L’armée égyptienne ne pourra désormais plus pratiquer « les tests de virginité » sur les femmes interpellées. Cette décision a été rendue mardi par la Cour administrative du Caire suite à une plainte déposée par une jeune militante, Samira Ibrahim Mohammed, qui a été soumise à cette pratique après avoir été arrêtée le 9 mars alors qu’elle manifestait sur la place Tahrir.
Humiliée après avoir humiliée des dizaines de jeunes filles. L’armée égyptienne vient d’être prise à son propre jeu. Elle se voit interdite par la Cour administratives du Caire, qui a rendu sa décision mardi, de pratiquer des « tests de virginité » sur les femmes interpellées.
Cette décision survient après une plainte déposée contre le Conseil militaire par une militante égyptienne de 25 ans, Samira Ibrahim Mohammed, qui est l’une des victimes de cette pratique. C’est au nom de toutes les femmes égyptiennes qu’elle a décidé de porter son cas devant la justice, a-t-elle confié au quotidien Libération. « Si je me tais, je donne raison à l’armée. On ne peut plus accepter ça », clame-t-elle. L’audience a d’abord été ajournée une première fois, le 29 novembre, avant d’être fixée à mardi. Cette décision, une première dans ce genre d’affaire en Egypte, a été saluée par des cris de joie et des applaudissements de la part de dizaines de partisans de la plaignante venus assister au jugement, comme on peut le voir sur une vidéo d’Al-Jazeera. « C’est une bonne nouvelle. Nous attendons maintenant une décision de la Cour sur les indemnités », a déclaré Hossam Baghat, responsable de l’ONG Initiative égyptienne pour les droits de la personne.
L’humiliation d’être déshabillée devant des hommes
Ces interminables journées passés dans une prison militaire du Caire, Samira Ibrahim Mohammed ne veut plus se les remémorer, selon Libération. Le cauchemar de la jeune femme débute le 9 mars, au lendemain de la journée internationale de la femme. Elle est interpellée avec 17 autres de ses compatriotes alors qu’elle manifeste sur la place Tahrir. La jeune femme, accusée de vandalisme et d’insultes à un représentant des forces de l’ordre, a été incarcérée durant quatre jours avant d’être auditionnée au tribunal militaire. Elle raconte dans une vidéo enregistrée par l’ organisation internationale Human Right watch « l’humiliation d’être déshabillée devant les hommes » et surtout son « examen de cinq minutes au cours duquel un officier s’est livré à une pénétration digitale avant de confirmer qu’elle était toujours une jeune fille ».
Les ONG mobilisées contre cette pratique
Les organisations égyptiennes et internationales de défenses des droits de l’homme ont été nombreuses à être montées au créneau contre cette pratique, en particulier Amnesty International et Human Right Watch. Elles ont dénoncé les « tests de virginité » comme une forme de « torture et de violence sexuelle ».
Amnesty international a lancé la polémique fin mai suite à la justification de ces pratiques par un haut gradé de l’armée égyptienne sur la chaîne d’information américaine CNN. « Nous ne voulions pas qu’elles aillent dire qu’on les a abusées sexuellement ou violées, donc nous avons voulu prouver qu’elles n’étaient déjà plus vierges », a déclaré ce Général sous couvert d’anonymat. « Les filles détenues n’étaient pas comme votre fille ou la mienne. C’étaient des filles qui avaient campé dans des tentes avec des manifestants sur la place Tahrir et nous avons trouvé dans les tentes des cocktails Molotov et de la drogue », a-t-il ajouté.
L’image de l’armée égyptienne ternie
Pour redorer son image ternie par ces pratiques décriées par le monde entier, l’armée s’était engagée auprès d’ONG à ne plus y avoir recours, sans toutefois les renier dans ses principes. Le chef de la justice militaire, Adel Mursi, a assuré ce mardi que la décision de la Cour administrative « était inapplicable car il n’y avait absolument aucun ordre de procéder à ces tests » dans les prisons militaires. « Si cela se produit, cela relève d’un acte personnel, passible d’une enquête criminelle », a-t-il ajouté.
Ces mesures suffiront-elles à sauver la réputation de l’armée ? Depuis la chute du régime d’Hosni Moubarak, les militaires ont multiplié les procès de civils, les arrestations arbitraires de militants, de blogueurs et les répressions meurtrières lors de manifestations. Pas plus tard que la semaine dernière, l’armée a dû présenter ses excuses après la diffusion sur internet d’images montrant des soldats battant des manifestantes, traînant au sol l’une d’elles, dont les vêtements relevés dévoilaient son soutien-gorge. Ces images ont profondément choqué en Egypte mais aussi partout dans le monde. Plusieurs pays ont dénoncé les violences commises par les forces de l’ordre, à l’encontre des manifestantes.
L’armée égyptienne acclamée par la foule lors du soulèvement populaire contre le régime d’Hosni Moubarak est désormais considérée comme le principal ennemi des militants pro-démocratie. De la lune de miel, l’armée égyptienne est passée à la lune de fiel avec le peuple d’Egypte.
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