Les premiers soldats ougandais à quitter l’Ituri ont été sifflés et hués jeudi dernier par la foule dans la ville de Bunia, capitale du district. Les militaires de la Monuc et les policiers congolais venus les remplacer pour assurer la stabilité dans la région ont au contraire été fortement applaudis.
Jeudi, 24 avril 2003, les troupes ougandaises ont fait le tour de la ville Bunia, capitale du district de l’Ituri dans l’extrême nord-est de la république démocratique du Congo, en guise d’adieu. Des chars, des transports de troupes, des fantassins ont battu ce qui reste de l’asphalte sur l’artère principale de la ville, l’ex-avenue Maréchal Mobutu. Pour la dernière fois. Des mains timides saluaient la foule incrédule. Le séjour des soldats ougandais en Ituri est synonyme tueries et de violences corporelles sans égal. Ce qui explique les huées et les sifflets dans la foule au dernier défiler du corps expéditionnaire ougandais dans la ville de Bunia.
» Nous n’y croyions plus et nous demandions ce que nous avions pu faire au bon Dieu pour mériter ce sort, confie à Afrik.com, Nziwa Paluku, un jeune commerçant. Jadis une luxuriante ville commerciale où se vendaient indifféremment les pépites d’or de Kilo-Moto, le poissons du lac Albert et le bouc des grands élevages de l’Ituri, Bunia est devenu lugubre et morne où ne circulent plus que des véhicules militaires. Où la seule musique que l’on peut entendre vient des orgues de Staline. Le 24 avril 2003 fera sûrement date dans l’histoire de l’Ituri. » Pourvu que ce départ soit le bon « , ajoute Nziwa Paluku. En effet, les troupes ougandaises avaient déjà entamé des semblants de départ à quatre reprises. Mais chaque fois que le départ était annoncé, il y avait toujours des crépitements de balles pour témoigner d’un climat d’insécurité et justifier le report de leur rapatriement.
La famille Musevini sur la sellette
» Il y a beaucoup d’intérêts ougandais dans la région « , explique Gaudens Bilo, fonctionnaire. L’Ituri constitue la poule aux oeufs d’or pour l’armée ougandaise, en commençant par la famille présidentielle. » Le Groupe Victoria, entreprise du jeune frère de Yoweri Museveni, chef de l’Etat ougandais, pour ne citer que lui, exploite abondamment l’or, le diamant et le bois de l’Ituri. Pour rien au monde, il voudra quitter la région. Il n’est même pas sûr qu’il se sente concerné par ce mouvement de départ des troupes ougandaises « .
Près de 500 soldats ont prit la route vers la frontière ougandaise. L’opération durera deux à trois semaines, selon le colonel Kale Kayiura, le commandant de toutes les opérations militaires ougandaises au Congo. Le temps d’évacuer les 7 000 militaires disséminés à travers l’Ituri. En attendant, ce sont les militaires de la Monuc (Mission des Nations Unies en République Démocratique du Congo) qui vont désormais assurer la relève. Deux cent Uruguayens se trouvent déjà à Bunia, depuis mercredi dernier. Ils ont procédé à la passation des commandements sur l’aéroport de la ville. Jeudi 24, ils ont été rejoints par 200 policiers congolais appartenant à l’unité » Intervention rapide « , frais émoulue des écoles de formation angolaises.
La Monuc ovationnée
Après les soldats ougandais, les troupes de l’Onu et les policiers congolais ont, eux aussi, fait le tour de la ville, pour rassurer la population. Ils ont été accueillis par des ovations. » L’arrivée des policiers ici à Bunia, a déclaré le général Kisempia, commandant des troupes, à la population de Bunia, est le premier signe tangible de la réunification du pays « . » Ils sont deux cent aujourd’hui, bientôt, ils seront plusieurs milliers. Ils ont pour tâche de maintenir l’ordre, de prévenir d’autres affrontements interethniques dans tout le district de l’Ituri et de décourager les différentes milices de nuire à la population ».
Le retrait des troupes ougandaises tout comme l’arrivée des troupes de l’Onu et des
policiers congolais est le résultat des souhaits exprimés par la population de l’Ituri au cours de la conférence de pacification de l’Ituri qui a terminé ses travaux à Bunia, fin mars 2003. Les derniers affrontements entre tribus hema et lendu ont coûté la vie à près d’un millier de personnes dans le village de Drodro et aux alentours. Les enquêtes sont en cours afin de déterminer les raisons des tueries et d’établir les différentes responsabilités.