L’écologie n’est pas une coquetterie du Nord. L’actuelle marée noire qui s’étend sur le littoral algérois vient nous le rappeler avec vigueur. Encore que le naufrage, vendredi dernier, du cargo battant pavillon Saint-Vincent au large des côtes de Tipaza, soit complètement occulté par les nappes de fuel du Prestige qui continuent de souiller les plages espagnoles et françaises. Occulté pour tous, sauf pour les Algériens qui découvrent le sens du mot mazoutage.
L’écologie en Afrique en est encore à ses balbutiements. Et d’aucun pense que le continent a bien d’autres priorités plus urgentes à traiter. L’alphabétisation, la lutte contre le sida sont indiscutablement des causes impérieuses, mais il existe une menace plus sournoise et tout aussi dangereuse : la pollution. Pas celle, spectaculaire, d’une marée noire, dont les effets sont directement palpables, mais bien plutôt la pollution atmosphérique.
Les émissions de gaz dans l’atmosphère, la couche d’ozone qui se réduit comme une peau de chagrin sont des considérations étrangères à l’Afrique, qui n’a jamais même vu la couleur d’un pot catalytique. L’Afrique s’en fiche. A l’image des embouteillages monstres et de l’extraordinaire pollution du Caire (Egypte), à l’image de l’air saturé du gaz d’échappement des zémindjans (motos-taxi) à Cotonou (Bénin).
Ce ne sont malheureusement pas les ravages silencieux des maladies pulmonaires et la détérioration de la qualité de la vie qui feront prendre conscience du péril aux fils du continent, résignés à subir la pollution avec un déterminisme aveugle, inconscients de leurs propres responsabilités et de leurs égoïsmes. La faute à qui ? Plus aux pouvoirs publics qu’à la population. Car il ne peut y avoir ici de conscience populaire sans conscience politique.
Ce n’est sans doute que lorsque les pyramides d’Egypte commenceront à partir en poussière, rongées par la pollution, ou qu’un touriste asthmatique occidental s’écroulera asphyxié dans les rues de Cotonou que nous verrons surgir l’embryon d’une quelconque politique écologique. Il sera déjà peut-être trop tard.