« J’irai chercher ceux qui restent, quoi qu’ils aient
fait », déclarait le président de la République
française, son Excellence monsieur Nicolas Sarkozy,
ancien avocat de profession, à son retour le 6
novembre 2007 d’un voyage express au Tchad afin de
faire libérer les journalistes qui accompagnaient ceux
que la presse française appellent « les Pieds nickelés
de l’humanitaire ».
Cette déclaration est un bel éloge de la culture de
l’impunité… Le Droit est mort. Tout est permis. Le
Devoir ou le Droit d’ingérence (au choix) devient un
devoir d’indigence sur le Continent noir : celui de «
l’Homme Africain » (discours de Dakar).
Avec de
tels propos, on est à des années lumières du Siècle
des Lumières. On bascule dans l’univers du beau roman
de Conrad Au Cœur des Ténèbres. C’est L’Etat
sauvage[[Titre d’un livre et d’un film]] et non l’Etat de droit. L’impunité devient
la règle. Les conventions internationales régissant la
protection de l’enfance ne sont au mieux que des
torchons, au pire des chiffons de papiers. L’Unicef
n’est qu’un petit « machin » du grand « machin », l’ONU.
Bref, au nom de l’humanitaire, on peut commettre des
crimes et des délits condamnés par le droit français,
européen, tchadien et la législation internationale.
Au nom de l’humanitaire, quiconque peut s’affranchir
de toute règle juridique en vigueur et de toute
exigence éthique. Seul compterait la soi-disant
compassion de la horde de L’Arche de Zoé pour les
orphelins du Darfour. Certes, ce conflit a fait près de 250 000 personnes. Certes, il y a eu plus de 400 000
personnes déplacées. Certes, des viols à grande
échelle, des crimes sexuels de masse contre des
fillettes, des femmes et des grand-mères, qui sont
autant de crimes de guerre et crimes contre l’humanité
tels que les définit les Conventions de Genève de 1949.
Mais il faut aussi rappeler qu’il y a plus de 10 000
humanitaires dans cette zone de conflit.
Du « devoir d’ingérence » au
devoir d’indigence
Plus tragiquement, les dérives de la « charité
business » viennent de loin. La faillite de
l’humanitaire, en tout cas d’une certaine conception
de celle-ci, était prévisible, voire programmée. En
effet, dès décembre 1991, Rony Brauman, alors
président de Médecins sans frontières, dans un article
intitulé Contre l’humanitarisme publié dans la revue
Esprit, lançait ce cri d’alarme : « …que l’homme ne
peut être réduit à ses souffrances, et un peuple à une
masse d’ayant droits… ». A lire les propos des
baroudeurs de l’Arche de Zoé, il semble que le groupe
soit « prisonnier d’un cadre, d’une vision sociale du
monde dans lesquels l’homme est avant tout défini par
ses besoins et ses souffrances… » (Rony Brauman). On
est dans l’humanitarisme contre l’humanitaire ! S’il
n’y a pas de victimes, il faut les inventer. S’il n’y
a pas d’orphelins, il faut les fabriquer. Enfin,
s’il n’y a pas de pauvreté et de maladie, il faut les
créer. D’où les faux pansements et bandages sur les
103 enfants. C’est l’un des multiples stratagèmes
usés par les membres de l’équipée sauvage de l’Arche de Zoé pour
sauver les enfants du Darfour d’un génocide en cour. Ils
prétendaient procéder à l’évacuation d’enfants orphelins
du Darfour, part conséquent soudanais, ils procèdent
au rapt de 103 enfants non orphelins tchadiens.
Le Darfour, c’est aussi l’attrape-
nigaud, l’accroche, disent les publicitaires de leur
campagne, pour « appâter » les familles françaises en
détresse qui souhaitaient adopter des enfants
orphelins du Darfour. L’association jongle
systématiquement entre l’accueil et l’adoption par des
familles françaises. L’ambiguïté est la posture de
l’Arche de Zoé. Le Darfour est au cœur de leur
marketing humanitaire. Cette tragédie humaine est
instrumentalisée afin d’atteindre le cœur de leur
cible : les familles en quête de progéniture.
Dans leurs pérégrinations à travers la France, les
responsables de l’Arche de Zoé découvrent que
l’adoption peut être un énorme marché porteur. Aussi
clament-ils pour mieux vendre leur opération qu’ils
veulent ni plus ni moins que « transférer 10 000
enfants du Darfour vers l’Europe et les Etat-Unis,
dont 1 000 en France ». Très beau slogan !
« L’Humanitaire » contre l’Afrique
On baigne dans le règne du faux. L’Arche de Zoé change de
dénomination au Tchad, il devient « Children Rescue ». Ce
qui permet de brouiller les pistes. Les autorités
françaises et tchadiennes n’y voient que du feu, le
Boeing 757 de la compagnie de charter espagnole Girjet
devient un avion de nationalité islandaise,
évocation d’un soutien de l’Elysée à travers Cécilia, alors épouse Sarkozy ; plus cocasse est le
déguisement en tenue de sapeurs-pompiers français,
accoutrement qui leur permettra de tromper la
vigilance des militaires de l’Opération Epervier basés
au Tchad … Enfin, il y a une totale opacité sur le financement de
l’opération dont le coût est estimé à 550 000 euros !
Faut-il rappeler que l’Arche de Zoé est née lors du
tsunami en Indonésie en 2005 ? Catastrophe naturelle
qui suscita une ferveur mondiale considérable. Médecins sans frontières, par exemple, récolta en huit
jours plus de 40 millions dont 5 millions pour sa seule
section française. Face à cet afflux de dons et de
fonds, MSF décida alors de suspendre la réception de dons
pour le tsunami. Ce qui provoqua l’ire d’autres ONG
humanitaires. Pierre Salignon, directeur général de MSF,
expliqua alors : « nous sommes une ONG médicale et ne
pouvons nous improviser spécialiste de la
reconstruction. Nous n’en avons ni les compétences, ni
les capacités. » Pudeur et intégrité dont ne
s’embarrassent guère les « sapeurs-pompiers » de
L’Arche de Zoé, comme en témoigne leur reconversion
géographique de l’Indonésie au Tchad sous couvert de
sauver les enfants orphelins du Darfour. On est dans
le « Sans frontiérisme », pour reprendre un néologisme
forgé naguère par Jean-Christophe Ruffin, alors
vice-président de MSF, aujourd’hui ambassadeur de
France au Sénégal.
Le « French doctor » Bernard
Kouchner, ministre français des Affaires étrangères, parle d’ « humanitaire dévoyé ».
Comportement qui sonne le glas de
l’humanitaire…L’Afrique en général et le Tchad en
particulier n’a pas besoin de « bons sentiments » au
service de combats douteux humanitaires, mais de
développement ! Le « Tout humanitaire » est une
impasse suicidaire : la chronique d’une mort annoncée…
Le Continent de « l’Homme Africain » n’a pas besoin de
pompiers pyromanes… Pour la horde de l’Arche de Zoé, il
faudra appliquer la loi, toutes les lois tchadiennes, françaises et
internationales, le Droit, rien que le Droit mais tout
le Droit. La justice tchadienne devra appliquer le
slogan cher au président Sarkozy : « Tolérance zéro »…