réflexion sereine et approfondie, et voir comment ils conçoivent le projet d’autonomie dans le cadre de la souveraineté du royaume, de son unité nationale ». Explicite. Le Maroc s’approprie ainsi le destin du Sahara occidental. Après avoir balayé le Plan Baker (proposé en 2003), feuille de route onusienne prévoyant la tenue d’un référendum d’autodétermination sous cinq ans, le Maroc en conserve les miettes. C’est-à-dire un projet d’autonomie de la région qui resterait sous contrôle du Royaume. L’autonomie se substitue à l’Indépendance qui, à l’heure actuelle, paraît peu envisageable. Pour sa part, la RASD reste attachée à la tenue d’un référendum démocratique, sous l’égide de l’ONU pour trancher le statut final de la dernière colonie africaine.
En dépit des atermoiements successifs, les Nations Unies, par le biais de son secrétaire général M.Annan, n’ont cessé d’affirmer leur attachement à la tenue dudit référendum, conformément à la législation internationale. Seulement voilà, sans cesse reporté, il n’a toujours pas pu aboutir. Le Royaume ne semble pas disposer à faire les efforts nécessaires à une avancée, et refuse toutes discussions avec la RASD. L’instance internationale peine, depuis trente années, à trouver une issue. Ce qui illustre bien ses limites quant à son pouvoir d’action. La tenue du référendum reste encore pour beaucoup chimérique. Le sommet de la fin du mois repoussera-t-il encore une fois l’échéance ou apporter-t-il une avancée significative dans le dossier ? Les Sahraouis croisent les doigts.