La cérémonie d’ouverture de la Conférence mondiale contre le racisme de l’ONU a débuté ce vendredi matin à Durban, en Afrique du Sud, sans la présence de la plupart des dirigeants occidentaux. La polémique sur le sionisme et la question des réparations financières pour l’esclavage minent cette conférence.
Yasser Arafat est là, Kofi Annan aussi. Fidel Castro et Abdelaziz Bouteflika, respectivement président de Cuba et de l’Algérie, étaient arrivés la veille de la Conférence mondiale contre le racisme à Durban, en Afrique du Sud. A ce jeu, qui est là ? ou plutôt qui n’est pas venu ? Il est très difficile d’apercevoir un dirigeant occidental. Depuis que le Secrétaire d’Etat américain Colin Powell a décidé de boycotter la Conférence, les annulations des dirigeants européens se sont succédées très vite à Durban. Seuls 14 chefs d’Etat ont fait le déplacement. Les 150 autres pays ont préféré envoyer des délégations.
Cette conférence, qui se tiendra jusqu’au 7 septembre, devra être marquée par la polémique sur le sionisme et sur les réparations financières de la traite esclavagiste. Colin Powell, qui a laissé entendre qu’il aurait bien voulu participer à cette conférence, s’était retiré la semaine dernière pour montrer la détermination des Etats-Unis à ne pas laisser assimiler le sionisme au racisme. « Nous ne participerons pas à une conférence qui essaierait d’isoler et de dénigrer Israël« , avait prévenu George W. Bush, vendredi dernier. Le Secrétaire d’Etat américain avait lui-même souffert de racisme dans sa jeunesse. Jeune lieutenant en Géorgie, il s’était vu interdire les toilettes communes à cause de la couleur de sa peau.
Le boycott américain
Certains dirigeants arabes voulaient une condamnation officielle des participants qui assimilerait le sionisme au racisme. Plusieurs ont manifesté aujourd’hui dans ce sens à Durban où l’Etat sud-africain a déployé 3 000 policiers pour éviter tout débordement. Les organisateurs de la conférence entendent aussi éviter que la question explosive du Moyen-Orient ne fasse l’objet d’une motion.
» C’est après énormément de réflexions que j’ai estimé qu’il n’était pas possible d’ignorer à Durban les souffrances des peuples du Proche-Orient. Parce que le peuple sud-africain, qui a combattu pour l’égalité des droits et son indépendance, s’identifie très fortement à la nécessité de se libérer d’une occupation. Pour moi aussi, en tant que représentante d’un pays qui a été colonisé, les mots d’autodétermination et d’indépendance ont une très forte résonance… Il est inacceptable de vouloir assimiler le sionisme à une forme de racisme « , explique Mary Robinson au quotidien Libération, l’ancienne présidente irlandaise devenue haut-commissaire des Nations Unies aux Droits de l’homme, qui a la délicate tâche de conduire les travaux de la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance.
Réparations financières
La question des réparations financières pose un grand problème aux pays occidentaux …et aux pays africains eux-mêmes. » le fait de demander des milliards de dollars en réparation est une insulte à nos morts, à notre race. (…) On ne peut pas effacer l’esclavage « , s’indigne président sénégalais, Abdoulaye Wade. Le président sud-africain, Thabo Mbeki, n’est pas loin de partager l’avis de son homologue sénégalais. Lors de son allocation à télévision, il a évité cette question épineuse.
Les Etats africains attendent des excuses pour l’esclavage mais les pays occidentaux se satisfont de remords ou de regrets. » Ce qui est important, c’est que la communauté internationale en tant que telle s’exprime de manière vigoureuse. Les mots de profonds regrets et de remords sont sans doute plus appropriés dans la mesure où les Etats, dans leur diversité et dans la singularité de leur histoire, s’exprimeront de manière commune. Les excuses sont sans doute préférables à des niveaux bilatéraux « , tranche l’ancienne présidente de l’Irlande.
Pour les Organisations non-gouvernementales, excuses, remords et regrets ne sont que des mots. Ils demandent des réparations financières pour les pays ayant souffert de la traite des Noirs. Les débats seront très vifs à Durban.