La victoire du Partido Popular aux élections espagnoles du 20 novembre ne réjouit pas le royaume chérifien. Le retour de la droite espagnole, longtemps ennemi de Rabat, au palais de la Moncloa pourrait compliquer les relations bilatérales de l’Espagne et du Maroc et faire resurgir de vieux conflits. Au lendemain de l’annonce des résultats, plusieurs journaux marocains, tels que les quotidiens Aufaitmaroc ou Demainonline, publiaient un article d’agence intitulé « Le PP est de retour ! »
La précédente législature de la droite espagnole a laissé le souvenir de moments de haute tension. Le Partido Popular (PP), dirigé à l’époque par José Maria Aznar, n’avait pas ménagé ses relations diplomatiques avec son voisin marocain, qu’il ne considérait pas comme un partenaire prioritaire. Différentes prises de position du gouvernement espagnol, comme lors de la crise de l’ilot de Leila en juillet 2002 ou le survol par des avions de chasse espagnols de Nador en février 2004, avaient failli déboucher sur des conflits armés.
Bien que Mariano Rajoy, prochain chef du gouvernement espagnol, ne soit pas Aznar, il a lui aussi provoqué l’indignation de la société marocaine. En septembre 2010, il s’est rendu à Melilla pour soutenir le président du gouvernement local à l’occasion du 513ème anniversaire de l’occupation de l’enclave espagnole située au nord de la ville de Nador. L’ex-Premier ministre marocain, Abbas El Fassi, avait alors critiqué cette visite qui blessait « le sentiment national marocain ». Des millions de citoyens marocains avaient manifesté contre Rajoy et le PP à Casablanca.
L’heure est à la prudence
Conscient de l’importante amitié hispano-marocaine, Mohamed VI a félicité le leader du PP dès sa victoire aux législatives et lui a exprimé son désir de renforcer les relations de solidarité et de bon voisinage existantes entre les deux pays. Le communiqué de presse rappelle tout de même l’importance que le Maroc porte au respect de « l’unité territoriale des Etats et de leurs constantes nationales ».
Du côté de la péninsule ibérique, le futur gouvernement a annoncé qu’il changerait la politique extérieure menée jusque-là par le Partido Socialista Obrero Español (PSOE). Mais le Maroc ne semble pas être l’un de ses objectifs prioritaires. L’Espagne doit déjà faire face aux problèmes nationaux, trouver une solution pour sortir le pays de la crise économique et faire reculer le chômage qui a atteint 21,6%, son plus haut niveau depuis 1996.
Il est difficile d’anticiper la position qu’adoptera le Partido Popular à propos des divergences d’intérêt susceptibles d’engendrer de nouvelles tensions entre les deux pays. Mariano Rajoy devra gérer ces conflits historiques en considérant le contexte international actuel. Comme beaucoup d’autres gouvernements, il devra réajuster sa politique extérieure aux nouvelles réalités créées par le printemps arabe et l’arrivée au pouvoir des partis islamistes dans les pays du Maghreb.