Fait sans précédent, tous les candidats aux élections présidentielles algériennes ont exprimé leurs doutes face à l’estimation du taux de participation avancé confusément par le Président de l’Autorité Nationale Indépendante des Elections, Mohamed Charfi.
Si Abdelmadjid Tebboune a largement remporté l’élection présidentielle du 7 septembre 2024 en Algérie avec 94,65 % des voix, ce dont personne ne doute, la question du taux de participation à l’élection fait, elle, ouvertement débat, et c’est pourquoi les trois candidats ont, ensemble, dénoncé dès dimanche 8 septembre, dans un communiqué commun, des « incohérences majeures » dans les résultats provisoires du scrutin présidentiel du 7 septembre exprimés par l’Autorité nationale indépendante des élections (ANIE).
Selon les chiffres publiés, Abdelmadjid Tebboune a obtenu 5329253 voix, soit 94,65 % des suffrages exprimés. Abdelaali Hassani Cherif du Mouvement de la société pour la paix (MSP), un parti islamiste, a été crédité de 178797 voix (3,17 %) et Youcef Aouchiche, du Front des forces socialistes de 122146 voix (2,16 %). Au total, cela fait donc 5630196 suffrages exprimés…
Si l’on considère que le corps électoral algérien compte 24 351 551 électeurs, ce qui n’est pas aujourd’hui contesté, alors les 5 630 196 suffrages exprimés au total donnent un taux de participation d’un peu moins de 25%. Ce qui n’est pas très élevé, même dans un pays où les élections présidentielles affichent habituellement entre 30 et 40% de taux de participation.
« La moyenne des willayas » : un mode de calcul baroque!
Difficile alors d’annoncer, comme l’a fait le Président de l’ANIE, que ce même taux de participation s’est élevé à… 48,03%. Comment s’explique ce résultat? Mohamed Charfi l’a calculé en établissant la moyenne des taux de participation dans les différentes wilayas (préfectures)… Un mode de calcul innovant et déroutant, qui permettait un affichage qu’il croyait astucieux : les élections présidentielles auraient eues l’un des meilleurs taux de participation des dernières décennies !
Mais l’astuce du Président de l’ANIE était un peu grosse, et a provoqué une belle confusion : alors qu’il se félicitait de la transparence du scrutin, lui-même tentait de soulever un rideau de fumée sur le taux de participation, pourtant aisé à calculer !
Et l’on comprend la fureur du candidat Abdelmadjid Tebboune, le soir même de l’annonce de sa large réélection, face à une manipulation des chiffres de participation qui teintait d’incertitude tout le processus électoral jusque là magnifiquement maîtrisé. A vouloir trop bien faire, le moins que l’on puisse dire est que Mohamed Charfi s’est pris les pieds dans le tapis.