L’Education nationale ivoirienne introduit les langues maternelles dans l’enseignement pour faciliter l’apprentissage scolaire en milieu rural.
Le constat fait suite aux travaux d’une organisation non gouvernementale (ONG) : apprendre dans sa langue maternelle facilite l’acquisition des compétences. L’Education nationale ivoirienne développe aujourd’hui une initiative d’envergure en ce sens. L’enseignement, conjointement au français, de 10 des 60 langues du pays. Le projet » école intégrée » introduit également une formation agro-pastorale pour les élèves ainsi qu’un volet d’alphabétisation pour les parents
M Edouard Sery, chef de la cellule en charge du projet au sein du ministère de l’Education nationale, revient sur les fondements et la structure de l’opération.
Afrik.com : Est ce que cette initiative d’enseignement des langues maternelles vise à retrouver une certaine identité ivoirienne ?
E.S : Non, ce n’est pas sur ce plan là qu’il faut raisonner. La question de l’identité est une question qui intéresse avant tout les politiques. Il ne faut pas oublier que l’initiative dépend de l’Education nationale. Nous nous situons plutôt du côté des pédagogues. Pour nous, l’enseignement des langues maternelles est un facteur clef qui facilite l’acquisition des connaissances. La chose n’a rien d’empirique. L’engagement du ministère fait suite aux travaux menés avec succès depuis 1997 par une organisation non gouvernementale (l’ONG Savane ndlr).
Afrik : Pourquoi le projet s’adresse t-il uniquement à des populations rurales ?
E.S : Dans le pays, la langue officielle est le français. Mais dans les milieux ruraux, les gens s’expriment essentiellement dans leur langue maternelle. Ce qui fait que l’école se trouve en rupture avec les villages. Les élèves doivent véritablement faire un effort de compréhension pour suivre les cours en français, eux qui ne le parlent pas en dehors de la classe. Dans les villes, au contraire, tout le monde parle français.
Afrik : Pourquoi avoir appelé le projet » école intégrée « ?
E.S : Le projet comporte trois axes distincts et complémentaires. Un volet linguistique scolaire, une formation agro-pastorale pour les élèves et une partie alphabétisation des parents.
Du pré-scolaire au CE1, les cours se feront exclusivement dans la langue maternelle des élèves. Elle sera leur langue d’apprentissage. Il leur est plus facile de suivre et de participer à des cours où ils comprennent sans difficulté ce que l’enseignant raconte. C’est à partir du CE1 qu’on introduira le français à l’écrit.
Les études montrent que les élèves réussissent largement mieux lorsqu’ils sont suivis par leurs parents. C’est pourquoi nous portons un intérêt majeur à l’alphabétisation des parents.
La formation agro-pastorale est le troisième volet du programme. Un volet très important à nos yeux car elle redonne du sens à l’école. Cette initiation pré-professionnelle permettra aux élèves de quitter plus ou moins tôt le circuit scolaire tout en ayant un réel bagage avec eux. Elle leur permettra également de prendre conscience de la valeur de leur terre et de ce qu’il est possible de faire sur place. Bien souvent malheureusement, les jeunes succombent aux sirènes de la ville et quittent les campagnes et même souvent le pays.