L’attentat contre le journal français « Charlie Hebdo » a fait douze morts. Un évènement qui a ému le monde entier. En Afrique, les journalistes aussi ont été nombreux à avoir réagi suite à cette sanglante attaque. D’autant que le continent est de plus en plus confronté au terrorisme avec des groupes sanguinaires tel que Boko Haram, qui continue à tuer des milliers de personnes au Nigeria. Ils se sont confiés à AFRIK.COM. Tour d’horizon.
Ama Coronthie, journaliste de Guinée Time, à Conakry
« L’attentat de Charlie Hebdo est horrible. C’est une bêtise humaine.
Je crois que les frères Kouachi sont victimes de ceux qui les financent…Ils n’ont rien à avoir avec l’islam, une religion de paix et de tolérance. Ce sont des esprits faibles qui sont manipulés. Et c’est contre les commanditaires de ces attentats que doivent être faites des caricatures et non le Prophète Mahomet que revendiquent des milliards de personnes dans le monde ».
Sorry Ibrahim Maiga, journaliste indépendant, Mali
« Je trouve regrettable que la jeunesse, au 21ème siècle, soit une proie facile pour les djihadistes. Par ailleurs je trouve irresponsable et injustifié les caricatures humiliante du Prophète. Liberté d’expression oui, mais respect pour la croyance et la religion des autres. Je ne suis pas Charlie tout comme je ne suis pas Amedy Coulibaly ou les frères Kouachi.»
« On devrait répondre comme Jésus l’a dit, donner l’autre joue »
Winnie Kanau, journaliste web indépendante, Kenya
« Ce qui c’est passé est triste, cet acte rend les journalistes vulnérables. Ceci ne devrait pas se passer à l’époque à laquelle nous vivons. La tolérance au niveau religieux est quelque chose que nous devrions tous avoir. Quand ils commettent ce genre d’actes on devrait répondre comme Jésus l’a dit, donner l’autre joue. Etre tolérant à l’égard de chacun comme l’a dit Mahatma Gandhi, et si on devrait rendre le mal par le mal, par exemple rendre borgne la personne qui nous a éborgné, cela rendrait le monde entier aveugle. »
Yves Assengone, journaliste à l’Agence Gabonaise de Presse
« Je crois qu’il faut un minimum de respect pour la religion des autres. La liberté d’expression n’est pas synonyme de libertinage. De même nous devons condamner la barbarie des terroristes. Le journaliste ne doit pas tout dire. La liberté absolue d’expression est une illusion et le carnage de Charlie Hebdo doit permettre aux journalistes de réfléchir sur la responsabilité de leur mission. »
« Arrêtons la sur-médiatisation de cet évènement, combien de personnes ont été tuées par Boko Haram »
Emile Mbourou, journaliste chez Courrier de l’Education, Gabon
« Tout d’abord je voudrais adresser les condoléances aux familles des
victimes. Mais j’ai envie de dire que nous devons arrêter la
sur-médiatisation de cet événement. Combien de personnes Boko Haram a déjà tué au Nigeria et au Cameroun? Combien de personnes meurent chaque année en Afrique en raison de la malnutrition et de la faim ? Il faut organiser également des marches pour toutes les victimes de la faim et de la misère dans les capitales africaines. Les journalistes Africains doivent aider la communauté internationale à s’intéresser du continent. »
Hamza, journaliste d’un quotidien arabophone, à Alger
« La France a mené toute une stratégie sécuritaire sur son sol et à l’extérieure de son territoire dans les zones où elle estimait être menacée par le terrorisme. Après cela, on a assisté à une attaque terroriste au cœur de Paris, en pleine journée. Face à ces évènements, je pense qu’il y a quelque chose d’étrange et que l’on doit avoir deux lectures de la situation :
1- Il y a une grande faillite sécuritaire des services secrets français.
2- Ces services secrets ont déjà été prévenus qu’une attaque était prévue, mais ils ont fermé les yeux pour des raisons liés à des intérêts non dits ouvertement ».
« En Algérie, les 200 000 morts sont des musulmans, donc le terrorisme n’a pas de frontières »
Kaci Racelma, journaliste indépendant, Algérie
« L’attentat de Charlie Hebdo est regrettable à plus d’un titre et
tous les musulmans en dénoncent les motivations. La violence nous la refusons quels qu’en soient les mobiles. Mais nous devons aussi dénoncer ceux qui font de l’amalgame. Il ne faut pas confondre islam et terrorisme. En Algérie, les 200 000 morts sont des musulmans, donc le terrorisme n’a pas de frontières ».
« Un crime contre l’humanité ! »
François Fanou, journaliste de Soleil FM à Porto Novo, Bénin
« La tuerie à Charlie Hebdo est un crime contre l’humanité. C’était un journal qui souriait au quotidien. On riait à pleines dents en le lisant. Le fait que les djihadistes s’en prennent à eux, c’est horrible. Pour nous qui sommes journalistes, c’est inquiétant parce que ça veut dire que si on commet une petite erreur, on peut vivre aussi ce genre de situation. On ne peut pas tolérer ça dans une République qui se respecte. Après avoir appris la nouvelle j’étais très abattu. Cette tuerie va faire que l’immigration sera davantage difficile, car quand on voit l’origine des tueurs, ce sont des Algériens. Les Africains qui tentent de se rendre en Europe risquent d’être encore plus stigmatisés. C’est une situation vraiment difficile. Elle met en doute la notion de tolérance de l’islam, quand on voit ce qu’ils ont fait.
« C’est une abomination, c’est affreux, c’est abject ! »
Seyre Sidibe, journaliste d’une radio locale à Nouakchott, Mauritanie
« C’est une situation très inconfortable pour moi, en tant que journaliste de confession musulmane. Je tiens avec vigueur à la liberté d’expression, principe fondateur de l’État de droit et sans lequel l’on ne peut envisager le droit à l’information, ce qui représente une menace certaine pour notre profession. Je suis pour la satire, l’humour et même la caricature. Mais pour moi, le sacré doit être épargné parce que fragile et objet parfois de dérive. En effet, commandé souvent par l’esprit dogmatique. Mais je ne cautionne pas du tout le meurtre des journalistes de Charlie. C’est une abomination. C’est affreux et abject. Il n’est pas donné à un homme d’ôter la vie à un autre. A Dieu de faire justice. Telle est ma position ! C’est un véritable crime contre l’humanité ».
« Les chefs d’Etat africains n’avaient rien à faire à la marche républicaine ! »
Malick Sylla, journaliste économiste à l’Agence de presse africaine, Sénégal
« ?Je condamne l’attaque contre les journalistes de Charlie Hebdo. Mais il faut dire aussi que Charlie Hebdo n’est pas exempt de reproches. On prône tous la liberté d’expression, vertu de notre siècle, c’est indéniable. Partout dans le monde, on défend la démocratie et la liberté. Mais on ne peut pas atteindre les gens dans leur religion, leurs croyances, quand on touche à ces éléments sacrés, il faut s’attendre à un retour du bâton. Autant je condamne l’attentat terroriste, qui ne correspond pas du tout à l’islam qui prône la paix, la tolérance, le vivre-ensemble, autant je pense qu’il faut bannir ce genre de caricatures qui blessent tout une communauté. Mais ce qui est aussi déplorable, c’est la présence des Présidents africains qui n’avaient pas leur place dans la marche républicaine. L’attentat de Charlie Hebdo a fait douze morts, c’est tragique, mais pourquoi ils ne manifestent pas aussi contre Boko Haram qui continue de massacrer des populations entières. De même le déplacement de Macky Sall n’est pas opportun. Qu’est-ce qu’il est parti faire là-bas, alors qu’il a tant à faire au Sénégal. Les gens sont pauvres et attendent des changements dans leur vie de plus en plus rude. Les chefs d’Etat africains font des courbettes parce que ça touche la France. On est toujours dans l’air du néo-colonialisme. Ne nous trompons pas, la France intervient militairement en Afrique pour ses ressources naturelles. Elle a liquidé Kadhafi, ce qui a créé le chaos dans toute la sous-région. Comme le disait le général de Gaulle, les Etats n’ont pas d’amis mais que des intérêts ».