L’hymne à la Mère, par Driss Chraïbi


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La Civilisation, ma Mère

Naguib Arzel a voulu voir, dans cette évocation bouleversante de sensibilité du destin d’une mère, un message d’espoir dans le Maroc du nouveau siècle.

 » La Civilisation, ma Mère !  » est le roman bouleversant d’une éclosion retardée, la véritable naissance d’une femme marocaine, qui, avec l’aide de ses deux grands fils, petit à petit se libère des carcans sociaux, des préjugés, de l’ignorance, de l’aliénation conjugale, en découvrant l’écrit, le savoir, le monde extérieur qui existe autour de cette maison où elle est restée trop longtemps recluse, auprès d’un homme qui n’était ni méchant ni cruel, exprimant simplement un mode de vie ancré dans la tradition.

Elle qui mariée à douze ans n’avait pas mis les pieds dans la rue depuis son mariage, la voilà à trente ans confrontée à des nouveautés techniques, culturelles, politiques, qui transforment son existence et lui ouvrent de nouveaux horizons : la radio, le téléphone, le cinéma, puis la guerre… Chaque découverte est l’occasion de descriptions aussi drôles que tendres, les larmes viennent aux yeux, le sourire leur succède, l’émotion est à la fois dense et légère : une page se tourne devant nous entre le Maroc d’hier et le Maroc de demain.

Le style de Driss Chraïbi réussit ce tour de force : rendre palpables les sentiments, désarrois, enthousiasmes, fidélités, ruptures, sans jamais ennuyer, avec une immense humanité et un intense respect pour ces femmes qui prennent en main leur propre destin et celui des leurs, dans une société hostile, sans faillir ni faiblir.

Et c’est toute la mutation de la société marocaine que la mère du narrateur incarne à elle seule, malgré son mari, qui avoue enfin à son fils :  » Je me disais : ça lui passera…  » Avant d’ajouter : « Mais c’est elle qui m’a montré la voie. Quand elle entre maintenant dans cette maison, je me lève aussitôt, et ce n’est pas seulement une femme nouvelle que je vois devant moi, mais, à travers elle, un homme nouveau, une société nouvelle, un monde jeune et neuf « .

Ce monde jeune et neuf que le Maroc peut désormais devenir, en s’appuyant résolument sur tous les ferments d’évolution et de changement qu’il recèle, et en premier lieu ses femmes, dont le statut légal est en train de changer…

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