L’Algérie en héritage à l’Institut du monde arabe, à Paris. Ou l’occasion de plonger au cœur de la passionnante préhistoire algérienne, de redécouvrir l’Antiquité et de savourer la période post-hégirienne du pays. Un régal.
Il y a deux millions d’années, des hommes vivaient en Algérie. Ils chassaient et taillaient des galets (les premiers outils humains). Un million d’années plus tard, l’homme de Ternifine (ouhomo erectus) apparaît dans l’Atlas et développe la civilisation du biface. Vers – 100 000, l’Homo moustérien se sert de racloirs, de pointes, de grattoirs… Vers – 20 000, l’homme de Mechta-Afalou sculpte des bovidés et utilise l’ocre pour décorer son habitat. Le Capsien, vers – 8 000, maîtrise le feu, l’agriculture et la céramique.
Cette préhistoire en terre d’Algérie, si peu connue du public occidental, est enfin mise en valeur dans une remarquable exposition de l’Institut du monde arabe (Ima), L’Algérie en héritage. Des trésors conservés par le Sahara sont ainsi présentés à Paris dans le cadre de Djazaïr, une Année de l’Algérie en France. Quelque 300 pièces, extraites des collections nationales algériennes, retracent trois grandes périodes de l’histoire algérienne : la préhistoire (de l’Age de pierre au néolithique), l’Antiquité (des Numides aux Byzantins) et la période post-hégirienne (jusqu’à 1830).
Les bétyles, pierres sacrées de l’héritage algérien
« Le souhait de l’exposition, outre l’échange entre l’Algérie et la France, est aussi de maintenir le lien des immigrés de toute génération avec la culture de leur pays, tout en offrant aux publics français et européen l’occasion d’apprécier des œuvres qui, dans leur grande majorité, sortent pour la première fois des musées dans lesquels elles sont conservées », explique Nadjib Ferhat le commissaire scientifique de l’exposition.
De la première période, on note des peintures rupestres d’une grande finesse et des sculptures zoomorphes étonnantes, les bétyles. Ces pierres sacrées, levées et hautes de 40 à 60 cm, représentent des têtes humaines très stylisées, comme effleurées sur la pierre. Trouvées au Tassili Azjer, elles dateraient de la période bovidienne (les trois derniers millénaires avant notre ère) et étaient encore vénérées par certains Touaregs au début du XXè siècle.
Déesse africaine
La période antique (du Vè siècle avant J-C au VIè siècle après J-C) livre quant à elle des influences grecques et romaines qui se retrouvent sur des céramiques et des mosaïques d’une grande richesse. On y découvre aussi différentes représentations de l’Afrique divinisée à la tête couverte de la dépouille d’un éléphant. La déesse africaine est popularisée en Numidie et en Maurétanie antique à partir du Ier siècle avant J-C et commence à désigner l’Afrique sur les monnaies des Massyles, puis en Numidie sur les monnaies de Juba II.
Enfin, l’exposition se termine par la conquête arabe et le développement de l’islam (de 700 à 1830), marqués par des mobiliers en bois peint de style arabo-musulman, des tissus d’ameublement associant lin et fils de soie, d’or et d’argent, des plafonds décorés, des ustensiles en bronze et des bijoux subtils. L’exposition permet de comprendre la façon dont les différentes civilisations se sont succédées et enrichies en Algérie. Afin de pousser un peu plus la connaissance, un superbe catalogue a été édité par les éditions Actes Sud et l’Ima qui ont su associer leurs talents. Une lecture érudite qui prolongera un peu L’Algérie en héritage.
L’Algérie en héritage, jusqu’au 25 janvier 2004 à l’Institut du monde arabe, 1, rue des Fossés-Saint-Bernard – Place Mohammed-V, 75005 Paris. De 10h à 18h, du mardi au vendredi. De 10h à 19h les week-ends et jours fériés. (00 33) 1 40 51 38 38.